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Recueil | ||||
des | ||||
Brochures et écrits | ||||
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depuis 1839 jusqu'à ce jour (1880.) |
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Henry de Lur-Saluces. |
Dates. |
Titre. | Pages. | |||
1er octobre 1871 |
Circulaire |
258/261 |
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aux électeurs du département de la Gironde. |
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(canton de Podensac.) |
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Messieurs
les Electeurs, Je
vous ai adressé de nombreuses circulaires ; j'ai publié à plusieurs
reprises mes opinions, et je puis affirmer que ceux d'entre vous qui ont
pris la peine de lire mes écrits savent ce que je pense. Une
lettre du 17 mars 1848, insérée dans les journaux de Bordeaux, dans
des circonstances qui avaient de grands rapports avec la situation présente,
pourrait suffire, si je la reproduisais, pour vous faire connaître
quelle est mon opinion dans ce moment. Toutefois,
si les circonstances ont de nombreux points de similitude, comme elles
ont aussi leurs dissemblances, je crois devoir à nouveau résumer mon
opinion et les raisons sur lesquelles je m'appuie. Je
crois que les libéraux ont eu tort, en 1848, de ne pas seconder par un
concours sincère l'essai du gouvernement républicain, alors que ce
gouvernement était entre les mains de Cavaignac, Tocqueville, Dufaure,
Lamoricière, Carnot, Jules Favre, etc. ; et je pense qu'ils auraient
encore bien plus tort aujourd'hui s'ils retombaient dans la même faute.
On entend dire de tous côtés : La République est impossible.
C'est
bientôt dit. Mais alors, qui donc est possible ? Si
l'on entend par là que les vertus républicaines nous manquent, hélas !
on à cent fois raison ... Mais
avons-nous, par contre ; les aptitudes monarchiques ? Non,
mille fois non, puisque tout au contraire et à quelque degré de l'échelle
sociale qu'on s'adresse, où trouve l'horreur de la hiérarchie. On
a défini la royauté moderne en disant : République à la base, chef héréditaire
au sommet. Mais
nous l'avons essayée, cette monarchie, et dans des conditions
exceptionnellement favorables, puisque Louis Philippe était un des
princes les plus éclairés de l’Europe, conciliant, ferme, éloquent,
expérimenté, ayant des fils qui avaient fait leurs preuves de bonne
heure et dont un homme d’État célèbre avait pu dire avec vérité: « Voilà des jeunes gens comme on n'en voit guère, et
des princes comme on n'en voit pas. » Eh
bien ! Cette monarchie si bien secondée par ceux qui étaient à
sa tête n'a pu durer. De
plus, elle a entraîné dans sa chute le dernier des étais
monarchiques, le cens électoral ; avec cette particularité que les
ennemis les plus acharnés de ce reste de hiérarchie furent ceux qui se
disaient et qui étaient les partisans zélés du principe monarchique. Ne
récriminons pas ; ne tombons pas dans ce travers si commun, d'attribuer
à telle coterie ou à telle autre, à tel homme d'État, depuis
Richelieu jusqu’à M. Thiers, ou à tel autre, une situation qui est
le résultat du travail des siècles et des tendances si diverses de
l'esprit humain. Essayons de voir clairement ce qui est, et tâchons d’arriver à fonder un gouvernement honnête.
Constatons
d'abord l'extrême mobilité de l'esprit public et comme contraste à
cette mobilité, la persistance invariable d'un autre esprit de
taquinerie, de raillerie, d'opposition et de révolte, s'attaquant à
tout pouvoir dès qu'il dure un peu. Si
bien que lorsque nous aurons donné à cette maladie tout particulièrement
française une issue qui ne sera pas une révolution, nous aurons fait
un grand pas vers la paix publique. Il
faut donc que les gens sensés, qui sont après tout en immense majorité
en France, et qui, eux, sont gouvernables, puissent dire aux opposants
de profession : Vous n'approuvez pas M. le Président de la République !
Eh bien ! dans quatre ans, vous en nommerez un autre, et nous
souhaitons que vous soyez enfin satisfaits. Voilà,
si je ne me trompe, ce que nous conseillent la raison et l'expérience.
Dans tous les cas, ce qui est certain, et certain à l'égal d'une vérité
géométrique, le voici : Ou nous parviendrons à nous gouverner nous-mêmes
avec et par la liberté, ou nous serons forcés de nous soumettre à une
nouvelle dictature. Conclusion
désastreuse, humiliante, quel que soit le dictateur. En
présence d'une pareille alternative, il me semble qu'on ne saurait hésiter.
Les
élections qui se préparent ont revêtu un caractère presque
exclusivement politique, et c'est pour cela que j'ai cru devoir
commencer par aborder ces graves questions. La
loi d'ailleurs n'interdisant pas aux électeurs de se guider dans leurs
choix par des considérations de ce genre, les candidats ont dû les
suivre sur ce terrain. De là la nécessité d'explications complètes, car, pour mon compte, je n’admets point les opinions vagues sans conclusion pratique.
Ceci
dit, j'ajoute que les Conseils généraux étant des assemblées
administratives, les intérêts du département, comme ceux de l'Etat,
seraient en souffrance, si, délaissant leurs attributions vraies, ces
assemblées tentaient d'envahir le domaine politique Je
termine, Messieurs les Electeurs, en arrivant à vous parler des
questions qui, en temps ordinaire, auraient seules dû nous occuper. Je
vous ai adressé, à la suite de la session de 1869, un rapport détaillé
dans lequel je vous rendais compte de mes votes et des propositions que
j'avais faites. Je
me bornerai, aujourd'hui, , à constater les résultats utiles obtenus
dans le canton depuis plusieurs années. 1°
la Perception de Podensac, considérablement agrandie quant à son
importance ; 2°
le Bureau d'enregistrement, transporté au chef lieu ; 3°
des foires supplémentaires accordées ; 4°
le Bureau de poste de Barsac ; 5°
le Bureau de poste de Landiras ; 6°
onze chemins d'intérêt commun classés, malgré des difficultés très
nombreuses ; 7°
le pont de Jean Dubos ; 8°
le port de Barsac ; 9°
le pont de La Salle. Je me suis occupé de ces diverses affaires et de plusieurs
autres qu'il serait trop long d'énumérer, avec un zèle qui n'était
après tout que l'accomplissement de mon devoir ; toutefois, je crois
pouvoir ajouter que, si je n'avais mis à poursuivre l'exécution des
importants travaux du port de Barsac et du pont de La Salle une
persistance ou mieux une ténacité toute particulière, ces travaux
seraient encore à exécuter. Si
vous croyez, Messieurs les Électeurs, que je puisse encore être utile,
vous pouvez compter sur ma bonne volonté.
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Réalisée le 10 septembre 2005 André Cochet Mise sur le Web le septembre 2005 Christian Flages