Barsac

Histoire générale de la commune.

 

M.Franck CHASSAIGNE 

1913/1920

Imprimerie administrative RAGOT 
11 rue Ferdinand PHILIPPAUX Bordeaux.

L'homme qui n'a pas d'histoire est tout entier dans la tombe.
R.P. LACORDAIRE.

Lettres à un jeune homme sur la vie chrétienne. 28 avril 1858.

 

Mémoire de Bommes. Livre N°18

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Sommaire:

Jusqu'en 56 avant Jesus-Christ ? 
De 56 avant Jesus-Christ jusqu'au IIIème siècle.
IVème Siècle.
Vème Siècle.
VIème Siècle.
VIIème, VIIIème, IXème Siècle
Chapitre VIII

 

Jusqu'en 56 avant Jesus-Christ ?

 

L'histoire ne rapporte pas comment et par qui fut fondé Barsac. Sa naissance n'est entourée de légendes merveilleuses et ne possède pas l'éclat que donne le nom d'un fondateur illustre.

Barsac est sité sur la rive gauche de la Garonne à 37 km au sud-est de Bordeaux, dans cette longue dépression naturelle, qui relie les deux plus grandes mers du monde civilisé, la Méditerranée et l'Océan Atlantique, presque à ce même endroit où une autre dépression croise perpendiculairement la première, s'étendant des Pyrénées à la Loire, à la Seine et au Rhin.

Et il est certain que les Aquitains, les Gaulois, les Romains on foulé notre sol aux époques lointaines, que la route du midi nous amena les Sarrazins, celle du nord les Angevins et les Français.

Peut-être la fondation de Barsac serait-elle due à ces bandes de pillards et de conquérants venus de la Gaule Centrale, qui,  après avoir chassé les Aquitains de Bordeaux s'établirent sur les deux rives de la Garonne, de Blaye (Blavia ) jusqu'à Langon ( Aligo ) qu'ils fondèrent

Malheureusement les monuments s'écroulent, les documents écrits disparaissent, les traditions se perdent et nous devons nous résigner à ne rien affirmer pour ne point courir le risque de trop nous éloigner de la vérité.

Nous verrons par la suite comment la fondation de Barsac vers le milieu du IVème siècle est à peu près certaine.

Chapitre II

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De 56 avant Jesus-Christ jusqu'au IIIème siècle.

En l'an 56 avant notre ère, les Romainsaprès avoir rapidement soumis la Gaule du Nord, pénétrèrent dans notre région.

Jules César y envoya son légat Publius Crassus. La Campagne contre les Aquitains fut des plus rudes (les Barsacaisy auraient-ils pris part ?) puis tout fut soumis.

Vers la fin du premier siècle, les petites peuplades voisines de Bordeaux furent groupées sous les ordres suprêmes des magistrats résidants à Bordeaux, capitale du territoire Biturige, résidence du Sénat, centre religieux et moral, et la cité des Bituriges Vivisques, s'étendant sur plus des deux tiers de notre département et ne finissant qu'à Langon, comprenait donc notre commune.

L'unité matérielle de l'Empire s'acheva peu après, grâce à la construction de routes nombreuses, et on aperçoit encore sur le territoire de Barsac les restes de la chaussée qui menait de Bordeaux à Bazas par Saint Selve, et la Narbonnaise, qui longeait les marais de la Garonne et les séparait des premières forêts intérieures, traversait également notre commune et est devenue la route nationale.

Au début du IIIème Siècle, un édit de Varacalla fit des Bituriges Vivisques, par conséquent des Barsacais, des citoyens Romains.

Mais la première invasion étrangère (276/277) vint anéantir en un instant les fruits que trois siècles de paix avaient fait naître. Bordeaux fut détruit presque aussi complètement que l'avait été Pompeï, et il est certain que Barsac fut traversé par des troupes, car, çà et là, dans nos campagnes, on trouve dans des vases en terre cuite des monnaies Impériales antérieures à Aurélien.

Note: En 1887 un terrassier de Preignac découvrit, dans un vase en terre, 500 monnaies Impériales. Aucune n'est postérieure à Aurélien.

On devine qu'elles avaient dû être enfouies à la hâte, devant l'arrivée de bandes ennemies. Cependant, si la cité des Bituriges Vivisques fut détruite, elle n'en demeura pas moins romaine et peu après Probus nous en délivra, en délivrant la Gaule toute entière (277).

