Faits mémorables |
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de l'histoire de |
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France. |
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L. Michelant. |
Souverain : Henri IV. |
Année : 1594 |
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Entrée de Henri IV à Paris. |
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Vainqueur
à Coutras, à Arques, à Ivry, Henri IV avait cependant compris qu'il ne réussirait
pas à soumettre la France par la seule force des armes ; les dissidences
religieuses qui le séparaient de ses sujets formaient un obstacle
insurmontable, et, quoi qu'il lui en coûtât de renoncer aux croyances dans
lesquelles il avait été élevé et que partageaient ses plus fidèles
compagnons, il dut se décider à une abjuration pour monter sur un trône
qui lui appartenait d'après toutes les traditions de la monarchie. Cette
extrémité était pénible, mais, c'était l'unique moyen d'enlever à la
Ligue toute sa force avec le prétexte de son opposition. Après
avoir consulté, ses amis, triomphé des répugnances de la plupart d'entre
eux, le roi, fortifié d'ailleurs par les sages conseils de Sully, résolut
de demander son appui à la foi catholique. Des
conférences religieuses furent ouvertes à Suresnes et à Mantes, et le 25
juillet 1593 Henri IV se présentait à la porte de l'église de Saint Denis
pour abjurer le protestantisme. Il
fut reçu à l'entrée de la vieille basilique par l'archevêque de Bourges,
Bernard de Semblançay. Qui êtes vous ? dit le prélat. Le roi. Que demandez-vous ? Je demande à être reçu au giron de l'Eglise. Le
voulez-vous ? Oui, Je le veux et je le désire. Après
cette première cérémonie le roi de France pénétra dans l'église,
prononça la formule de l'abjuration et entendit la messe. Le
chef de la maison de Bourbon, roi de France déjà par son courage et la supériorité
de son intelligence, l'était maintenant par la communauté des sentiments
religieux. La
foule, qui, malgré les défenses des plus fougueux ligueurs, s'était
rendue de Paris à Saint Denis pour assister à cette grande solennité,
salua le roi de ses acclamations comme le véritable chef de la France. Que
ses convictions aient été ébranlées par la controverse religieuse, qu'il
se résignât par dévouement politique, ou qu'il fût réellement entraîné
par les inspirations de la foi, la conversion de Henri IV fut un acte d'une
haute sagesse et d'une grande importance politique. Il
rendait au catholicisme, à la religion nationale un éclatant hommage ; il
allait pouvoir calmer les misères du pays, et il assurait tout à la fois
l'avenir de la France et celui de sa dynastie. Au
mois de février 1594, après avoir fait connaître sa conversion à la
France et envoyé une ambassade à Rome pour obtenir son absolution, Henri
IV fut sacré dans la cathédrale de Chartres, et son autorité reçut de la
religion une nouvelle consécration. Dès
lors tout devint facile pour arriver à un accommodement avec les Parisiens
; ils étaient fatigués de leur misérable situation aussi bien que des
sacrifices qu'ils faisaient au profit du roi d'Espagne, et commençaient à
apercevoir les intrigues et les folles ambitions qui se couvraient du voile
de la religion. Sans
Henri IV la lutte pouvait se prolonger, la royauté passer dans les mains
des étrangers, l'intégrité du royaume était même menacée ; au
contraire, en montant sur le trône, le héros d'Ivry, le glorieux Béarnais
rendait au royaume son unité et son indépendance ; au dedans le pouvoir
reprenait sa force, le calme renaissait ; à l'extérieur, l'Espagne perdait
le fruit des discordes qu'elle avait excitées, on s'affranchissait enfin de
l'influence étrangère. Ces
puissantes considérations ébranlèrent la constance des Parisiens ; le roi
put traiter avec eux, et il obtint de M. de Brissac, alors gouverneur de la
ville au nom de la Ligue, qu'il lui livrerait une porte et recevrait les
troupes royalistes. Les
Espagnols qui formaient alors la garnison de Paris eurent des soupçons : le
duc de Féria, leur chef, avait donné l'ordre de tuer Brissac à la moindre
démarche suspecte ; mais celui-ci sut habilement tromper leurs méfiances,
et le 22 mars 1594, à sept heures du matin, Henri IV, à la tête de ses
troupes, entrait dans Paris par la porte Saint Honoré, celle-là même par
laquelle, six ans auparavant, le dernier roi de France, Henri III, avait fui
ses sujets révoltés, Le
roi, en pénétrant dans Paris, avait recommandé à ses soldats la
discipline la plus sévère ; en même temps il faisait répandre une
proclamation datée de Senlis, dans laquelle il promettait pardon et oubli
à tous les Parisiens, sans excepter même de cette amnistie les chefs les
plus acharnés de l'union catholique. Tandis
qu'Henri IV avançait lentement, le peuple se pressait sur ses pas pour voir
le nouveau monarque, et faisait retentir l'air des cris de Vive le roi !
