La |
L'ancien arrondissement de Bazas. |
Deuxième
Partie. |
GEOGRAPHIE.
3. Pages 107 à |
Table des matières. |
Sommaire. |
10.
La vallée de la Garonne. Aspect. Culture. 12.
Le Sauternais. Le vin de Sauternes. 14. Les prairies. Les pâturages. L'élevage. La race bovine Bazadaise. |
La
Vallée de la Garonne.
A l'extrémité nord du Bazadais, la Garonne coule dans une magnifique et riche vallée. Sur la rive droite s'allongent de hautes collines assez voisines du fleuve; sur la rive gauche vient se terminer par une pente presque insensible, le plateau des Landes.
La plaine assez étroite près de Langon, s'élargit à mesure qu'on remonte le fleuve; elle atteint plusieurs kilomètres vers Bassanne.
C'est vers l'est, entre La Réole et l'embouchure du Beuve, qu'on trouve la partie la plus pittoresque et la plus fertile de la vallée de la Garonne, en Bazadais.
De Castets, situé dans une position charmante, l'oeil peut suivre à l'aise les sinuosités du fleuve et embrasser une perspective des plus belles, depuis Gironde jusqu'à Langon. Les agglomérations se suivent nombreuses, rapprochées, animées, riantes. Les fermes sont bien construites, souvent à un étage, en pierre blanches, gaies, avec un toit de tuiles rouges.
La grange, l'étable occupent une importante partie de la métairie, généralement bien tenue. Ici, peu de métayers, mais des petits propriétaires qui travaillent eux-mêmes leur terre avec leur famille et des domestiques, des hommes, des femmes et des enfants.
Quatre artères importantes, très voisines et presque parallèles sillonnent et animent ce large couloir : la voie ferrée, la route nationale, la Garonne et le canal.
La plaine et la première terrasse des côteaux de Castets, de Castillon, de Bassanne, de Puybarban sont remarquables par leur fertilité due aux alluvions de la Garonne, le plus souvent argilo-calcaires, tantôt à fond de cailloux, tantôt à fond d'argile. On y trouve d'assez nombreuses bandes calcaires, parfois très rapprochées de la surface et formant de riches carrières.
Toutes les cultures s'y plaisent, mais les plus importantes sont les céréales, surtout le blé qui y pousse en abondance, la vigne et le tabac. Les prairies y occupent une place très importante, elles nourrissent un grand nombre de boeufs de travail et de boucherie, de vaches laitières et de veaux.
A Castets en Dorthe, par exemple, il y a 182 hectares de blé, 160 hectares de prairies, 76 hectares de tabac, 50 hectares de vigne.
Ln cultive encore dans la vallée le sorgho à balais, le maïs fourrager, le maïs à grain, l'avoine, la pomme de terre, les arbres fruitiers, les fèves, les petits pois, toutes sortes de légumes.
Le sorgho à balais était autrefois cultivé en grande quantité dans la vallée et sur les côteaux voisins, vers Barie, Bassanne, Puybarban. Il donnait d'importants revenus, car, au produit de la paille très recherchée par les fabriques de balais, s'ajoute celle du grain très apprécié de la volaille.
Cette
culture a sérieusement diminué depuis quelques années.
La culture de l'osier est importante : toute une industrie en dépend.
Les saules-aubier et les peupliers se trouvent en assez grande quantité sur les rives du fleuve et alimentent des industries. Les arbres fruitiers y étaient autrefois très nombreux, la culture du poirier William est de nouveau en honneur vers Barie et Bassanne.
De Castets à Langon les terres deviennent silico-graveleuses (sable et grave) et, par conséquent, plus chaudes. Là, les petits pois sont largement cultivés. Au printemps, ils sont portés tous les jours dans les bourgs importants où les revendeurs et les confiseurs viennent s'approvisionner.
A Toulenne, la culture maraîchère est importante ; les légumes sont portés à Langon les jours de marché.
Vers Langon le pays est plus boisé: pins, acacias, les vignes deviennent plus nombreuses. On se rapproche du Sauternais.
Les
inondations de la Garonne.
Un terrible fléau menace sans cesse la vallée de la Garonne: les inondations viennent souvent dévaster les récoltes et menacer les habitants jusque dans leur existence.