Chapitre III

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IVème Siècle.

 

Au début du IVème Siècle, la constitution politique des provinces gauloises fut remaniée par l'Empereur Constantin, et le territoire de notre commune fit partie de la Seconde Aquitaine (Aquitania Secunda), dont Bordeaux était la métropole, résidence du Gouverneur ou Président (praeses) et de ses bureaux.

A côté de l'administration civile, il y a maintenant une administration militaire, la seconde Aquitaine était placée sous la dépendance du Duc de l'Armorique (Dux Tractus Armoricani), chargé de la défense de toutes les provinces maritimes, depuis la Seine jusqu'aux Pyrénées. Ce n'est plus l'heureuse sécurité d'antan ! C'est la vie du Moyen Age qui va commencer.

Et cependant, c'est grâce à cette organisation nouvelle que l'Aquitaine dût la paix dont elle jouit pendant le IVème Siècle et si Bordeaux, la cité ouverte, aux contours gracieux, aux abords faciles, des trois premiers siècles,  a fait place au Castrum, au château fort qui dresse au-dessus des marécages sa masse solitaire et menaçante, du moins la campagne a repris sa fraîcheur primitive.

De brillantes villas étalaient sur le fleuve ses marbres et leurs sculptures, de Blaye jusqu'à Bourg, de Bordeaux jusqu'à Langon et il est bien à supposer que Barsac en eut sa part.

D'ailleurs il n'y eu pas dans le monde romain de région plus vantée que la nôtre, et si les blés dorés et ses huîtres savoureuses valurent à notre pays l'épithète de " gras ", notre commune ne fut sans doute pas étrangère a celle de " joyeux " que lui valurent ses vins généreux.

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  Nous avons tout lieu de croire que si Barsac fut habité antérieurement à cette date par les barbares, qui pour quelques jours y plantèrent leurs tentes, sa fondation ne remonte qu'à cette époque.

La plupart des bourgades de notre Pays ne sont en effet que le résultat de la transformation des villas, qui venaient de s'établir sur les bords de la garonne. Floirac, Gauriac, Preignac, Pauillac sont autant d'anciens domaines de seigneurs Gallo-Romains

Leur nom même l'indique: Floirac du latin Floriacus, est la villa d'un Florus, Pauillac, pauliacos, celle d'un Paulus et Barsac doit être celle d'un Barus ou d'un Barsus.

Peut-être même la désinence "ac", très fréquente dans les noms des communes de notre région, vient de l'abréviation du mot latin "aqua" et qui servait à désigner les bourgades placées sur le bord du fleuve.

Comme il convient de souligner que le latin est une langue fort rythmée, les diverses syllabes sont soit des longues soit des brèves, il arrivait que l'oreille ne retenait que les syllabes longues, et l'écriture ne tardait guère à consacrer la prononciation usuelle. Il ne serait donc pas étonnant que par déformation et usure, le langage s'usant comme toute chose, et aussi vite, les mots Barsus ou Barus Aqua soit rapidement devenus Bar s ac ou Barsac. 

Plaçons nous dans cette dernière hypothèse, qui nous paraît être la véritable et disons ce qu'étaient ces villas gallo-Romaines.

Ausone nous fournit à ce sujet de précieux renseignements.

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Tout le Bordelais appartenant à la fin du IVème Siècle à un assez petit nombre de grandes familles, et ces grands propriétaires fonciers étaient maîtres absolus dans leurs terres, véritables cités dont la villa du propriétaire formait le chef-lieu.

Ces propriétés étaient souvent, comme les grandes villes, entourées de remparts et flanquées de tours. Elles possédaient tout ce qui est nécessaire à une grande exploitation: greniers, fours, écuries, ateliers, tuileries, tonnellerie, forges et hangars formaient un village autour de l'habitation du maître. 

Le domaine se suffisait à lui même.

C'était au pouvoir d'un seul, un communauté rurale parfaitement constituée. Le possesseur du domaine était une sorte de petit chef d'Etat, de magistrat domestique.

Des fermiers, des métayers, mais surtout des colons attachés au sol, cultivaient une partie de ses terres moyennant des redevances, et il en exploitait l'autre directement par ses esclaves, des esclaves et des affranchis formant sa domesticité intérieure.

