Faits mémorables |
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de l'histoire de |
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France. |
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L. Michelant. |
Souverain : Clotaire II |
Année : 613 |
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Mort de Brunehaut.
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La mort de
Brunehaut fut le tragique dénouement d'une des plus intéressantes luttes
des temps mérovingiens :
celle de l'esprit de civilisation contre la barbarie ; du pouvoir royal
contre la fière indépendance des chefs austrasiens. Brunehaut,
fille d'Athanagild roi des Wisigoths, fut mariée dans tout l'éclat de sa
jeunesse et de sa beauté au roi d'Austrasie Sigebert, petit-fils de
Clovis. La jeune reine
en arrivant en Austrasie y apporta les idées d'administration et d'unité
de pouvoir sur lesquelles s'était formé l'empire des Wisigoths ; elle ne
trouvait pas de plus belle
organisation que celle de cette grande autorité romaine, dont toutes les
parties étaient si régulières, où le calme naissait de l'action
respectée de la loi. Dès que son
mariage l'eut associée au gouvernement de l'Austrasie, elle prétendit régner
souverainement, faire respecter les lois, y soumettre les grands et les
punir sans considération de leur rang. La royauté
neustrienne, qui avait réussi à faire
prévaloir les traditions romaines dans l'ouest, encourageait les
efforts de Brunehaut ; elle se voua dès lors à cette tâche difficile,
et, bien que ses débats avec Frédégonde aient plutôt donné une longue
popularité à son nom, c'est dans le gouvernement intérieur de
l'Austrasie que cette grande individualité de la première époque de
notre histoire apparaît dans toute sa force. Ses tentatives
de réforme échouèrent contre les libres habitudes des Austrasiens ;
moins mêlés que les Neustriens à la population gallo-romaine, rajeunis constamment pour ainsi dire par le contact des
Germains, ils résistèrent
à tous les souvenirs du vieil empire, ils rejetèrent violemment la
civilisation qu'on prétendait leur imposer : Brunehaut succomba
à la fin, mais on n'en doit pas moins admirer l'étonnante énergie
de ce caractère qui durant cinquante ans, et parfois avec succès, lutta
contre l'opposition puissante des Austrasiens. Elle réussit
d'abord dans ses desseins ; sa grâce, la supériorité de son esprit lui
acquirent sur son époux une influence considérable. "La jeune
vierge, dit Grégoire de Tours, avait de la noblesse dans ses actions ;
elle était belle à voir, ses manières respiraient la politesse et la grâce
; elle était bonne pour le conseil, et ses discours charmaient." Sigebert se
laissa surprendre par tant de séductions la belle et noble fille du midi
domina le barbare ; les lois austrasiennes furent réformées, et la peine
de mort substituée â l'expiation pécuniaire. Pendant neuf
années, tant que Sigebert exista, l'Austrasie quoiqu'avec impatience
subit ces réformes ; mais à la mort de celui-ci commença pour Brunehaut
une lutte remplie de périls et de vicissitudes, les haines longtemps
contenues éclatèrent avec véhémence. Dès que
Sigebert fut tombé sous les coups de Frédégonde, les Austrasiens refusèrent de
combattre pour l'étrangère ; ils l'abandonnèrent en face de Chilpéric,
dont Sigebert avait envahi les possessions. Brunehaut préféra
encore le ressentiment de celui-ci à la haine de ses leudes ; elle
demeura à Paris, d'où le roi de Neustrie, n'osant la faire périr,
l'envoya prisonnière à Rouen tandis que les Austrasiens, enlevant son
fils Childebert, à peine âgé de cinq ans, le ramenaient à Metz. Lorsqu'après
son mariage avec Mérovée, fils de Chilpéric, Brunehaut s'échappa de la
tour de Rouen et revint en Austrasie, elle y trouva les leudes maîtres
absolus sous un roi enfant ; elle essaya cependant de ressaisir l'autorité
: un parti puissant se forma en sa faveur, mais il fut vaincu ; et comme
au moment du combat elle voulait intervenir pour sauver Lupus, duc de
Champagne, les grands qu'elle avait espéré soumettre la repoussèrent
avec dédain : "Retire-toi,
ô femme dirent-ils à la reine, si tu ne veux être foulée aux pieds de
nos chevaux ; qu'il te suffise d'avoir gouverné le royaume sous
ton mari maintenant c'est ton fils qui règne et son royaume est sous
notre protection." A la
majorité de Childebert, ou pour mieux dire dès qu'il put porter une épée
et commander par lui-même, l'influence de Brunehaut reprit son ascendant.
