Nuits du patrimoine. |
Avec la collaboration de: |
"renaissance des cités d'europe" |
Barsac le 20 septembre 2003. |
Marie-Thérèse-Charlotte |
Fondatrice et Première Supérieure de la Maison de la Miséricorde de Bordeaux. |
Marie-Christine Baquet. |
Association Art, Vin et Patrimoine. |
Barsac illuminé. |
naquit
le premier novembre 1754 à Barsac peut-être au château de Bastard ?
Son
père, Louis Marc Antoine Jean de Lamourous, écuyer, et sa mère, Elisabeth de
Vincens, tenaient tous deux un rang recommandable parmi la noblesse du pays, et,
ce qui est plus, devant Dieu, ils étaient tous deux d'une piété digne des
premiers temps de l'Eglise.
Thérèse
vint au monde deux mois avant le terme ordinaire. Il en résulta pour elle un
tel état de faiblesse que ses parents, comme elle le racontait elle-même avec
beaucoup de simplicité, ayant honte de la voir infirme et dépourvue de grâce
dont la nature orne les autres enfants, la tinrent cachée pendant quelques
jours.
C'est
apparemment pour cette raison qu'elle ne reçut le baptême que le 4 novembre
1754, jour de la St Charles, dont elle porta le nom avec celui de MarieT érèse.
Elle eut pour parrain Charles de Lamourous, écuyer, au nom de Charles Mathurin
de Vincens, vicomte de Césac, conseiller au Parlement, et pour marraine,
Marie-Thérèse de Monjon.
On
dut ensuite se donner beaucoup de soin et de peine pour conserver sa frêle
existence. Elle avait déjà deux ans accomplis qu'elle paraissait n'avoir
qu'une seule année. Cependant, malgré les misères de son enfance et les fréquentes
maladies dont elle fut assaillie par la suite, son tempérament devint très
fort, et elle parvint jusqu'à sa quatre vingt deuxième année.
Sa
figure grêle et comme difforme à sa naissance se remplit peu à peu et, plus
tard, elle s'embellit par l'expression de la vertu qui y régnait: elle charmait
tout le monde. C'est le témoignage que lui rendent les personnes qui ont eu le
bonheur de vivre avec elle, et même celles qui ne l'ont vue qu'une seule fois.
Jusqu'à
l'âge de onze ans environ, elle vécut à la campagne. Sa mère par une
attention délicate, ne voulant laisser à personnes le soin de sa première éducation,
fut elle-même son institutrice. Elle ne négligeât rien de ce qui pouvait
contribuer à développer les talents dont le Ciel avait orné son enfance, et
la mettre en état de se rendre utile à la société au sein de laquelle elle
devait couler ses jours.
Mais
elle s'appliqua surtout à faire de Thérèse une sainte, et les semences de la
vertu qu'elle jeta de bonne heure dans son coeur ne furent point confiées à
une terre ingrate.
Cette
chère enfant étant à peine en état de former quelques pas, Mme de Lamourous
se faisait un bonheur de la conduire le dimanche à l'église. Là, cette
vertueuse mère se croyait abondamment payée des soins et des peines qu'elle se
donnait pour sa fille, quand elle considérait sa tenue dans la maison du
Seigneur et la ferveur avec laquelle elle épanchait, au pied des autels, son âme
innocente.
Son
enfance était des plus naïves et des plus aimables. Un amour précoce du
travail lui donnait de nouveaux charmes. A l'âge de trois ans, elle maniait
l'aiguille avec assez d'adresse pour coudre des mouchoirs à son usage. L'on
conservait à la Miséricorde une petite armoire où elle serrait avec beaucoup
d'ordre les habillements qu'elle faisait à sa poupée.
Thérèse montrait un goût particulier pour tout ce qui tenait aux oeuvres de piété et de zèle. Elle était l'aînée et le modèle de quatre soeurs et d'un frère qui, avec elle, composaient la famille. Secondant, avec une maturité bien au-dessus de son âge les soins que Mme de Lamourous se donnait pour former ses enfants à la piété, elle les instruisait elle-même et leur enseignait à connaître Dieu, à l'aimer, à le prier. Ses soeurs profitaient de ses naïves leçons et de ses bons exemples.
Dès la plus tendre enfance, Thérèse aimait à parler du bon dieu. Quand elle se trouvait avec des enfants, elle suivait avec liberté le penchant de son âme et, ce qui est bien plus remarquable, la piété s'alliait parfaitement en elle avec la gaieté qui lui était naturelle.
