Le
difficile règlement
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par M. Roger TORLOIS. |
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Extraits. | |
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Cahiers du Bazadais N° 100. 1993. |
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Les Amis du Bazadais. B.P 34 33430 BAZAS. |
Les nombreuses réformes de la Révolution et de l'Empire,
si elles modifient profondément la France et en particulier son administration,
ne règlent pas tous les problèmes.
Ainsi, les communes, créées en 1790, possèdent-elles parfois, au début du XIXe siècle, des biens communaux étendus, propriétés indivises des anciennes paroisses ou biens seigneuriaux des nobles émigrés revenus à la communauté, dont les limites et superficies restent mal connues jusqu'à l'établissement du cadastre entrepris à l'initiative de Napoléon.
Mais c'est une oeuvre de longue haleine, aussi, pendant les premières décennies du XIXe siècle, les communes du plateau landais, riches en landes communales, ont-elles des difficultés à protéger ces biens collectifs étant soumises, comme l'a écrit le doyen Papy, à :
"la pression qu'exercent sur les terres communales les propriétaires fonciers, notables de village, maîtres de forges, hommes de loi, médecins, paysans aisés dont beaucoup avaient été les bénéficiaires des Biens Nationaux. On les voit, en bordure de leurs propriétés, entourer de fossés des parcelles de landes, les clôturer, y installer des colons, créer des champs, semer des pins".
Des situations assez comparables existent ailleurs dans le royaume ce qui explique l'ordonnance royale du 23 juin 1819 prévoyant la régularisation des appropriations, à l'époque, on parle d'usurpations, opérées aux dépens des communes.
C'est une de ces usurpations, faite au détriment de la commune de Goualade, que cet article présente car elle offre la particularité d'avoir entraîné une longue procédure ne trouvant son aboutissement qu'au bout de vingt-cinq ans.
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En application de l'ordonnance royale de 1819, le maire de Goualade, Julien Cherrueaut dresse, à partir des déclarations des intéressés un tableau des usurpations dont a été victime sa commune. Document 1
Onze personnes
reconnaissent ainsi avoir empiété sur les landes communales pour des
superficies allant de deux à dix-huit hectares, valeurs approximatives
fournies par les déclarants, dont le total atteint quatre vingt six
hectares.
Ces empiétements remontant presque tous à trente ou
quarante ans, cinq auraient donc eu lieu avant la Révolution, six entre 1789 et
1791 et un seulement peu de temps avant, en 1816 selon le déclarant.
Mais il s'agit sans aucun doute pour les uns et les autres
de périodes approximatives. L'appropriation la plus récente, en première
position sur l'état et reconnue par Bernard Tauzin, aubergiste à Lerm, est
celle qui pose problème pendant un quart de siècle.
Est-ce un hasard si Tauzin figure en tête de la
liste ?
Son usurpation étant de fraîche date nul ne devait
l'ignorer, ce qui peut expliquer qu'il se soit fait connaître sans délai. Il
faut toutefois observer qu'il est le seul déclarant n'habitant pas Goualade et,
exception faite de la couturière Jeanne
Dufau, aussi le seul à ne pas être cultivateur.
Ces déclarations restèrent longtemps sans suite,
peut-être parce que le maire ayant peu après quitté la commune et démissionné,
son remplaçant, nommé seulement en septembre 1820, n'a pas eu connaissance de
cette affaire.
Lorsqu'elle ressurgit, en 1832, il semble bien que ce soit
à l'initiative de Bernard Tauzin.
Le 10 décembre 1832, deux experts choisis respectivement
par le maire de Goualade et Tauzin procèdent à l'arpentage et à:
"l'estimation contradictoire des biens-fonds communaux, en nature de lande et de pins pépinière appartenant à ladite commune et possédés par ledit Tauzin sans droit ni autorisation".