Une
conspiration des leudes contre Childebert fut déjouée, les chefs
principaux en furent mis à mort, et le roi d'Austrasie reprit une autorité
absolue. Ce fut la période
la plus heureuse du gouvernement de Brunehaut ; elle se vit si bien
affermie qu'à la mort de son fils elle resta, sous le nom de ses
petits-fils, seule maîtresse du pouvoir en Austrasie. Elle était
alors respectée des papes, des empereurs, des rois barbares, obéie des
grands ; elle protégeait les arts, construisait des monastères, réformait
les mœurs du clergé et correspondait avec le pape Grégoire le Grand,
qui, au sujet de la conversion des Anglo-Saxons, à laquelle elle avait
pris part, lui écrivait : "L'autorité
doit être basée sur la justice : vous tenez inviolablement à cette règle,
on le voit â la manière digne déloges avec laquelle vous gouvernez tant
de peuples divers. Votre zèle est ardent, vos oeuvres précieuses. votre
âme affermie dans la crainte de Dieu. " Autour de
Brunehaut. en même temps que les lois s'exécutaient, les monuments s'élevaient,
les routes se traçaient à l'imitation des grandes voies romaines ; elle
apportait à ces travaux une telle ardeur que, "
de mon temps, écrit Aimoin deux siècles plus tard, on montre encore une
foule d'édifices que Brunehaut à construits
: ils existent en si grand nombre et dans toutes les parties de la
France que l'on a peine à croire qu'ils soient l'ouvrage d'une même
femme. " Aujourd'hui même,
en Bourgogne, en Lorraine, en Flandre, on rencontre les restes de
plusieurs chaussées, de quelques édifices que les habitants nomment : levées
de Brunehaut, chemins de la Reine, tour de Brunehaut. Le souvenir de
la reine d'Austrasie, qui gouverna, on peut le dire, pour assurer les
droits des faibles autant que ceux de la royauté, s'est conservé
traditionnellement dans le peuple. Ce furent les
dernières prospérités de la vie de Brunehaut chassée d'Austrasie par
Théodebert, son petit-fils, elle est obligée de se réfugier auprès du
second fils de Childebert, Théodoric, roi de Bourgogne ; elle l'arme
contre son frère. Le roi
d'Austrasie vaincu à deux grandes batailles, à Toul et à Tolbiac, est
tué avec ses enfants par le conseil de son aïeule. Brunehaut
semble de nouveau triompher ; mais au milieu de ses succès Théodoric
meurt lui-même, laissant quatre fils encore enfants à la tutelle de la
vieille reine. Celle-ci se disposait à s'emparer de l'Austrasie et de la
Bourgogne et à rétablir, selon l'ambition de sa vie entière, un vaste
empire sur le modèle de Rome , quand les leudes d'Austrasie crurent arrivée
l'occasion d'en finir avec leur implacable adversaire. Une ligue se
forme : et Brunehaut qui marchait avec une armée de Bourguignons et d'Austrasiens
contre Clotaire II, roi de Neustrie lui est livrée par les siens, comme déjà
quarante ans auparavant on l'avait abandonnée à la fureur de Chilpéric. A
la vue de l'ancienne ennemie de sa mère, le fils de Frédégonde sentit
s'éveiller en lui une invincible haine ; il accabla d'injures la reine
d'Austrasie, lui reprocha la mort de tous ceux qui s'étaient engagés à
diverses époques dans sa cause, et il condamna à un supplice affreux
cette femme énergique qui
avait un instant commandé à deux royaumes, qui était fille, soeur, épouse
et mère de rois. Pendant deux
jours il la fit traverser les rangs de son armée, honteusement montée
sur un chameau, exposée aux mépris et aux rires de ses soldats puis,
quand la malheureuse reine eut épuisé jusqu'à la fin cette flétrissante
ignominie, le roi la fit attacher par les cheveux, par un bras et par un
pied à la queue d'un cheval indompté.
Bientôt le
sang de Brunehaut, ses membres déchirés couvrirent l'espace que
l'animal, excité par le fouet et par les cris des soldats. parcourait
dans une course furieuse. Suivant une
ancienne tradition, le corps meurtri fut placé sur un monceau de bois
auquel on mit le feu ; ensuite on plaça sous le grand autel de l'église
d'Autun les cendres et les os à demi brûlés qu'on avait recueillis sur le bûcher. En 1462 ce
tombeau fut couronné d'une arcade dans l'intérieur de laquelle on plaça
une inscription consacrée à la mémoire de Brunehaut. A la mort de la reine d'Austrasie commence la déchéance de la race mérovingienne, qu'elle avait essayé d'affermir par de grandes institutions ; l'autorité des maires du palais se substitue au pouvoir royal, et dès lors, dans les luttes de la Neustrie et de l'Austrasie, on voit apparaître au premier rang les chefs de la race carlovingienne. Les écrivains
qui ont raconté la vie de Brunehaut obéirent aux ressentiments des Austrasiens,
sur qui elle avait prétendu appesantir le joug de la loi ; sa mémoire
fut flétrie d'accusations odieuses, et l'on plaça longtemps sur la même
ligne Frédégonde et la princesse wisigothe. Sans doute Brunehaut imita souvent les exemples cruels que donnaient les barbares ; mais néanmoins, par son courage, par l'énergie de son caractère par l'élévation de son esprit, même par sa bonne et sa mauvaise fortune, la fille d'Athanagild reste la plus imposante figure de ce temps. |
Table chronologique des faits mémorables.....
Réalisée le 20 novembre 2005 André Cochet Mise sur le Web le novembre 2005 Christian Flages