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Recueil | ||||
des | ||||
Brochures et écrits | ||||
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depuis 1839 jusqu'à ce jour (1880.) |
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Henry de Lur-Saluces. |
Dates. |
Titre. | Pages. | |
19 février 1876 |
Circulaire |
311/313 |
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adressée aux électeurs de la 4ème circonscription de Bordeaux. |
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Messieurs, On
vient de vous adresser un écrit tellement singulier quant au fond et
quant à la forme, que je ne doute pas qu'il ne produise sur vous un
effet tout contraire à celui que l'on a voulu atteindre. Les
nouvelles couches sociales sont beaucoup plus intelligentes que
certaines personnes ne paraissent le croire ; elles, ont au plus haut
degré l'instinct des convenances, et les mauvaises paroles ne sauraient
leur plaire longtemps. Aussi,
n'est-ce point sans à propos que M. Gambetta a dit que là République
française serait athénienne. Dans
ce cas, il est positif que pour qu'elle le soit tout à fait, il est
indispensable que certaines gens veuillent bien continuer à la traiter
en ennemie et à rester dehors. Quant
au reproche qui m'est encore adressé de ne pas marcher sur la trace de
mes pères, j'y réponds sans le moindre embarras, car tout au
contraire, j'ai la prétention de n'avoir jamais dévié. Je ne puis, en effet, douter que lorsqu'ils servaient le roi, c'est bien la France qu'ils entendaient servir.
Or,
la France et le roi légitime ont selon ma conviction raisonnée, rompu
sans appel en 1830. Dès
lors, il s'est agi de choisir entre la France et le roi. C'est
pour la France que j'ai opté. Pendant
un siècle, les partisans des Stuarts ont agité la nation anglaise.
Qu'est-il résulté de ces luttes stériles, si ce n'est des difficultés
grandes qui ont retardé l'établissement du gouvernement dont
l'Angleterre jouit aujourd'hui. Donc,
je soutiens que lorsqu'on appartient à une famille chez laquelle le dévouement
au pays est une tradition sacrée, on est fidèle à cette tradition en
travaillant, dans la mesure de ses forces, à donner à ce pays un
gouvernement régulier. Et
je soutiens encore que ceux qui, depuis quarante six ans, cherchent à
ressusciter les morts, tombent dans une erreur nuisible à la patrie ;
et, enfin, j'ajoute que j'ai trop réfléchi sur ces questions pour que
des arguments grotesques puissent m'impressionner beaucoup et me faire
changer d'avis. Sans
doute j'ai été le partisan du gouvernement de Louis-Philippe, je ne le
nie point, je m'en vante au contraire, car ce fut un des gouvernements
les plus honnêtes qui aient jamais présidé aux destinées d'une
grande nation. Mais
quand on a adopté le régime électif, les évènements vous conduisent
d'eux-mêmes et avec le temps à la République. Telle
fut notre histoire. Je ne suis pas seul à reconnaître cette vérité,
puisque MM. Thiers, Dufaure, Montalivet, Casimir Périer, Duchâtel,
Salvandy, etc., etc., ministres ou fils de ministres de Louis-Philippe,
se sont franchement ralliés à ce mode de gouvernement. Espérons
que nous allons lui devoir bientôt d'être placés à l'abri des
ministres à poigne, des préfets à poigne et, par dessus le marché,
des écrivains à poigne, qui, si on ne les décourageait pas,
transplanteraient dans notre pays policé les usages et les procédés
de l'Angleterre et de l'Amérique, ce qui serait tout l'opposé de
l'urbanité française.
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Réalisée le 10 septembre 2005 André Cochet Mise sur le Web le septembre 2005 Christian Flages