Il avait ses secrétaires, ses intendants, ses chefs d'équipes, ses courriers. Il faisait, avec ses hommes, la police de ses domaines, poursuivait et jugeait les brigands, avait ses prisons et ses fosses profondes. 

A la tête de ses serviteurs, il deviendra bientôt un chef de bande, le Capitaine d'une petite armée. Mais il n'y songe pas encore. Tous ces grands propriétaires qui portaient le titre honorifique de  "Sénateur romain" ou d' "Hommes très Illustres "  Viri Clarissimi, n'ont point l'humeur batailleuse et s'ils adorent la chasse, les chiens et les chevaux, ils aiment presque autant la rhétorique, la poésie et les livres, et la guerre n'est point leur fait.

Il est à remarquer que la fondation de Barsac coïncide avec les débuts du christianisme dans la région de Bordeaux.

Le premier Evêque bordelais, dont l'histoire fasse mention est bien Orientalis sous Constantin (314) mais la transformation religieuse ne fut complète qu'au moment où les Empereurs donnèrent au christianisme leur appui officiel. 

Et c'est sous Gratien (375/383) que le christianisme devint une religion d'Etat.

Les premiers habitants devinrent donc catholiques, en même temps qu'ils devenaient Barsacais

Disons en outre que la langue officielle du gouvernement était le latin; les Empereurs s'en servaient, les soldats l'apprenaient et les premiers Barsacais le parlèrent. On retrouve encore dans le patois actuel des mots d'origine latine.

Telles furent, d'après nous, les origines de notre petite ville et la manière de vivre de ses premiers habitants.

Chapitre IV

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Vème Siècle.

 

La vie romaine continua dans notre province de Seconde Aquitaine, lorsque, en 418, l'Empereur Honorius la concéda, à titre défibitif, au roi Wallia et à ses Wisigoths, "en récompense de leurs services".

L'établissement des nouveaux venus se fit sans de trop grandes secousses, et la population de Barsac s'en trouva augmentée, du moins, les anciens propriétaires ne furent ni dépossédés ni proscrits.

Les domaines étaient assez vastes et assez fertiles pour doter et  pour nourrir les nouveaux arrivants. Le Roi des Wisigoths prit en main l'autorité militaire de toute la région et s'attribua, en outre, la direction des affaires civiles. 

Sous ce nouveau régime notre région fut des plus prospères et les détenteurs de notre sol, dit un prêtre chrétien de l'époque, "semble posséder moins une portion de terre qu'une image du paradis".

Chapitre  V

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VIème Siècle.

 

Dès que Clovis eut battu Alaric à Vouillé, la domination des Wisigoths s'écroule en Aquitaine (507). Clovis passa l'hiver de 508 à Bordeaux, et notre région, comme toute la Gaule d'ailleurs, devint le royaume des Francs.

La pure latinité classique, qui faisait le renom de l'Aquitaine, a disparu devant la montée croissante du latin vulgaire. C'est alors que commence cette déformation du latin, d'où, devait sortir, quelques siècles plus tard, notre idiome gascon.

Sous la royauté Franque, tous les Bordelais sont plus ou moins astreints, quand il le faut, à faire le service militaire et Barsac dût avoir sa première milice locale.

Vers la fin du VIème Siècle, tous les fléaux, sans exception, frappèrent notre région, naguère si florissante; des épidémies décimaient la population; des épizooties vidaient les étables; les hivers étaient des plus rigoureux et les loups parcouraient nos campagnes; enfin un violent tremblement de terre causa d'importants dégâts; les hommes épouvantés cherchèrent un asile dans la religion et l'exaltation est restée comme un trait distinctif de ces générations.

Chapitre  VI

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VIIème, VIIIème, IXème Siècle.

 

  En 628, notre commune fit partie du royaume d'Aquitaine, que Dagobert, "sur le conseil d'hommes sages", concéda à son frère Charibert, qui mourut bientôt après (630).

Le royaume d'Aquitaine fut alors repris par le Roi des Francs. Pendant plus d'un siècle on entend plus parler de Bordeaux ni de l'Aquitaine. Puis brusquement nous trouvons notre province maîtresse de ses destinées, luttant avec l'énergie du désespoir contre les envahisseurs arabes. 

Il y eut aux environs de Bordeaux de sanglantes batailles et certains historiens prétendent que les Arabes campèrent sur le Ciron, près de son embouchure. Il est donc à présumer qu'ils campèrent à Barsac. (721/732).