Ces crues ont lieu en hiver et au printemps et sont occasionnées soit par les pluies soit par la fonte des neiges, sur les sommets du Cantal, des Cévennes et des Pyrénées. C'est alors que les eaux grossissantes du Tarn et du Lot font enfler la Garonne.
Cet endroit abaissé de la vallée du fleuve,
d'abord assez large puis resserré entre Caudrot et Castets, forme comme un
immense réservoir où s'amoncellent des masses énormes de liquide dont le débit
insuffisant provoque une élévation de niveau désastreuse.
On
conserve encore le souvenir de l'effroyable débordement de l'année 1770, alors
que la Garonne s'éleva, à Castets, de quatorze mètres au dessus de l'étiage.
De
sinistres lignes gravées sur les murs, de ci, de là, accompagnées de dates mémorables,
rappellent la hauteur atteinte par les inondations.
Celle
du mois de juin 1875 fut moins élevée, mais plus terrible que celle de 1770
par l'étendue de ses ravages.
Que faire contre un ennemi si redoutable ?
Peu de chose, hélas !
Les digues appelées
mates, des travaux de fixation des berges, le reboisement des montagnes sont de
faibles remèdes.
En tous cas, les habitants de notre contrée si exposée, se tiennent sans cesse prêts à toute éventualité. Leurs granges sont construites sur des piliers de maçonnerie et mettent ainsi la paille et le fourrage à l'abri des eaux.
Chaque
maison a sa barque au milieu de ses outils aratoires.
Et puis, les précautions prises, le cultivateur ne pense plus à la ruine qui le menace. Il aime ses champs engraissés par l'alluvion et qui le dédommagent plus qu'ailleurs de son travail.
Quand le ciel est bleu et que la brise est légère, pourquoi penserait-on à l'orage. ?
Il sait que la nature n'est jamais lasse de produire et il jouit, l'âme sans soucis, mais pleine d'espérance de ces prés et de ces plaines où il a mis son coeur, ses rêves, ses amours.
Les inondations de 1770, de 1875, de 1927 et de 1930 furent particulièrement terribles.
En 1927, l'eau atteignit à Langon, 11 m. 20 et en 1930, 12m.30 au-dessus de l'étiage, l'étiage est le niveau le plus bas d'un cours d'eau. Pour la Garonne en été, l'étiage est le point de départ dont on se sert pour mesurer la hauteur des eaux. Les dégâts furent importants, des maisons, des hangars furent démolis, des récoltes et des bestiaux emportés par les flots.
LA
VIGNE DANS LE BAZADAIS.
Les
côteaux du Bazadais et la vallée de la Garonne font partie de l'importante région
viticole du Bordelais, universellement connue.
Il
est très probable que la vigne croissait dans notre région dès la plus haute
antiquité, depuis l'âge de la
pierre polie; mais ce sont les
Romains qui au commencement de l'ère chrétienne fournirent à nos ancêtres
les modes perfectionnés de culture qu'ils tenaient eux-mêmes des Grecs et dont
certains sont encore en honneur aujourd'hui.
Le grand poète latin Virgile recommande de planter la vigne dans les côteaux ensoleillés et les terrains "qui nourrissent les fougères odieuses au soc de la charrue" . Précepte auquel les premiers vignerons bordelais semblent avoir obéi en couvrant de vignes d'abord les landes de Bazas et celles du Médoc, aux croupes chauffées par le soleil et dont le sol caillouteux donne au vin ses meilleures qualités.
Vers le deuxième siècle chrétien, l'histoire nous rapporte que sur les rives fertiles de la Garonne le pampre avait atteint un véritable épanouissement. Les Gaulois, et en particulier, les habitants de notre région ne tardèrent pas à devenir d'habiles viticulteurs et leurs vins furent bientôt capables de soutenir la comparaison avec ceux de leurs éducateurs romains.
Les Francs, quelques siècles plus tard, devaient même obtenir des vins supérieurs à ceux de l'Italie et de la Grèce dans les vignes nobles, nom qu'ils donnaient aux domaines qui leur appartenaient et d'où est venu par corruption le mot vignoble.
Depuis
cette époque lointaine la renommée des vins du Bordelais n'a cessé de croître.
L'Aquitaine est par excellence le pays des grands vins
et le Sauternais qui est en grande partie compris dans le Bazadais
produit le premier vin blanc de France et du monde.
