Faits mémorables |
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de l'histoire de |
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France. |
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L. Michelant. |
Souverain : Charles VIII. |
Année : 1495 |
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Bataille de Fornoue. |
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Si
les résultats politiques des guerres d'Italie ne répondirent pas aux espérances
des princes qui les ont entreprises et leur ont consacré toutes les
richesses pendant plus d'un demi-siècle, et tout le sang de la France,
l'influence considérable que ces grandes expéditions ont exercée sur la
politique générale de l'Europe, sur la littérature et les beaux-arts en
France, leur donne une place importante dans l'histoire. Les
champs de bataille de l'Italie deviennent tour à tour les brillants théâtres
de l'ambition des plus puissants souverains : c'est là que se rencontrent
François 1er et Charles Quint ; c'est aussi à Fornoue, à
Agnadel, à Ravenne, à Marignan, à Cérisoles et encore à Pavie, que
combattent les plus illustres généraux de cette époque. La
royauté, qui jusqu'ici avait borné son action à se défendre contre les
invasions étrangères et les révoltes féodales, enfin sûre d'elle-même,
tente des guerres extérieures ; elle porte au loin son drapeau et se fait
suivre de tous ces fiers seigneurs dont elle a conquis l'obéissance. Mais
à la France, les guerres d'Italie ne valent pas seulement des alliances
nouvelles, quelque gloire et des conquêtes éphémères ; l'esprit national
reçoit de ces courses militaires au delà des Alpes de profondes
impressions ; nos armées, en revenant de Naples, de Rome, de Florence. vont
rapporter des idées et des désirs jusqu'alors ignorés ; le merveilleux
spectacle qu'offre l'Italie, où les arts, les lettres et les sciences
brillent du plus vif éclat, saisit d'enthousiasme les ardentes
imaginations. La
France se forme à cette noble école où, pour maîtres, elle trouve Michel
Ange, Raphaël, Tasse, et tous ces érudits échappés au sac de
Constantinople, qui avaient apporté à l'Italie pour prix de son hospitalité
les précieux restes des chefs d'oeuvre de l'antiquité. A
cette époque commence le seizième siècle , le siècle de la renaissance,
durant lequel se transforme complètement la société française. Charles
VIII, et après lui Louis XII et François 1er , ne prévoyaient
pas ces sérieuses conséquences de leurs expéditions ; ils ne songèrent
qu'au but de leur ambition, à la conquête du royaume de Naples et du
Milanais, sur lesquels ils firent valoir des droits incertains dont la
politique prudente de Louis XI ne s'était jamais préoccupée. Charles
VIII surtout, d'un esprit faible, d'une constitution débile, n'avait guère
de vues précises, de plans arrêtés ; il se laissait entraîner aux séductions
d'exploits héroïques dans cette contrée renommée par sa richesse, son élégance
et son luxe. Nourri
de lectures romanesques, il rêvait la gloire des conquérants et prétendait
égaler Alexandre et Charlemagne. Aussi,
quand on le vint engager à faire valoir sur la couronne de Naples les
droits que le comte du Maine, le neveu du roi René, avait légués à Louis
XI, le roi de France accueillit avec ardeur ce projet périlleux, dont ses
plus sages conseillers essayèrent de le détourner. Rien
ne put arrêter le jeune souverain, au milieu des fêtes et des tournois il
se prépara à passer en Italie ; et, malgré sa légèreté, ses
imprudences, son dessein s'accomplit avec une admirable facilité et un succès
inouï : ce que les plus habiles n'obtiennent qu'à force de prudence, de prévoyance,
encore lorsque la fortune leur veut être favorable, Charles VIII y réussit
pour ainsi dire en se jouant "si bien que faut conclure, dit Commines, que ce voyage fut conduit de Dieu tant à l'aller qu'au retourner." Le
roi de France entra en Italie au mois de septembre 1494, suivi d'une armée
considérable, remplie d'ardeur et vaillamment équipée. Il
avait une artillerie formidable pour cette époque ; sa maison militaire
seule se composait de douze cents gentilshommes, et, avec les nombreux
volontaires de la noblesse, la suite immense des valets de bagages, Charles
VIII comptait autour de lui plus de soixante mille hommes. Avec
une rapidité que secondaient les divisions des différents états italiens,
l'heureux et jeune souverain successivement entra en triomphe à Florence,
à Pise, à Rome et enfin à Naples, sans qu'il eût presque à combattre. Lorsque
le pape, effrayé de la marche victorieuse des Français, se fut retiré au
château Saint Ange et leur eut permis l'entrée de Rome, Charles y pénétra
avec des transports de joie le 31 décembre 1494 ; il fit, la nuit, à la
lueur des flambeaux, son entrée dans la ville éternelle "en