Chapitre VII

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Barsac suivit donc le sort de toute la province d'Aquitaine, mais si jusqu'ici nous nous sommes bornés à exposer l'histoire de toute une province pour en déduire l'histoire d'une commune à ses débuts, nous sortirions de notre rôle de chroniqueur local, en continuant, pour écrire une monographie, d'exposer l'histoire générale.

Malheureusement, il nous faut, pour trouver des faits précis, franchir une longue période. Presque à la sortie de la villa de Barus, nous sommes ainsi transportés à travers l'inconnu. Et nous nous retrouvons soudain dans l'église Saint Vincent de Barsac, où le 12 avril 1600, le fougueux Cardinal de Sourdis confirme les Barsacais.

A partir de cette date, les registres paroissiaux, qui sont bien conservés, font mention, outre les renseignements démographiques que nous utiliserons tout à l'heure, des grands événements, qui intéressant notre commune.

Mais avant de les passer en revue, il convient de nous attarder un instant sur notre magnifique église, que nous avons eu la bonne fortune de pouvoir faire classer monument historique

Son Origine remonte certainement à la Renaissance. La disposition des voûtes, avec leurs arcs en anse de panier, le tombeau de Saint Jean, qui se trouve dans la chapelle , dite des Morts, avec ses colonnettes élégantes et surtout les niches en coquille, qui rappelle si bien celles du château de Blois, ne laissent aucun doute à ce sujet. 

"Dans l'ensemble, l'église de Barsac est un édifice mixte, à la fois médiéval et classique. Les voûtes sont inspirées du gothique, mais dans la section des piles, dans le profil des moulures et des nervures dominent les courbes classiques".

Ainsi s'exprimait Paul Courteault, professeur à la Faculté des Lettres de Bordeaux, dans son ouvrage " Bordeaux, Cité classique".

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Les parties les plus admirables du bâtiment sont les voûtes ( et l'on remarquera particulièrement l'ingéniosité avec laquelle sont reçues les pesées des charpentes) et la triple tribune du fonds des nefs, qui rappelle celle de Notre Dame de Bordeaux; on y trouve en effet le même système d'arcs en surplomb, dont la hardiesse s'allie à la recherche et au raffinement.

Mais cette élégance ne va pas sans une certaine fragilité. Et sans parler de la réfection des fondations à laquelle nous avons présidé un peu avant la guerre de 1914, ni des travaux effectués à la suite de la chute de la foudre en 1843, qui précipita le clocher à terre, entraînant avec lui 70 mètres carrés de voûte, retrouvons la trace de travaux entrepris au début du  XVIIIème Siècle pour la somme de 14.700 livres tournois et en 1823, où pour réparer une partie des voûtes une somme de 53.000 francs fut encore nécessaire. 

Heureusement la fabrique de Barsac était une des plus riches du Diocèse. Elle possédait au XVIIIème Siècle " en terres produisant oeuvre et foin, 10.000 francs de revenuu, sans compter les dîmes inféodées et ses droits de pêche sur la Garonne".

Parmi les autres constructions très anciennes de Barsac, il faut citer les Moulins du Pont et de Pernaud.

D'après un document placé sous le numéro 93 aux archives départementales, le Moulin du Pont, et le pont du Ciron (construit en 1583) qui en dépendait, appartenaient à " personne noble Jacques de Rolland, écuyer, sieur du Pont, habitant de la ville de Bordeaux, paroisse Saint Eloy" et furent vendus par lui le 11 juillet 1670 aux prieurs et religieux du Couvent de la Chartreuse Notre Dame de Miséricorde de Bordeaux pour le prix de 42.000 Livres Tournois.

Sur le Moulin de Pernaud, nous savons qu'en 1477, il s'appelait Pey Arnaud, et qu'en 1772 il appartenait à "messire Léonard Sauvage, seigneur Diquem".

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Et voici maintenant la nomenclature des faits dignes de mémoire, postérieurs au 12 avril 1600, et qui ont été consignés dans les registres paroissiaux, dont nous avons parlé plus haut.

Le 2 avril 1604, il est à noter que "ce jour fesait un grand chault, de sorte qu'il y a deux mois qu'il continue, ce que l'on ne vit fère longtemps, et a brulé force vendange".

Le 23 juillet 1606, la Garonne sortit de son lit et les récoltes furent perdues, " à cause du débordement des eaux".

