VARIÉTÉS BORDELOISES ou E S S A I HISTORIQUE ET CRITIQUE SUR LA TOPOGRAPHIE ANCIENNE ET
MODERNE DU DIOCÊSE DE BORDEAUX PAR L'ABBÉ BAUREIN TOME III BORDEAUX FERET ET FILS, LIBRAIRES‑ËDITEURS 15 Cours de L'INTENDANCE 1876 |
Extrait :
Livre sixième
Article X
Pages :265
à 269
Collection :
SAINT‑SYMPHORIEN
Cette Paroisse, qui
dépend de l'Archiprêtré de Cernès, est placée à une des extrémités du Diocese,
vers les confins de ceux de Dax et de Bazas. Son Eglise, qui est voûtée dans
toute son étendue, est assez belle pour une Eglise de campagne; elle est située
sur le bord d'un ruisseau appellé la Hure,
dans un terrein qui n'est qu'un pur sable, elle peut contenir de six à sept
cens personnes.
La Cure de cette
Paroisse, qui est séculiere, est à la collation du chapitre d'Uzeste, et
alternativement, sans doute, de celui de Villandraut. On sait que ces deux
Chapitres, dont le premier est placé dans le Bazadois, et le dernier dépend du
Diocese de Bordeaux, doivent leurs fondations
P.266
au Pape Clément V, appellé Bertrand
de Gout, dont le pere, suivant M. Lopes (Hist.
De Saint‑André de,Bordeaux, P. 240), étoit Seigneur de Villandraut.
Ce Seigneur assigna les fruits décimaux de la Paroisse dont il est ici
question, comme une partie de la dotation de ces deux Chapitres.
La Cure de
Saint‑Symphorien est desservie par un Curé-Vicaire perpétuel. Ce sont ces
deux Chapitres qui, en qualité de Curés primitifs, sont gros Décimateurs dans
la Paroisse. Les principaux Villages de celle‑ci sont : le Bourg, qui est
assez considérable.... Lassus.... Arrodes,... le Marchand....le Couy….
Naudon.... la Trogne.... Johanneau.... le Brous .... Broy.... Lartehunx.... les
Crabeys.... Gardit....
Dugoy .... Estiu. On observera, à l'égard du Village appellé
Arrodes, que, dans le principe, sa
dénomination étoit Rodes, et que si, dans la suite, on l’a appellé
Arrodes, ce n'est qu'en conséquence de l'ancien usage des Gascons, qui
plaçoient la syllabe Ar devant les mots qui commençoient par la lettre R. Il
n'est pas hors de propos de faire, lorsque l'occasion s'en présente, ces sortes
d'observations, qui peuvent faire connoître les altérations survenues aux noms
des lieux qui étoient
significatifs dans le principe, et dont les altérations
empêchent
souvent de découvrir la vraie signification.
Le terrein de cette
Paroisse est un sable très‑aride, qui ne produit qu'à force d'engrais; et
ce qu'il y a de particulier, c'est que ce sable est presque aussi blanc que la
neige. Une partie considérable de cette Paroisse est en landes, et il faut même
que la chose soit ainsi; car sans cela il ne seroit pas possible d'entretenir
en culture l'autre portion, qui ne S'y soutient que par le secours des engrais;
et on ne peut s'en procurer qu'au moyen des landes, qui fournissent toute
l'année des pâturages aux troupeaux de brebis qui se plaisent dans ces especes
de déserts.
On comprend aisément
que le terroir de cette Paroisse étant
entiéremerit sablonneux, les denrées qui y croissent ne
P.267
peuvent être que des seigles et
des millets, Les habitans, qui n'y sont que simples cultivateurs, n'y vivent
qu'avec peine. Ils sont au nombre de cent soixante‑douze familles : ils
s'occupent, ou à l'exploitation despins, ou à la culture de la terre, ou à la
garde des troupeaux. Le bois y croît comme de lui‑même et sans culture.
Une partie de la forêt appellée la
Toulouse, est située dans cette Paroisse.