Elle fit avec Dieu un contrat admirable de simplicité :
"Mon
dieu, lui dit-elle un jour, à genoux devant un crucifix, je vous promets de
porter trois croix par jour sans pleurer, mais s'il en vient davantage, je ne réponds
pas de retenir mes larmes."
Elle allait fréquemment toute seule dans la vigne de son père. Là, pour imiter la solitude des anciens anachorètes dont on lui avait raconté l'histoire, elle faisait des cabanes de feuillages. Elle s'y renfermait et y restait plus longtemps que la ferveur de son âge ne semblait le comporter.
"Et
alors, disait-elle en racontant ce trait de sa vie, il me prenait envie, au
milieu de mes réflexions, de manger un raisin, je pensais que les solitaires
mangeaient bien aussi, et je les imitais en ce point avec beaucoup de dévotion.
"
Elle
était d'une grande obéissance. Un mot de sa mère était pour elle un oracle.
Mme de Lamourous lui avait dit que si, dans l'obscurité, elle voyait quelque
chose qui lui fit peur, elle allât le toucher. Un soir, elle eut besoin
d'entrer dans le salon. Il n'y avait pas de lumière et la pauvre enfant crut
entrevoir je ne sais quoi d'étrange. Ne pouvant distinguer ce que c'était,
elle eut peur, mais se rappelant ce que sa mère lui avait recommandé, elle se
dit qu'il fallait avancer et obéir à sa maman.
Elle
s'approche donc, quoiqu'en tremblant, et saisit justement par la barbe un
capucin qui, accoutumé à venir dans la maison, s'était retiré dans ce lieu,
sans doute pour prier. Le bon religieux, effrayé lui-même, se hâta de se
faire connaître, et l'enfant de lâcher prise et de se confondre en excuses.
Cette
enfant si chère au coeur de tous ceux qui la connaissait et, surtout, de sa mère,
tomba dangereusement malade. Mme de Lamourous fit part à une respectable
religieuse de sa douleur et de ses craintes.
"Soyez tranquille Madame, lui répondit celle-ci, votre fille se rétablira. Dieu a de grands desseins pour elle." L'événement fit regarder cette parole comme une espèce de prédiction.
A l'age d'environ onze ans, elle fut amenée à Bordeaux où vint se fixer sa famille. Elle se préparait depuis longtemps à la première communion et son coeur soupirait ardemment après cet heureux jour. Il y avait dans son âme un grand fond de candeur et de simplicité. Elle éprouva cependant à cette époque de grandes craintes et les ressentit encore après. C'était sans doute l'effet de la vivacité de sa foi et de la délicatesse de sa conscience.
Thérèse
fit sa première communion peu de temps après son arrivée à Bordeaux, le jour
de l'Ascension. Elle reçut le pain des anges avec un désir ardent et une sorte
d'activité spirituelle. Aussi en retira-t-elle des fruits abondants. Elle
connut plus intimement et aima dès lors plus tendrement son bon maître. Elle
se sentit un désir plus pressant de s'avancer dans la vertu, et de se conformer
en tout à la volonté divine.
Son
enfance se partagea entre la maison de Bordeaux, les deux vignobles de Barsac
(Le Mayne et Le Roc) et le vignoble du Pian qui paraît avoir eu la prédilection
de la famille.
Depuis
sa première communion jusqu'à la Révolution de 1789, la vie de Thérèse fut
toujours édifiante mais resta simple et uniforme, Elle ne s'était pas mariée,
alors que ses soeurs fondèrent une famille. Elle était pieuse et il semble
qu'elle se destinait à une tâche spirituelle.
Laquelle
?
Il
fallut longtemps pour la trouver : cela se passa en pleine Terreur alors qu'elle
avait 40 ans. Dans le domaine du Pian, elle hébergeait des prêtres de passage
qui célébraient des messes, administraient les sacrements.
L'un
d'eux, le Père Chaminade, devint vite son Directeur de conscience En 1794, dénoncée,
elle comparut devant le tribunal révolutionnaire de Bordeaux, mais son attitude
crâne et moqueuse aurait eu raison de Lacombe.
Le
Père Chaminade reconnaît en elle la femme qu'il fallait pour la, nécessité
du temps. Le père de Marie Thérèse qu'elle avait entouré et soigné, mourut
au Pian en 1799. Sa fille était libre et le premier janvier 1801, elle
s'installait avec une centaine de pénitentes dans une grandes maisons du cours
d'Albret.