Il résulte de cette expertise que les biens en litige ont:
"une contenance en nature de lande de dix hectares
cinquante six ares, quarante huit centiares et en pépinière de pins
d'une contenance de soixante dix sept ares [..] ces objets se trouvent
sur la position la plus avantageuse des communaux notamment pour le possesseur
puisqu'il lui borde ses propriétés, que la qualité de ce fonds paraît dans
son espèce susceptible de fertibilité (sic) soit pour les grains, la bruyère
et le pin puisque la partie qui s'en trouve ensemencée se trouve grande
abondance par sa bienvenance (sic) qui pousse à sa douzième année".
En conséquence, les experts estiment l'hectare de lande
à 75 francs et l'hectare de pins à 250 francs soit une valeur totale de 984,86
francs. Observons que l'ensemencement en pins ne porte que sur une très petite
parcelle et qu'il remonte, selon les experts, à 1819 ou 1820, époque de la
soumission et non à la date annoncée de l'usurpation : 1816.
Notons aussi que la position est "la plus
avantageuse" parce que ces terrains bordent la propriété de Tauzin ;
un autre habitant n'aurait peut-être pas la même opinion.
Quant à la fertilité, les précautions de langage des
experts permettent d'avoir quelques doutes. Mais les conclusions des experts
s'imposent aux deux parties et les documents ne permettent pas de savoir si
Tauzin, qui a assisté à l'expertise, a formulé des observations.
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Lors de la réunion du conseil municipal de Goualade, le 9
mai 1833, la manière dont le maire évoque l'affaire lui donne une autre
tournure. Il
"qui dit posséder une métairie dans la commune de
Heulies appelée au Bourdassey contiguë aux communaux de Goualade et avoir fait
trois ans avant la déclaration un ensemencement en pépinière de pins.
Qu'il n'y avait qu'un mois qu'il avait connaissance que
ses landes dépendaient de la commune de Goualade."
S'appuyant sur le rapport d'expertise et divers témoignages,
le maire explique
Faisant allusion à d'autres témoignages, il insiste sur
la "fausseté de sa déclaration", puis prenant en considération
les superficies indiquées par les experts et les prix estimés, il présente le
montant du préjudice pour la commune c'est-à-dire la facture à
payer par Tauzin, savoir:
Pour 10 ha 56 a 48 ca de landes: capital |
792,OOF |
13 ans 6 mois d'intérêt à 5 % | 523,00F |
Total | 1325,80F |
Pour 77 a de pignada |
192,00F |
Total général | 1517,80F |
La somme totale annoncée de 1517,80 F est donc majorée
de 10,80 F en raison des erreurs mais, en fait, inférieure au montant réel du
capital et des indues jouissances qui devrait être de 1648,20 F.
Tout en considérant qu'il y a eu "connivence de
l'ex-maire", Cherrueaut, qui a reçu la déclaration de Tauzin en
1819 alors qu'il ne pouvait bénéficier de l'ordonnance royale, ses usurpations
étant, selon le maire Duprat, postérieures, le conseil municipal accepte la
concession des terrains usurpés payés intégralement "sans aucune
remise ni modération".
L'affaire aurait pu trouver là sa conclusion si Tauzin
avait accepté ces conditions mais, alors qu'il est lui-même devenu maire
de Lerm, il dénonce au sous-préfet de Bazas les exigences du conseil municipal
de Goualade estimant que
"la valeur du terrain qu'il a usurpé est hors de proportion avec celle
des autres détenteurs".
Le maire de Goualade, consulté, fournit les documents justificatifs afin que le sous-préfet soit convaincu "de l'erreur ou méchanceté dudit Tauzin".
Le préfet, auquel est adressé, en juin 1833, le dossier
des diverses usurpations à régulariser, rappelle que les soumissionnaires
peuvent ne pas accepter les conditions offertes mais qu'ils doivent alors
restituer les terrains sous huitaine. Il émet aussi quelques doutes quant à la
possibilité de faire encore valoir l'ordonnance de 1819.
(Heulies n'est qu'un lieu-dit de la commune de
Saint Martin Curton en Lot et Garonne, limitrophe de
celle de Goualade, ce qui permet de localiser les landes usurpées par Tauzin
aux confins de la commune à environ six kilomètres au nord-est du bourg
de Goualade.