On voit là que le dérèglement des saisons ne date pas d'hier puisque la canicule se passe en avril et que par contre, deux ans plus tard, les inondations du fleuve ont lieu en plein mois de juillet.

Le 21 novembre 1615,

"La Royne de France, épouse du Roy, passa en ce lieu, venant d'Espagne, avec des flambeaux à cause qu'il était nuit, bien accompagnée mesime de M. de GUISE qui conduisait le tout, et alla loger à Podensac."  

Le 1 janvier 1616

"se leva le pont du Siron pour empêcher la course des Huguenotz".

Les habitants de Preignac, conduits par le sieur de Sauvage, tentèrent bien de rétablir le pont, mais les assaillants furent repoussés après trois jours de lutte et la victoire resta aux Barsacais.

En janvier et février 1617

"il c'est truvé qu'on trabailloit le soir au ry de lune et le jour on évitoit la chaleur du soley".

En janvier et février c'est encore plus fort qu'en avril 1604.

Le 15 février 1618, la Garonne déborde; l'eau pénètre dans l'église et dans le cimetière, couvrant "de quatre partz les toits de toute la paroisse"

Très grand froids en décembre 1623 et février 1624,

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"Les vignes se gellarent et morurent la plus grande partie".

Cinquante deux ans plus tard, le 17 novembre 1675, les Barsacais semblent ne plus se souvenir du glorieux épisode de 1616 et ils s'enfuient à Illats, "à cause du passage des gens de guerre".

A cette même époque, nous trouvons Bordeaux en insurrection contre l'absolutisme de Louis XIV. A cours d'argent pendant la guerre de Hollande, le Roi établit le septime du papier timbré, puis coup sur coup le monopole du tabac et la marque de la vaisselle d'étain.

Ces mesquineries fiscales et l'entêtement de Colbert amenèrent une émeute des plus sanglantes et le 17 novembre 1675, dix huit régiments entrèrent dans Bordeaux et la traitèrent en ville conquise, "violant, volant, tuant, incendiant".

C'est donc au passage d'un ou de plusieurs de ces régiments que le chroniqueur fait allusion.

Le 1 mars 1708, Barsac fut doté de deux sage femmes, et il n'est pas sans intérêt de savoir qu'elle furent élues par les femmes de la paroisse.

Jeanne Capdebile et Anne Renier n'exercèrent cependant qu'après  avoir été "examinées sur leur capacité par M. Benoit, chirurgien de Barsac". 

Le 19 novembre 1714, l'église Saint Vincent de Barsac reçut trois cloches. Parmi les parrains et marraines nous trouvons: Anne de Tarneau, épouse d'Elie de Suau, Conseiller à la Grand'Chambre; Richard de Rolland, Ecuyer, Sieur du Pount et Marie Saint Cricq, épouse de M. de Myrat.

Les famille de Suau, de Rolland, de Myrat se sont éteintes aujourd'hui, et si nous les indiquons, c'est que nous retrouvons les châteaux qu'elle habitaient et qui portent encore leur nom. 

La bénédiction du nouvel autel de Saint Eutrope, le patron de la paroisse, et de l'autel de Sainte Anne eut lieu le 23 octobre 1769.

L'année 1770 nous amène un débordement très violent de la Garonne. Les registres de 1770 "ayant resté pendant deux jours couverts d'eau, dans la petite armoire du vestière de la sacristie" sont retranscrits par les soins du Curé.

Le débordement causa une grande misère dans notre commune. La fabrique fit distribuer aux pauvres pour 400 livres de pain. Un envoi d'une égale somme fut fait par l'Intendant.

Et nous abordons ainsi la période révolutionnaire.

Chapitre VIII

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On sait qu'antérieurement au décret du 18 décembre 1789, qui pour la première fois organisa les municipalités, en France, la législation relative à l'organisation municipale variait de commune à commune.

Souvent les intérêts de la communauté étaient discutés au milieu d'une Assemblée Générale des habitants, parfois aussi, la présence de dix personnes suffisait pour valider une délibération. Il n'y avait aucun ordre, aucune unité.

Aussi n'est-il pas sans intérêt de savoir que lorsque parut le décret précité, Barsac avait déjà élu un Comité pourvu d'un règlement constitutionnel.

Ce règlement, qui comprend vingt trois articles, fut élaboré par le Sieur Libéral, juge de la Prévôté de Barsac.