Plusieurs
dames vinrent l'aider : Melle de Pichon-Longueville, Mme Adélaïde, une
ancienne Madelonette ... Mais comment loger, nourrir tout ce monde dans ce
qu'elle appelait "la Maison
de la Miséricorde" ?
Tout
simplement en l'agrandissant. Elle acheta les Annonciades sans un sou en poche.
"N'entreprenez rien sans le secours de la sainte Vierge",
avait-elle coutume de dire.
L'administration
des Domaines, qui gérait plus ou moins les bâtiments peu occupés, mettait en
vente le 2 septembre 1807 par adjudication tous les immeubles. Le Préfet de la
Gironde, Fauchet et le Directeur des Domaines présidaient la séance. Il y eut
quelques enchères puis se fut une Demoiselle qui emporta l'adjudication pour la
somme de 23.450 francs: Marie Thérèse-Charlotte de Lamourous.
La
Providence veillait et cette dame célibataire de 52 ans, volontaire et
courageuse, avait une idée qu'elle commençait à réaliser avec des petits
moyens : fonder un ordre religieux destiné à recueillir les filles des rues
voulant changer de vie, les veuves voulant se dévouer à une oeuvre charitable
ou d'autres jeunes filles qui n'avaient pas de raison de "se repentir".
Toutes
étaient volontaires. La Révolution avait mis fin à l'ordre des Madelonettes
qui jouait ce rôle éminemment social : les filles avaient été jetées à la
rue et beaucoup d'autres les avaient rejointes à la suite des troubles, des
guerres du début de l'Empire et de la misère.
Marie
Thérèse Charlotte de Lamourous était une personnalité forte et attachante,
autoritaire certes mais d'une bonne humeur inaltérable, faisant absolument
confiance à la Providence.
Elle
installa ses filles le 5 avril 1808, la veille des Rameaux, et l'argent arriva
plus tard. A ce moment, Bordeaux recevait l'Empereur Napoléon en partance pour
l'Espagne visitait la ville.
Marie
Thérèse, pleine d'audace, alla voir le grand ministre, secrétaire d'Etat,
Maret, duc de Bassano, et lui demanda de l'argent pour son oeuvre utile.
L'Empereur
signa le décret d'une remise de 22.800 livres sur le prix de l'acquisition,
mais elle avait déjà du payer 1/5ème du prix de l'adjudication en acompte et
en frais, somme qu'elle s'était procurée en hypothéquant son domaine du Pian.
Il restait des travaux considérables à faire, à la chapelle et aux bâtiments
dont des toitures étaient crevées.
Pour
avoir des revenus, Marie Thérèse avait eu une autorisation officielle en 1808,
qu'elle dut renouveler en allant à Paris en 1813, pour que les pénitentes
devinrent cigarières. En effet, les troupes fumaient beaucoup, fabriquer les
cigares exigeait une grande dextérité manuelle et ce fut là une bonne
ressource de revenus.
Les
pénitentes faisaient aussi des travaux d'aiguille, couture, broderie, dentelles
même. Tout cela se passait dans la bonne humeur : on chantait et dansait aux récréations.
La lutte contre le chagrin était le gros souci de la fondatrice.
Les
problèmes matériels étant résolus, Marie Thérèse put s'occuper de la
fondation de son Ordre. La fondatrice rédigea une règle originale : les
pensionnaires entraient librement à la Miséricorde et en sortaient de même.
L'institution devait vivre uniquement de son travail.
Le
14 septembre 1836, Mère Marie Thérèse s'éteignit, le jour de l'exaltation de
la Sainte Croix : elle avait 82 ans, mais usée et paralysée par des
rhumatismes, depuis plusieurs années, elle ne pouvait plus quitter sa chambre.
En novembre 1923 ou 24, sa cause fut introduite en cour de Rome et un décret fut publié et consigné dans les actes de la congrégation pour la cause des Saints.
(Décret
sur l'héroïcité des vertus de la Servante de Dieu, Maire Thérèse Charlotte
de Lamourous, donné à Rome le 21 décembre 1989, que l'on peut voir dans l'église
de Barsac).
Marie-Christine Baquet.
Association Art, Vin et Patrimoine.
Réalisée le 17 novembre 2003 | André Cochet |
Mise ur le Web le novembre 2003 |
Christian Flages |