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Néanmoins le 22 juillet 1834, une ordonnance royale autorise la vente
par la commune de
Goualade :
"à huit détenteurs [..] de plusieurs portions de
landes contenant ensemble soixante seize hectares moyennant deux mille
deux cent quatre vingts francs, prix d'estimation des quatre cinquièmes
de la valeur desdits terrains.
à six détenteurs [..] plusieurs portions de landes de la
contenance de huit hectares trente deux ares moyennant cinq cent cinq
francs quarante centimes, prix d'estimation de la valeur intégrale desdits
terrains, à charge par ces six derniers acquéreurs de payer en outre trois
cent quarante six francs vingt cinq centimes pour indue jouissance".
Le tableau annexé (document 2) donne le détail des concessions et de leurs bénéficiaires. Tauzin ne figure
pas mais il y a une explication possible, il est en effet décédé le 18
octobre 1833.
Peut-être avait-il voulu, en 1832, pressentant
une mort prochaine, régler ce problème de terrain usurpé afin de laisser une
situation claire à ses héritiers. En obligeant ainsi le maire de Goualade à
exhumer les soumissions de 1819, comment ne pas imaginer le mécontentement de
certains.
Sur le tableau des bénéficiaires, il faut remarquer que huit plus six concessionnaires ne font plus que neuf, cinq appartenant aux deux catégories d'acquéreurs, ceux ayant fait leur déclaration en temps utile et ceux l'ayant faite postérieurement.
Six seulement figurent sur l'état de 1819 mais, parmi les nouveaux figurent sans doute les héritiers de certains soumissionnaires de 1819. Observons également que Bouic qui avait seulement déclaré cinq hectares en 1819 en acquiert dix huit en bénéficiant, comme tous ceux qui ont fait leur déclaration en temps utile, d'un prix réduit aux quatre cinquièmes sans indemnité d'indue jouissance.
Il en est de même pour Arnaud Suderie qui, de sept
hectares, passe à dix hectares. Notons également que, malgré deux propriétaires
de moins, une fois défalqué Tauzin et ses dix hectares, la superficie déclarée
en temps utile, soixante seize hectares, correspond à celle déclarée en
1819 du fait des augmentations des lots concédés à Bouic et Sudérie.
On peut donc penser que ces deux acquéreurs ont hérité
des seize hectares de deux des déclarants de 1819 ne figurant plus sur la liste
de 1834, sinon ces hectares en plus auraient dû figurer dans la rubrique "déclaré
postérieurement" et supporter les indemnités d'indue jouissance.
Les huit hectares trente deux ares de cette catégorie
supportent une indemnité d'indue jouissance pour treize ans et sept mois ce qui
situe l'usurpation en 1819 ou 1820.
C'est donc dans cette catégorie que le conseil municipal
a placé Tauzin qui pourtant figurait en tête de liste des déclarations faites
en temps utile.
Mais les informations les plus intéressantes de la liste
de 1834 concernent les prix. Les
huit détenteurs bénéficiant d'un prix réduit au 4/5e de la valeur deviennent
propriétaires à raison de trente francs l'hectare.
Parmi eux, quatre ont déclaré en 1819, comme Tauzin pour
sa petite parcelle, des ensemencements en bois de pins : Marot, Lespinas, Bouic
et Suderie.
Ils bénéficient cependant d'un prix unique. Ceux qui
paient la totalité du capital acquittent un prix variant de 84,16 F à 109,42 F
l'hectare dont 50 ou 65 F de capital et 34,16 F à 44,42 F d'indemnité d'indue
jouissance.
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Rappelons les sommes demandées à Tauzin : 75 F l'hectare
de lande rase et 250 F l'hectare de pépinière de pins, soit pour l'ensemble
un prix moyen de 133,90 F l'hectare.
Comment Tauzin aurait-il pu accepter, en 1833, une
telle différence de traitement '?
Pourquoi une telle différence ?
On peut avancer plusieurs hypothèses.
Les "notables" de Goualade ont pu vouloir
le punir d'avoir exhumé cette vieille affaire, mais comment ne pas penser aussi
à une inimitié entre Tauzin, maire de Lerm, et Duprat, maire de Goualade.