En Bazadais, on trouve des vignes sur une partie des côteaux qui se terminent tout près de la Garonne sur sa rive gauche et qui s'étendent vers le sud jusqu'au Ciron. Elles couvrent à peine cinq mille hectares.
Le Sauternais mis à part, les côteaux et la vallée donnent du vin blanc et du vin rouge à peu près en quantités égales, environ cent mille hectolitres dans les bonnes années. Ces vins, assez communs, sauf ceux de quelques localités des cantons de Bazas et d'Auros qui offrent, les blancs, une pointe de douceur, et dont les rouges ont un degré assez élevé, sont de saveur agréable. Ils sont consommés sur place ou vendus surtout dans la région landaise voisine.
La
culture de la vigne en Bazadais.
Dans notre région, la vigne est presque partout cultivée en jouales (sauf à Sauternes). Elle profite ainsi des engrais et des façons donnés aux cultures intercalaires (blé, tabac, pois, maïs, betteraves, etc.) Les rameaux sont fixés par des brins en osier à des fils de fer tendus sur des piquets.
Les
façons culturales se donnent à la charrue. En mars, avant le départ de la végétation,
on procède d'abord à un premier labour ou déchaussage, suivi de l'enlèvement
de la terre herbeuse comprise entre deux pieds. Cela s'appelle tirer le
cavaillon ou décavaillonnage. Ce travail était fait autrefois à la bêche et
fort long. On utilise aujourd'hui une charrue spéciale, la décavaillonneuse,
inventée par un ingénieux artisan des environs.
Dans
le courant du printemps et de l'été, plusieurs autres labours ont pour but de
détruire les mauvaises herbes, d'enfouir le fumier, et les engrais et de
rechausser les pieds.
Taille
de la vigne. Travaux divers
La taille de la vigne, opération très délicate et très importante, se pratique avec le plus grand soin durant l'hiver, principalement au mois de janvier et de février. La taille consiste à enlever, à l'aide d'une scie spéciale et d'un fort sécateur le bois mort et les rameaux de l'année précédente, sauf un ou deux appelés "astes", réduits à trente centimètres environ.
Ces astes donneront quelques mois plus tard, les branches nouvelles, avec les
feuilles, les fleurs et enfin les fruits. Les rameaux coupés,
les sarments, réunis en fagots et mis en tas, servent l'année suivante
à faire de belles flambées dans la grande cheminée de la cuisine. Ils sont
les allume-feu de la région viticole.
Qui,
le premier, a songé à pratiquer la taille de la vigne ?
D'après Ovide, c'est un bouc qui, en broutant, aurait le premier appris à tailler la vigne et dans l'histoire médiévale du Bordelais vinicole, certains auteurs attribuent, sinon la taille primitive, vraisemblablement latine, du moins certains genres d'émondage à la... féconde malignité d'un vigneron jaloux de son voisin et qui, une nuit propice, aurait subrepticement coupé les rameaux des ceps de son rival; à la grande confusion du compère, la vigne saccagée voyait l'année suivante multiplier sa récolte.
Il est certain qu'un tel usage est de tradition immémoriale dans les régions vinicoles. Au moyen âge, la taille était généralisée dans notre région. Nombreux sont les calendriers sculptés aux portails des églises qui le rappellent. Ainsi à St Léger de Balson, près de Villandraut l'un des personnages peints à la voûte centrale du choeur du vieux sanctuaire, figure le mois de mars taillant sa vigne avec une serpe.
Vers la fin de l'hiver on procède au renouvellement des pieux qui soutiennent les ceps et avant le départ de la sève on remplace les pieds morts ou trop chétifs. C'est aussi à cette époque qu'on procède aux plantations et au greffage.
L'ébourgeonnement
ou épamprage se pratique au printemps et consiste à enlever toutes les jeunes
pousses qui se développent sur le vieux bois.
En
été, des femmes procèdent au rognage. Il s'agit de couper les extrémités
des sarments qui sont trop élevés ou qui se développent latéralement et de
lier les rameaux avec un brin d'osier pour les retenir dans la ligne des ceps.
Les
rangs de vigne ont alors un aspect régulier qui plaît à l'oeil et la charrue
ainsi que son attelage peuvent passer librement.
Au début de l'automne on pratique l'effeuillage qui permet à l'air et aux rayons de soleil de pénétrer jusqu'aux grappes et de hâter la maturité.
