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Recueil      
  des      
    Brochures et écrits 
     

publiés

 
   

depuis 1839 jusqu'à ce jour  (1880.)

   

Henry de Lur-Saluces.

Dates.

Titre. Pages.

13 avril 1869

Circulaire 

244/248.

Adressée aux électeurs de Bazas et de la Réole.

 

Messieurs,

Il y a deux ans environ, le bruit se répandit que votre député allait donner sa démission. 

Mes amis m'écrivirent pour me demander s'ils pouvaient compter sur moi.

Je leur répondis que mon âge d'abord, et aussi l'existence de préjugés vivaces à l'aide desquels depuis plus de vingt cinq ans on m'avait combattu, me faisaient penser qu'ils feraient mieux de choisir dans le pays un homme jeune et indépendant qui parviendrait sans doute à lutter, avec plus d'avantage que moi, contre cette invasion successive de candidats étrangers non seulement aux arrondissements, mais le plus souvent au département lui même, lesquels, depuis un temps infini, étaient envoyés par l'Administration pour prendre possession d'un siège considéré sans doute comme vacant de plein droit.

J'ajoutais que je ne croyais d'ailleurs pas à une élection prochaine, et que le Gouvernement me paraissait devoir conserver la Chambre actuelle jusqu'à l'expiration de son mandat.

Depuis cette lettre, je me suis tenu à l'écart, laissant à toute nouvelle candidature l'occasion de surgir.

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Mais qui donc est assez audacieux pour réclamer vos suffrages, s'il n'est préalablement muni d'un laissez passer de l'Administration ?

Personne, paraît-il !

Et voilà justement ce qui ranime mon ardeur, car, si les électeurs indépendants doivent être vaincus avec moi, au moins aurai-je le droit de dire  que je n'ai pas fait  obstacle à un candidat ou plus habile ou plus heureux.

Mais, pour mon compte, je tiens à protester contre cette persistance de l'Administration à nous imposer des hommes qui avaient déjà parcouru la moitié de leur carrière lorsque le hasard les a dirigés vers nous ; qui ne connaissaient pas plus à fond la Gironde que nous ne connaissons le Finistère ou le Var ; qui n'ont pas vieilli ou ne vieilliront point au milieu de nous, et auxquels nous paraissons seulement destinés a servir de marchepied.

Persistance incompréhensible, alors qu'elle s'étend à tout un département comme celui de la Gironde, qui a assez souvent prouvé qu'il n'avait pas besoin de vivre d'emprunts !!!

Quant à mes opinions, Messieurs, vous les connaissez depuis longtemps.

Le 22 février 1839, j'ai adressé aux électeurs de La Réole une brochure où ces opinions, basées sur l'ensemble des faits qui ont précédé et suivi la Révolution française, sont nettement accentuées.

Je disais :  

Défendre la Charte et rester en dehors des faveurs du pouvoir ; défendre le roi. et ne pas franchir le seuil des Tuilerie ; défendre la liberté et ne pas aider à l'anarchie. Pour moi, simple citoyen, député, si je le suis jamais ; officier dans l'armée. si une guerre sérieuse m'y rappelle, telle sera ma conduite.

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C'était alors de l'indépendance. 

Le 11 mars 1848, au moment où les circulaires de Ledru Rollin effrayaient les timides, je publiais une profession de foi brève et nette, que je signale a mes amis comme à mes adversaires.

Je disais :

« ... Je déplore surtout l'envahissement du palais législatif par la force  armée ; de pareils actes, même lorsqu’ils sont accomplis au nom de la liberté, tracent la voie où la vraie liberté peu périr un jour !…  

 C'était alors de l'indépendance…et aussi on le vit en décembre 1851 de la prévoyance

Le 25 septembre 1852, répondant à l'offre qui m’avait été faite de reprendre le commandement l’artillerie de la garde nationale, à I'occasion du passage du  Prince Président, je refusais en disant aux artilleurs ;  

Mes antécédents politiques ont peu d'importance ; ils sont ignorés ou oubliés par la plupart d'entre vous ; moi seul, à ce sujet, je n'ai pas le droit de manquer de mémoire.

J'ai fait, en 1839, une profession de foi dont je ne me départirai jamais, parce que j'avais réfléchi avant de la faire.