Certains termes employés par Duprat y incitent et, bien
qu'aucun document disponible n'émane de Tauzin lui-même, tout porte à
croire qu'il ne fait pas preuve de plus de mansuétude.
Une lettre du sous préfet concernant cette affaire
rapporte qu'il a signalé "que le conseil municipal de Goualade avait
nommé un trésorier pour recevoir les sommes dues par les soumissionnaires"
Mais, et sans
doute est-ce là la raison essentielle, Tauzin est un étranger, un forain
dit-on, n'habitant pas la commune, n'y étant pas propriétaire puisque sa
propriété se situe à Saint Martin Curton.
Or, dans les communes landaises, les habitants, propriétaires
en indivision des biens communaux acceptent, pas toujours facilement d'ailleurs,
de les partager mais entre eux seulement !
Toujours est-il qu'en 1834, Tauzin décédé, le
sort des usurpations qu'il avait déclarées en 1819 n'est toujours pas réglé.
A la fin de l'année 1834 le maire de Goualade, Duprat,
quittant sa commune pour s'installer à Grignols, démissionne.
Il désigne pour le remplacer Bernard Yon "le plus
intelligent de la commune" et choisit aussi un nouvel adjoint Michel
Lacampagne qui "réunit à sa probité plus d'intelligence que Rochet
adjoint actuel [qui] ne cesse à se faire mésestimer suivant la critique
publique".
Ces jugements péremptoires confirment le caractère
autoritaire de Duprat mais ses "désignations", qui ne peuvent
être que des propositions, ne paraissent pas avoir été suivies puisqu'en 1837
le maire est Jean Rochet, sans doute lui a-t-il succédé, Bernard
Yon exerçant la fonction seulement à partir de 1840 jusqu'en 1852.
Ce sont eux qui poursuivent la procédure Tauzin. Une
correspondance du préfet au sous préfet, en janvier 1835, retourne
un procès-verbal dressé par le maire Duprat le 25 août 1833, constatant
l'usurpation en vue d'obtenir le délaissement des terrains, procès-verbal
qui "n'a point été notifié au sieur Tauzin", raison pour
laquelle le conseil de préfecture, le 13 janvier 1835, n'a pu statuer et a
prescrit la notification dudit procès-verbal à l'intéressé.
L'arrêté du conseil de préfecture du 23 mai 1835 retrace les nouveaux développements de l'affaire. La notification ayant été faite le 8 février 1835 aux héritiers de Tauzin, son gendre Germain Faugère fait valoir:
"qu'il n'a point été prévenu d'une manière légale que
la commune exigeait actuellement des autres soumissionnaires [..] le paiement
des terrains [..] il offre d'exécuter la soumission [..] et de payer au même
taux que ses voisins".
Il y a là, bien sûr, sujet à controverse. Se référant
à la soumission de Tauzin de 1819, le conseil de préfecture note que
celui-ci
"s'oblige à payer [..l les 4/5c de la valeur
actuelle des landes [..] déduction faite de la plus value résultant de
l'ensemencement en pins qu'il y a
fait".
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Observons qu'en mai 1833, le maire, faisant référence a cette soumission devant son
conseil, n'avait pas évoqué ces aspects financiers en complète contradiction
avec ceux de l'expertise de décembre 1832 ainsi qu'avec les comptes qu'il avait
fait adopter par le conseil.
Que faut-il penser d'ailleurs de cette expertise qui
attribue douze ans d'âge à des pins censés avoir été semés seize ans
auparavant ?
Comment Tauzin, en 1819, pensant obtenir la régularisation
de l'usurpation dans les semaines ou les mois suivants aurait-il demandé
la déduction de la plus value de pins semés trois ans avant, si ceux-ci
n'existaient pas ?
Le conseil de préfecture a-t-il remarqué en
janvier 1835 les contradictions du dossier. Il n'en fait pas état mais, considérant, "qu'il
ne s'agit que de régulariser [..] et donner suite à la soumission faite par le
détenteur, qu'il n'appartient qu'au pouvoir administratif de statuer sur la
dite soumission", il se déclare incompétent.