Au termes de l'article premier, le Comité était composé de quatorze personnes éligibles pour la place de Président.

Et le 10 septembre 1789, les habitants de la paroisse de Barsac, assemblés dans l'église, "après la convocation qui a été faite dimanche dernier par Monsieur le Curé, et mardi dernier publiquement par Monsieur le Juge"

Approuvaient, à l'unanimité, le règlement dont lecture veanit d'être faite, et nommaient M. Libéral, Juge Royal de la Prévôté de Barsac, Président du Comité, en lui donnant pour Conseillers:

Messieurs Prost J.J, Laborde, Tauzin, Duprada, Bernard Coutures, Pascaut dit Prince, Jean Bernadet aîné, Capdeville de Motte, Jean Pascaut dit petit ,de Camotte, Jean Gaussem syndic, Martial Barbère et Despujols père.

Les pouvoirs du comité sont très étendus, et s'il fait défense aux matelots et patrons de bateaux du port de Barsac de "charger dans leurs bateaux aucune corbeille de raisin dont le porteur ne lui produira pas un certificat du propriétaire chez qui les raisins ont été pris".

S'il fixe le prix du cloine à 4 sols 6 d. la livre et celui du pain commun à 3 sols 3 d., il n'hésite pas à condamner à la peine de mort… un grand chien "qui est d'autant plus dangereux qu'il saisit les personnes sans aboyer"

Et qui en présence de témoins, à déchiré l'habit du Sieur Deyrem, Chirurgien de la paroisse.

Par le suite, le Maire et les officiers municipaux élus en conformité de la loi du 18 décembre 1789 remplacèrent en avril 1702 le Comité Libéral; mais cela ne fut pas chose facile si nous en croyons Ferran, Procureur de la commune qui s'exprime en ces termes.

"Les discussions fomentées dans cette communoté par des esprits inquiets et énnemis de la légalité dégénéraient bientôt en une guerre ouverte si le corps municipal ne se hatait pas de déploier son autorité pour les étouffer".

Et suit le long détail de tout ce qui s'est passé pendant le cours de ces élections.

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Cependant la patrie est en danger. Trente volontaires sous le conduite du Commandant Boireau, se réunissent dans l'église. Le Commandant monte en chaire et nos énergiques Barsacais, après avoir entendu la messe, jurent de vaincre ou de mourir.

Vient ensuite l'épopée Napoléonienne. Nous manquons de détails sur cette époque. Nous savons seulement que pendant les cent jours "Dubourg Marron labourait dans son champ, quand il entendit sonner les cloches, et, laissant tout en plan, partit se battre sous les ordres de Napoléon."

Les 2, 3 et 4 juin 1817, il y eu à Preignac, Barsac et Villandraut une véritable émeute occasionnée par la pénurie des grains à la suite de la très mauvaise récolte de 1816.

Le 2 juin 1817 une certaine quantité de blé d'Espagne et de maïs était arrivée à Preignac et déposée dans les greniers d'un certain Dubosc, pour y être vendue au prix courant de 30 francs l'hectolitre.

Dès le matin un  attroupement se forma, Dubosc essaya de calmer la foule en abaissant le prix de 5 francs par hectolitre et le Maire de Preignac, prévenu, tenta mais en vain de faire accepter cette offre. Le magasin fut envahi et tout le grain emporté ?

Encouragés par ce premier succès, le lendemain 3 juin, six cents individus se réunissent aux abords du pont de Barsac, où se trouvait l'important moulin de M. Chabret, qui approvisionnait en farine les Hospices de Bordeaux.

Les factieux armés de pierres, de gros bâtons et même de haches menaçaient d'enfoncer la porte du moulin si le propriétaire ne leur donnait pas son pain et sa farine.

Chabret distribua alors trente trois pains. Mais ce geste ne calma pas longtemps la foule qui ne cessait de s'accroître. Elle ne tarda pas à envahir le moulin et Chabret offrit successivement vingt et cinquante livres  à chacun de ceux qui y pénétraient. Une cinquantaine d'hectolitres de farine n'en furent pas moins enlevés.

Et le lendemain, après une nuit calme, l'assaut recommençait dès la pointe du jour. Il fallut l'arrivée de deux brigades de Gendarmerie pour rétablir l'ordre, mais dans la véritable bataille rangée qui s'était engagée, il y eut un gendarme et un émeutier tués.