Arrivé, à l'église Notre Dame, où il venait remercier Dieu du succès de
ses armes, Henri IV mit pied à terre ; mais les Parisiens l'entouraient si
étroitement qu'à peine pouvait-il marcher. Ses
gardes voulurent alors le dégager : "Laissez-les
approcher, leur dit il, car ils sont affamés de voir un roi." En
sortant de Notre Dame, le roi retrouva autour de lui une semblable affluence
: l'église, le parvis, les rues qu'il traversait étaient remplis d'une
foule qui contemplait avec une sorte d'avidité ce prince dont la valeur
avait gagné son royaume pied à pied, victoire par victoire, et dont
l'humanité avait épargné aux Parisiens les horreurs de la famine au prix
de ses plus chers intérêts. De
toutes parts éclataient les joyeuses acclamations chacun partageait la
satisfaction du vainqueur, et ce semblait être pour tous un jour de fête
et de triomphe. Cependant
la nouvelle de l'entrée du roi s'était répandue, les Espagnols avaient
essayé de résister aux royalistes ; mais leurs efforts furent inutiles, et
ils durent accepter avec reconnaissance la capitulation que le roi leur
offrit : le jour même où il prit possession de sa capitale, les troupes étrangères,
conduites par le duc de Féria, sortaient de Paris par la porte Saint Denis.
Henri
IV voulut être témoin de leur départ, et, en leur rendant le salut
qu'elles lui adressaient en passant : "Allez
; leur dit-il en souriant, recommandez-moi bien à votre maître, mais n'y
revenez plus." Si
les Parisiens étaient heureux de la présence du roi, Henri lui-même ne
pouvait contenir la joie, l'agitation que lui faisait éprouver cette belle
journée où pour la première fois il se trouvait libre et tranquille au
milieu de ses sujets. Il
accueillait avec bienveillance tous ceux qui l'approchaient ; son bonheur éclatait
en vives saillies, en paroles indulgentes, en sincères remerciements : son
trouble, son émotion se trahissaient dans chaque geste, dans chaque mot. "Je suis si enivré d'aise, disait il, de me voir où je suis, que je ne sais ni ce qu'on me dit ni ce que je dis : il n y a rien de l'homme en ceci ; c'est l'oeuvre de Dieu." Par
ses ordres, des hérauts accompagnés du prévôt de Paris, qui l'avait reçu
à son arrivée, parcouraient la ville afin de rassurer les habitants et de
leur annoncer la paix et le pardon que le roi apportait avec lui. A
ces loyales promesses, le peuple répondait en criant : Vive le roi, la paix
et la liberté ! Pendant
qu'il regagnait le Louvre après avoir prié à Notre Daine, Henri IV eut
occasion de montrer de quels sentiments il était animé a l'égard de ses
ennemis. Passant
sur le marché des Innocents, il s'y arrêta un instant avec ses troupes ;
alors un homme, paraissant à une fenêtre, le regarda longtemps avec un mépris
haineux sans même se découvrir devant lui : enfin, voyant qu'on commençait
à murmurer, il se retira ; les spectateurs de cette scène insultante
voulaient aller punir cette insolence, mais le roi défendit expressément
qu'on cherchât cet homme et qu'on lui fît aucun mal. Il
fit disparaître tout ce qui pouvait rappeler les temps de troubles et de
fanatisme : on enleva des églises les tableaux où la Ligue avait retracé
les tristes épisodes de sa domination, on supprima les libelles, les
pamphlets, les mémoires où elle avait déposé ses injures et son fiel ;
mais on respecta scrupuleusement les personnes. On
permit aux chefs les plus ardents de l'union catholique de se retirer avec
l'armée du roi d'Espagne ; ceux qui sollicitèrent leur pardon l'obtinrent
aisément. Enfin
l'ordre, la tranquillité et l'abondance revinrent dans Paris, qui vit succéder
à l'existence tumultueuse et agitée des temps de l'union un gouvernement
ferme, éclairé, et régulier. D'ailleurs
le caractère du Béarnais plaisait aux Parisiens ; ils aimaient ses façons
entraînantes, son abandon, ses piquantes reparties, et jusqu'à ses
brusqueries. Léger,
souvent même ingrat, il faut le dire, avec les amis dont il était sûr,
Henri savait, d'un mot, d'un mouvement généreux, rallier à lui ses plus
obstinés ennemis, et les Parisiens ne purent résister longtemps à ces
entraînantes manières, à ces traits spontanés, à cette bonhomie
spirituelle et simple, à cette familiarité de joyeuse humeur que le Béarnais
mettait volontiers au service de sa cause. Toutefois, maître de Paris, il fallut que Henri IV combattît encore avant de commander à, la France, et ce n'est qu'à force d'habileté, de courage et de séductions qu'il rattacha définitivement à sa couronne et à sa famille les provinces livrées si longtemps à l'indépendance et à l'isolement par les agitations des guerres civiles. |
Table chronologique des faits mémorables.....
Réalisée le 20 novembre2005
André Cochet
Mise sur le Web lenovembre2005
Christian Flages