Il existe dans Saint‑Symphorien,
une verrerie qui y est établie depuis près de vingt ans. Il s'y tient,
d'ailleurs, deux foires de bêtes à corne; l'une, le 2 du mois de Juin, et
l'autre, le 2 du mois de Septembre. Cette Paroisse est placée à neuf lieues, pour
le moins, de Bordeaux, à cinq de la Garonne, et à une demi‑lieue de Saint‑Leger,
où est le Siege de la Jurisdiction de Castelnau de Cernès, de laquelle dépend
la Paroisse dont il est ici question. Les ports où on apporte les denrées pour
les embarquer, sont ceux de Portets et de Podensac, qui sont placès à la
distance de cinq lieues.
Il n'y a point de
Bureau de Poste dans la Paroisse : la Ville la plus voisine où l'on puisse
adresser les lettres, est celle de Bazas : on peut néanmoins les y faire parvenir
par des commodités particulieres, mais il faut en être instruit. C'est aux
personnes, qui ont des relations dans cette Paroisse, à s'en informer. Saint‑Symphorien
a environ quatre lieues de circuit : le Village le plus éloigné est à la
distance d'une grande lieue de l'Eglise. Deux ruisseaux, l'un appellé la Hure, et l'autre le Ruisseau‑Blànc, qui ont leurs
sources dans la Paroisse même, et qui la traversent en partie, vont se
décharger dans un autre ruisseau beaucoup plus considérable, appellè le Ballion
celui‑ci se
décharge, à son tour, dans là riviere du Siron, qui, comme on l'a déjà observé,
a son embouchure dans la Garonne. ,
On voit à l'extrêmité
méridionale de cette Paroisse, une lagune,
(terme usité dans le pays des Landes, pour eiprimer
P.268
une espece de petit lac). Cette lagune a un quart de lieue de longueur,
et elle n'à jamais tari : sans doute qu'elle est formée et entretenue par des
sources abondantes.
Saint‑Symphorien
est borné, vers le levant, par la Paroisse de Saint‑Leger; vers le
couchant, par celle du Tuzan; vers le nord, par celles d'Origne et de Balizac,
et vers le midi, par celle de Bourideys, actuellement
du Diocese de Bazas, et par celle de Sore, qui dépend de celui de Dax : on dit actuellement du Diocese de Bazas, et ce
n'est pas sans quelque espece de fondement que nous le disons. On a déjà vu,
Article XIX, page 229 du précédent Volume, qu'il est question d'une Paroisse
appellée Saint‑Michel de Boridurs, qu'on
ne retrouve plus dans le Diocese de Bordeaux, quoiqu'il en soit question dans
les pouilliés et dans les lieves des quartieres de l'Archevêché. Or, la
Paroisse qui sert de limite, vers le midi, à celle de Saint‑Symphorien,
est celle de Borideys, qui ne différe, quant à la dénomination, de celle de Boridurs, que par sa terminaison. Si,
dans les Mémoires qui nous ont été fournis, on eût énoncé le nom du Saint,
titulaire de la Paroisse de Borideys; si c'eût été Saint‑Michel, dans ce
cas, il n'y auroit pas de doute que la Paroisse de Borideys n'eût été la même
que celle de Boridurs, et qu'elle n'eût été, dans le principe, dépendante du
Diocese de Bordeaux; mais il faut suspendre son jugement jusqu'à ce que ce fait
soit éclairci : tout ce qu'on peut assurer en attendant, c'est que ce ne seroit
pas la seule Paroisse de ce Diocese qui auroit été annexée à celui de Bazas,
ainsi qu'on aura lieu de le prouver.
Mais revenons à la
Paroisse de Saint-Symphorien quoiqu'il y ait existé de tout temps une quantité
considérable de pins, ce n'est néanmoins que depuis très‑peu d'années
qu'un Particulier y a fait construire un four pour faire l'huile de
térébenthine : sans doute qu'on avoit quelqu'autre moyen pour extraire cette
huile. Il n'est guere vraisemblable qu'on ait négligé, dans cette Paroisse,
cette production des pins
P.269
dont il y a une si
grande quantité, ou peut‑être les y emploie‑t‑on à tout autre
ouvrage.
Saint‑Symphorien,
ainsi qu’on l'a déjà dit, est une des dépendances de la Seigneurie et
Jurisdiction de Castelnau de Cernès en Bazadois, qui appartient à M. le Marquis
de Pons, Maréchal de Camp des Armées du Roi, et qui, d'ailleurs, est Baron de
Villandraut.