Les
ennemis de la vigne.
La gelée.
Une gelée peut détruire en une nuit, ces boutons roses à peine éclos, ces mannes nées de la veille, si tendres, si fragiles. En ce même mois d'avril la lune rousse, celle qui gèle, roussit, mortifie les plantes, d'après l'opinion populaire, inspire les plus vives craintes.
A
cette époque critique, pendant les nuits claires, calmes, transparentes, la
terre rayonne vers l'infini sidéral la chaleur dont une journée chaude l'a
imprégnée. Le brusque refroidissement du sol et de la température... provoque
des désordres mortels dans les tissus végétaux.
Dès que la température s'abaisse au-dessous de zéro centigrade, l'alarme est aussitôt donnée. Le canon municipal mêle sa voix au tocsin des cloches et chez les particuliers des baromètres spéciaux, d'une grande précision, avertissent, par des sonneries automatiquement déclenchées par le froid périlleux du danger imminent du gel.
Quelques
minutes suffisent aux vignerons chargés de cette mission pour prendre les
dispositions habituelles. Des lueurs multiples S'allument soudain dans les vallées.
La fumée épaisse du goudron ou "coltar" enflammé et grésillant
dans de larges chariots, lentement promenés à travers les vignes, enveloppe
les bas-fonds d'un nuage dense et d'odeur bitumeuse....
Les brasiers plus nombreux de minute en minute, élèvent
vers le firmament leurs nuages de fumée opaque.
Les vignerons activent les feux salutaires dont les
effets bien souvent n'arrivent pas à protéger les ceps menacés. Il arrive, en
effet, à l'heure décisive de l'aube où le refroidissement atteint son
maximum, qu'un vent violent parfois s'élève; il disperse alors malignement le
nuage sauveur qui flottait de par sa densité à quelques mètres du sol. Sans
écran protecteur, les mannes et souvent les ceps eux-mêmes, les arbres fruitiers, les
fleurs d'agrément, les parures et ornements des vignobles, des vergers, des
jardins subissent alors les atteintes morbide de la déconcertante gelée.
Alors, les viticulteurs rentrent chez eux, dans la nuit perfide et complice, désolés, navrés.... Au matin, les dégâts apparaissent ternes et roides, la plupart des bourgeons, hélas ont été gelés avec eux tombent les espérances... Cruelles désillusions qui attristent souvent ces jours printaniers.
Les
maladies de la vigne.
Il
n'existe pas de maladies particulières aux vignobles Bazadais.
Comme
ailleurs, les champignons (mildiou, black-rot, oïdium, anthracnose), et les
insectes (phylloxéra, cochenille et surtout cochylis et eudémis) font tous les
ans des ravages que le vigneron s'ingénie à conjurer.
Au début de l'été les maladies cryptogamiques sont susceptibles de se déclarer.
Les traitements préventifs s'organisent à la hâte.
Dans les vignobles, des équipes de vignerons munis de soufflets spéciaux
saupoudrent les grappes du soufre qui les garantira contre les insectes déprédateurs.
Pendant cinq semaines les soufreuses
mécaniques pousseront dans l'air sonore de l'été leur plainte musicale
et déchirante.
Puis, d'autres équipes d'ouvriers, à l'aide de pulvérisateurs spéciaux répandent sur les feuilles et les grappes adolescentes la vapeur bleue de sulfate de cuivre, arme redoutable contre le mildiou, la cochylis et le black-rot...
Ces divers traitements sont répétés par sept fois à de
courts intervalles et lors des changements de température où l'air, chargé
d'une humidité superflue, devient l'agent propagateur des fléaux viticoles.
Le
mildiou, black-rot sont particulièrement redoutables à certains moments du
printemps et de l'été, surtout par temps humide. En 1904, le comice agricole
de Cadillac sur Garonne, avait confié à M. Capus, alors professeur
d'agriculture, aujourd'hui sénateur et ancien ministre de l'agriculture, la
direction d'une station d'avertissement, crée par lui, chargée d'expédier au
moment propice à toutes les communes du département un télégramme ainsi conçu
: Sulfatez immédiatement. Celle
station qui a rendu et rend encore de grands services aux viticulteurs est
installée aujourd'hui au domaine de la Grande Ferrade. à Villenave d'ornon.