Douze individus arrêtés furent jugés le 4 août 1817 par la Cour Prévôtale, et condamnés à une peine variant de un à quatre mois de prison. 

En 1847, se place l'origine de la cueillette des raisins arrivés à l'état de surmaturation, atteints de ce que nous appelons aujourd'hui " la pourriture noble". Et comme pour la plupart des découvertes humaines, ce fut le hasard.

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L'été et l'automne 1847 ayant été d'une température exceptionnelle " après que les raisins eurent commencés de pourrir, un temps superbe arriva, et pour ne pas les laisser sur la vigne, on en fit du vin."

 Le résultat ayant dépassé toutes les espérances, les viticulteurs modifièrent leur mode de vinification, pour obtenir, si possible, les raisins " pourris" de 1847 

Voyons maintenant brièvement quelles étaient les conditions de vie des vignerons et des tonneliers, à cette époque.

En 1830, Gaussem, au Carretey, vendit deux barriques pour 50 francs les deux, nu.

En 1837/1838, le même vendait 150 francs le tonneau logé. Puis en 1841, on signale des ventes au prix de 300 à 320 francs le tonneau. Lorsque soudain la découverte des raisins pourris signalée plus haut vint permettre d'atteindre des prix surprenants, non plus de 300 francs le tonneau mais bien de 300 francs la barrique. La renommée de la région était définitivement assurée.

Quand aux tonneliers, ils étaient trois fois moins nombreux que les vignerons. Et quand de fortes gelées, comme en 1834/1835, les privaient de travail, ils allaient piocher la terre. On dolait l'hiver, on montait les barriques ensuite, et à la fin de l'été quand les bois étaient secs, on les liait.

Le salaire des tonneliers était de 30 francs par douzaine (en 1833, à la Saint Martin). On fabriquait ainsi non seulement pour les besoins de la commune, mais encore pour le Médoc, où l'on écoulait les excédents.

C'est à cette époque que se fonda la Société de Secours Mutuels. Les membres gagnaient 1 franc à 1 franc 50 par jour et on exigeait d'eux une cotisation de 1 franc par mois.

Un demi siècle plus tard , alors que les salaires avaient doublé, et même plus que doublé, la prime ne pouvait être augmentée de quelques centimes, sans soulever les plus vives protestations. Cependant l'abus des visites médicales et des soins pharmaceutiques grevaient terriblement le budget des Sociétés

On constatait d'ailleurs de plus en plus que le principe primordial " aidez-vous les uns les autres" avait disparu, et ceux qui n'avaient pas été malades déploraient de n'avoir ainsi jamais retiré  de la société de Secours  tout ou partie de l'argent qu'il lui avait versé. Cet état d'esprit égoïste n'existait pas autrefois  et il est lamentable d'avoir à le signaler.

Il convient d'ajouter que si en 1850 un cafetier avait peine à vivre dans notre commune, cinquante ans plus tard, on pouvait en compter quatre ou cinq, et qui vivaient tous très largement.

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Enfin il nous semble difficile de ne pas parler en terminant de pylloxéra. L'étymologie de mot vient du grec phullon feuille et xeros sec. Les vignes soudain se déchessèrent. Un genre d'insectes, très petits, voisins des pucerons, nous étaient venus d'Amérique et se répandant très rapidement dans nos vignobles, les détruisaient complètement. 

Par la greffe de vignes françaises sur plants américains, on put prévenir le retour d'un pareil désastre, mais tout était à replanter. Nos vignerons se mirent à la besogne avec courage.

Mais ils n'étaient pas au bout de leurs peines, y est on jamais, Une mévente terrible des vins sévit alors, qui se prolongea jusqu'aux approches de la Grande Guerre de 1914.

Mais plus un sol offre de difficultés et plus le paysan y est attaché. Les Barsacais restèrent dans leurs vignes, à refaire inlassablement le décevant travail des hommes, avec la sereine conscience d'avoir raison un jour, d'être dans la vérité.

Nous voici donc arrivé au terme de cette succincte étude historique de la commune de Barsac. Puisse le lecteur trouver autant de plaisir à la lire que nous avons eu à l'écrire, puissent ces modestes pages contribuer à faire aimer notre petite patrie.

Barsac 1913

Arcachon 1920

   

 

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Réalisée le 20 mai 2002  André Cochet
Mise ur le Web le  juin 2002

Christian Flages

Mise à jour le 

                 

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