Et de nouveau le temps passe ! Le 21 septembre 1841, six
ans et demi plus tard, le sous-préfet de Bazas expose au préfet que
"les
héritiers Tauzin ont fait de vaines démarches auprès de M. le maire de
Goualade pour être mis en possession régulière [..] des terrains usurpés"
et lui demande de
"tracer la marche à suivre par les héritiers Tauzin
pour pouvoir profiter du bénéfice de la soumission".
Dans sa réponse, le préfet se réfère à une précédente
correspondance du 5 juin 1835 qui stipulait qu'
"il a donc à faire régulariser la concession ainsi
que cela a eu lieu pour les autres détenteurs" et ajoute qu"'il n'a pas été donné suite à cette
affaire" malgré les instructions.
Les réponses des autorités sont ambiguës car elles ne
disent pas quels sont les prix à prendre en compte, ceux de 1819, 1832 ou 1834
?
Quatre autres années s'écoulent avant que, le 9 mai
1845, le conseil municipal de Goualade présidé par Bernard Yon donne, à
l'unanimité, un avis favorable à l'aliénation des landes en litige.
La procédure aboutit alors rapidement, le 20 juin 1845,
le sous préfet émet un avis favorable, le 28 juin un arrêté préfectoral
autorise la cession et l'acte notarié de vente par la commune est passé le 10
août 1845.
A quelles conditions ?
Là réside la surprise ! Le terrain aliéné dont la
superficie a légèrement changé, 11 ha 42 a 60 ca au lieu de 11 ha 33 a 48 ca,
est vendu 420,76 F soit 37 F l'hectare, somme à laquelle il convient d'ajouter
vingt six annuités d'indue jouissance à 4,5 % par an soit 429,28 F.
Les héritiers, les deux gendres de Tauzin, Germain Faugère
et Vincent Coycault, acquittent donc au total 912,40 F. Lors de l'expertise de décembre
1832, avec une indue jouissance deux fois moins longue, Tauzin devait acquitter,
rappelons-le, 1517,80 F.
L'attente a été profitable ! Le prix à l'hectare,
comparé aux trente francs payés par les autres usurpateurs, ne bénéficie pas
de la réduction des 4/5e mais il est bien inférieur au prix des parcelles déclarées
postérieurement, 50 ou 65 F, et l'indemnité d'indue jouissance est calculée
à 4,5 % au lieu de 5 % en 1834.
Pourquoi ce nouveau calcul qui permet aux héritiers de bénéficier
de conditions assez proches de celles des autres concessionnaires ? Quelles ont
été les transactions préalables ? Les documents ne permettent pas de répondre.
Les seules justifications que donne le maire à son conseil sont que les détenteurs
des terrains en
"jouissent depuis très longtemps sans que la commune
en retire le moindre revenu et celle-ci a besoin de fonds".
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L'ancien maire, Duprat, considérant Bernard Yon comme
"le plus intelligent la commune " peut-être était-il,
pour cela, plus raisonnable que ses prédécesseurs
et a-t-il jugé nécessaire de mettre un terme à ce vieux litige.
Les usurpations de landes sont, dans la première moitié
du XIXe siècle, une pratique courante dans les communes du plateau landais.
Avec l'ordonnance royale de 1819 mais surtout lorsque des
possibilités de mise en valeur apparaissent, principalement avec la plantation
de pins, les communes régularisent ces situations illégales concédant, à
l'amiable peut-on dire et à des conditions souvent très avantageuses,
les terrains usurpés que les détenteurs ont bien voulu déclarer, d'autres
accaparements ayant été sans ambages intégrés dans les propriétés lors de
l'établissement du premier cadastre.
Ainsi, un rapport d'enquête, établi en 1851 par un
conseiller de préfecture pour le canton de Belin, indique que "pour les
six communes du canton [.] on évalue, que depuis 1800 jusqu'à ce jour, il a été
usurpé successivement plus de dix mille hectares".