 Attaché, comme bien d'autres en France aux principes de la souveraineté nationale et de la liberté réglée par les lois, je croyais ces principes en sûreté sous l'égide patriotique des princes d’0rléans.

Depuis, une assemblée souveraine ayant proclamé la république, j'ai adhéré sans arrière pensée à cette nouvelle forme de gouvernement.

"…Aujourd'hui, la liberté réglée par les lois a disparu,  etc. »  

C'était encore de l'indépendance.

Le 21 avril 1863, je m'adressais à vous mêmes, Messieurs les Électeurs, et je disais :

" …Depuis 1857, la tribune française à repris une partie de ses droits ; diverses espérances ont été données, et tout dernièrement encore, M. le sénateur administrateur de la Gironde annonçait dans sa proclamation que la liberté devait couronner l'édifice impérial.

C'est à ce couronnement que nous voulons tous assister et applaudir !!!

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Le 20 mai 1863, répondant à une attaque du Journal de Bordeaux, je terminais ainsi :  

Au reste, à moins de nier l'évidence, on ne saurait m'accuser d'être un homme de parti ; j'ajoute même que j'ai l'esprit de parti en aversion, parce qu'il rend injuste, intolérant, aveugle !

Et pourtant, mon voeu le plus ardent serait de voir un parti de plus se mêler à nos luttes.

Sur le drapeau de ce parti, je voudrais voir écrit en gros caractères : honnêteté et probité politiques !

Et s'il ne faut, pour entrer dans ses rangs, pour arborer au besoin son étendard, que de la fermeté d'âme, je m'inscris des premiers !  

 Enfin, dans le moment présent, je  viens de publier dans les journaux. un compte rendu des sessions du Conseil général, vous avez pu lire et vous avez remarqué que ma dernière pensée est celle-ci :

Le cri de tout homme sage doit être : Faisons des réformes, évitons de nouvelles révolutions !

J'affirme donc, Messieurs, que tous ceux d'entre vous qui depuis trente ans se sont occupés de politique peuvent connaître mes opinions comme je les connais, moi même.

Si ces opinions sont les vôtres, je vous prie  de disposer de moi.

Entendez-vous, réunissez-vous ; que vous soyez nombreux, que vous soyez en petit nombre, je me rendrai à chacun de vos appels, pour vous donner de vive voix les éclaircissements que vous pourriez souhaiter.

Heureux d'ailleurs de constater avec vous que l'esprit public n'est pas éteint dans nos contrées, et que les hommes d'ordre les plus portés à respecter les lois sont en même temps ceux qui veulent avec le plus d'ardeur que le Gouvernement accepte le contrôle sérieux des mandataires du pays.

Il est temps, en effet,  que l'école absolutiste moderne apprenne ce que pensent d'elle tous les esprits éclairés, tous les cœurs généreux !

On ne s'imagine point assez à quel degré est étrange cette théorie nouvelle, soutenue cependant par des écrivains qui se disent les amis du Gouvernement.

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Pour en donner  une preuve entre mille, je ne crois pas inutile de citer une anecdote qui remonte à une époque de  beaucoup antérieure à celle de la Révolution.

Des courtisans, s'entretenant devant Louis XIV du pouvoir des sultans, disaient : qu'ils disposaient au gré de leur caprice de la vie et des biens de leurs sujets.

Voilà, dit le prince, ce qui s'appelle régner.

Oui, Sire, répliqua le vieux maréchal d'Estrées, mais en régnant ainsi, trois empereurs ont été étranglés de mon temps !

 Tel était le langage que l'on pouvait tenir à un des princes les plus absolus du temps passé et dont le despotisme a terni la gloire.

N’est-ce pas une preuve convaincante que la terre de France n'est nullement propre à faire fleurir ce vilain arbre que l'on appelle le pouvoir absolu, puisque à l'époque dont je parle il était déjà jugé comme il méritait et comme il méritera toujours de l’être !

Espérons donc, Messieurs, que le Gouvernement qui, en entrant dans la voie libérale, a rompu avec ces théoriciens insensés, sera secondé par le corps électoral, qui lui enverra des députés sincèrement libéraux et complètement indépendants !

  

 

 

Table des matières.

Réalisée le 10 septembre  2005  André Cochet
Mise sur le Web le  septembre  2005

Christian Flages