bel et furieux ordre de bataille, trompettes sonnantes et tambour
battant," se
croyant déjà égal aux héros de l'antiquité par l'admiration et la
terreur que ses armes Inspiraient à l'Italie. Le
roi de Naples, Ferdinand II, essaya vainement de se défendre, il fut
abandonné par ses condottieri, qui passèrent sous les drapeaux français,
et forcé de se réfugier à Ischia. A
Naples, Charles VIII voulut renouveler les magnificences de son triomphe de
Rome ; pour lui cette conquête de l'Italie était bien moins une affaire
politique qu'une occasion de fêtes et de plaisirs. Les
Napolitains accueillirent avec enthousiasme l'armée française et son chef
; Charles fut salué comme un libérateur et comme un légitime souverain
rendu à l'amour de ses sujets : "Jamais
peuple ne montra tant d'affection à roi, ni à nation," dit
encore Commines, qui accompagna le roi dans son expédition. On
était maître du royaume de Naples ; mais pour conserver cette brillante
conquête, il eût fallu autant de sagesse qu'on avait eu jusqu'alors de
bonheur : et Charles, enivré de ses succès, ne songeait plus qu'aux joies
du triomphe. Tandis
que l'Italie, réunie par le commun péril, formait une ligue menaçante
contre son vainqueur, le roi de France mécontentait les seigneurs aragonais
et angevins qui lui avaient ouvert les portes de Naples. Il
ne se défiait de personne, donnait des tournois, se faisait couronner roi
de Jérusalem, et jouait pour ainsi dire avec sa fortune au moment où elle
allait l'abandonner. Cependant
l'union italienne s'était formée, et un jour Charles dut songer à
traverser de nouveau l'Italie pour regagner la France ; mais cette fois il
n'avait plus d'alliés, de toutes parts on armait contre lui, on se
disposait à lui fermer le chemin de son royaume. L'armée
italienne, concentrée dans les défilés des Alpes près de Fornoue, était
forte de quarante mille hommes, lorsque Charles VIII se présenta pour
franchir ces passes difficiles. Obligé,
de laisser des garnisons dans les forteresses qu'il avait occupées, une armée
pour conserver Naples, le roi de France n'avait guère avec lui que neuf
mille hommes. D'abord
il négocia pour qu'on lui livrât le passage ; mais, après quelques conférences,
les confédérés italiens, se croyant certains de vaincre les. Français,
rompirent toutes négociations, et des deux côtés on se prépara à
combattre. Les
Français ni leur chef ne furent découragés en face de cette nombreuse armée,
à laquelle il fallait disputer la route de la patrie. Le
péril au contraire avait exalté tous les courages, les soldats étaient
pleins de confiance et d'enthousiasme ; le roi, s'animant par le sentiment même
de sa situation, se montra supérieur à lui-même : "Le
petit roi, raconte Commines, n'étoit plus reconnoissable, tant il étoit
grand, ferme, audacieux. Je
vins à lui, et le trouvai armé de toutes pièces et monté sur le plus
beau cheval que j'aie vu de mon temps : et sembloit que ce jeune homme fût
tout autre que sa nature ne portoit, ni sa taille, ni sa complexion ; et ce
cheval le montroit grand, et avoit le visage bon et la parole audacieuse et
sage." Le lundi 6 juillet 1495 la bataille s'engagea par l'artillerie, et bientôt les deux armées furent aux prises ; la mêlée ne dura pas une heure : l'ennemi enfoncé par la furie française , taillé en pièces, poursuivi jusqu'à son camp, s'enfuit en désordre, laissant plus de trois mille homme, morts sur le champ de bataille ; deux cents Français seulement avaient été tués, et encore étaient-ce la plupart des valets de bagages. Le
roi combattit avec courage à la tête de sa noblesse ; deux fois il fut en
danger d'être pris, on mit même un moment la main sur la bride de son
cheval pour l'entraîner. Enfin,
après avoir vaillamment risqué sa personne, après avoir soutenu presque
seul, dans un instant où il était séparé des siens, l'attaque d'une
compagnie de gendarmes, après s'être aventuré à la poursuite de
l'ennemi, il ramena ses troupes en France, parées dans leur retraite d'une
gloire qui maintenait leur réputation en Italie. La
victoire de Fornoue pouvait rendre au roi de France la possession de
l'Italie ; mais Charles avait hâte de rentrer dans son royaume. Son
imagination, qui seule l'avait poussé au delà des Alpes, était satisfaite
et il ne désirait plus que le repos et les plaisirs. La première expédition d'Italie était accompli, le fils de Louis XI ne devait plus revoir Naples ; mais la voie était ouverte, et après lui les Français, conduits par Louis XII et François 1er , allaient souvent encore porter au delà des Alpes la renommée de la France, et en ramener toutes les magnificences qui donnèrent tant d'éclat au seizième siècle. |
Table chronologique des faits mémorables.....
Réalisée le 20 novembre2005
André Cochet
Mise sur le Web lenovembre2005
Christian Flages