L'usurpation de Tauzin à Goualade n'a donc rien
d'exceptionnel. Ce qui est extraordinaire c'est la lenteur de la procédure
qu'elle entraîne pour la régularisation et la perversité dont font longtemps
preuve les élus de Goualade pour empêcher un étranger à la commune d'acquérir
une parcelle des biens communaux.
Roger TORLOIS.
Extrait du registre ouvert par le maire de la commune de Goualade en exécution
de l'ordonnance du roi du 23 juin 1819 et de l'arrêté de Monsieur le préfet
du premier octobre suivant pour servir à l'enregistrement des déclarations
à nous
faites par les propriétaires détenteurs de biens communaux.
Nom, prénom, profession et demeure du déclarant | Origine de la propriété ou date à laquelle elle remonte | Quotité du terrain usurpé ou étendue | Nature de ces biens au moment de
l'usurpation |
Améliorations survenues par les défrichements plantations, constructions |
Tauzin Bernard, aubergiste demeurant à Lerm | 3 ans | 10 ha | En bruyères | Ensemencement
d'une
pépinière de pins |
Marot Nicolas, cultivateur aux Trois Chênes, Goualade | 40 ans | 18 ha |
Id |
|
Soulard Blaize, cultivateur à idem | 30 ans | 6 ha | Culture, bâtisse | |
Lespinas François, cultivateur à idem | 30 ans | 2 ha | A trouvé une pépinière de pins | |
Bouic Bertrand, cultivateur | 29 ans | 2 ha |
Id |
|
Bouic Bertrand, cultivateur à idem | 36 ans | 3 ha | Il y a fait un ensemencement en bois de pins | |
Suderie Arnaud, cultivateur à Nardouin, à Goualade | 36 ans | 7 ha |
Id |
|
Sango Bernard, cultivateur à Goualade | 28 ans | 8 ha | Culture, bâtisse | |
Mensencal Jean, cultivateur à idem | 30 ans | 6 ha |
Id |
|
Dufaud Pierre, cultivateur aux Trois Chênes à Goualade | 38 ans | 8 ha |
Ces trois derniers jouissent d'un bien appelé au Bredon. Se sont partagés entre eux, il y a maison et parc
|
|
Jannau Jean, cultivateur | 38 ans | 8 ha | ||
Dufau Jeanne, couturière a Goualade | 30 ans | 8 ha |
Etat des habitants de Goualade obtenant des concessions de landes communales en 1834 en vertu de l'ordonnance royale de 1819 et de celle du 22 juillet 1834.
Noms des détenteurs |
Contenance du terrain |
Total de la contenance | 4/5e de la valeur à payer pour la lere | Valeur totale à payer pour la 2e | Montant des indues jouissances | Total à payer par chaque détenteur | |
déclarée en temps utile. | déclarée postérieurt | ||||||
ha--ares | ha--ares | ha--ares | - | - | - | - | |
MAROT Nicolas | 18 | 0--92 | 18--92 | 540 | 59.8 | 40.87 | 640.67 |
CARRETEY Jean | 8 | - | 8-- | 240 | - | - | 240 |
ESPINASSE François | 2 | 3--24 | 5--24 | 60 | 210.6 | 144.78 | 415.38 |
BOUIC Bertrand | 18 | - | 18-- | 540 | - | - | 540 |
SUDERIE Arnaud | 10 | 1-- | 11-- | 300 | 65 | 44.42 | 409.42 |
MANSENQUAL Jean | 6 | 0--80 | 6--80 | 180 | 52 | 35.54 | 267.54 |
DUFAU Jeanne | 8 | 1--24 | 9--24 | 240 | 62 | 42.37 | 344.37 |
GARBAYE Bernard | 6 | - | 6-- | 180 | - | - | 180 |
MOURLAU Jean | - | 1--12 | 1--12 | - | 56 | 38.27 | 94.27 |
Totaux | 76 | 8--32 | 84--32 | 2280 | 505.4 | 346.25 | 3131.65 |
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Réalisée le 20 mars 2003 |
André Cochet |
Mise sur le Web mars 2003 |
Christian Flages |