Avec des soins incessants et ces interventions judicieuses, on arrive aujourd'hui à lutter victorieusement contre les maladies cryptogamiques.
Un autre fléau : La grêle.
En été, la grêle cause souvent d'importants ravages anéantissant en quelques minutes le travail de toute une année. Il est bien rare qu'un été se termine sans qu'une ou plusieurs communes du Bazaidais n'ait été éprouvée. Les grêlons atteignent parfois une grosseur énorme.
En 1727, certains pesaient un kilogramme, ils saccagèrent, hachèrent trente lieues de pays. Les postillons et les chevaux de poste surpris par la rafale, arrivèrent au relais de Villandraut ensanglantés et mourants. De nos jours, des postes de fusées ou de bombes paragrêles sont établis dans tous les vignobles culminants; l'éclatement de ces projectiles, dans l'atmosphère, provoque la résolution des nuages en pluie; les averses tombent alors inoffensives et le plus souvent bienfaisantes.
LA
VENDANGE. LE VIN.
En
Bazadais, la vendange se fait ordinairement dans la première quinzaine
d'octobre. Comme il existe très peu de grandes propriétés (sauf en Sauternais),
la vendange est faite par la famille du viticulteur, aidée par quelques femmes
de journée. Les raisins sont coupés à l'aide de ciseaux spéciaux (petits sécateurs)
et posés dans un panier en bois "lou bastot", vidé quand il
est plein dans la "baste" ou un homme, les manches retroussées,
procède à un premier écrasement des grains.
Les bastes chargées sur la charrette à boeufs sont portées au cuvier, les raisins sont foulés puis versés dans la cuve où ils fermentent plusieurs jours, le jus, la peau et la grappe étant mêlés. Quand la fermentation est terminée on coule le vin et on le met dans des barriques. Ainsi se fait le vin rouge.
La fabrication du vin blanc est différente. Le raisin n'est pas mis dans la cuve. Au sortir du pressoir, le jus est versé directement dans les fûts où se fait la fermentation.
Fin octobre, tout est terminé, Les cuves et pressoirs étant bien nettoyés, les barriques bien alignées dans le cellier voisin, le viticulteur pense déjà à la récolte de l'année suivante et il envisage avec courage les durs travaux et les nombreux soucis qui la précéderont et qui ne tarderont pas à recommencer. Et puis tant d'autres occupations l'attendent.
Les bonnes coutumes. qui en matière agricole, ont volontiers force de loi, sont souvent condensées en dictons pittoresques et sentencieux, tels que:
Rabaisser
la vigne, c'est la rajeunir.
Le
succès du vigneron est dans sa serpe.
Employer
engrais, c'est garnir ses chais.
Bêcher
avant le bouton, gagne la façon.
Vigne en fleur ne veut voir ni vigneron ni seigneur.
Des siècles successifs de rigoureuse pratique ont formellement démontré l'exactitude de ces vieilles formules qui, toujours neuves et rajeunies par chaque cycle printanier, complètent chez nous la science viticole de la façon la plus heureuse.
Buvons
du vin de chez nous
LE
SAUTERNAIS LES VINS DE
SAUTERNES.
Douzième
leçon
1.
Le
Sauternais géographique.
2.
Le vin de
Sauternes.
3.
Les
grands crus.
4.
Les
vendanges dans le Sauternais.
5.
L'Ecole
d'agriculture et de viticulture de Bommes.
LE
SAUTERNAIS GEOGRAPHIQUE.
Le
Sauternais, c'est la région située autour du Ciron, à l'extrémité de son
cours. Vers la Garonne, qui lui sert de limite au nord, le
sol est relativement
plat et uni: c'est le Preignacais et le Barsacais. Plus au sud, le Ciron
termine à l'ouest une série de plateaux et de collines aux pentes douces qui
couvrent les communes de Fargues, de Sauternes et de Bommes.
La
forêt landaise qui commence aussitôt, forme à l'est et au nord une barrière
infranchissable, à cette région privilégiée.
Le
Sauternais n'est pas très étendu. Il ne comprend que cinq communes groupées
autour de la plus renommée: Sauternes.
D'après la délimitation officiellement établie par la Chambre de Commerce, en 1855, ont seuls le droit de porter le nom de Vins de Sauternes, les vins récoltés sur le territoire de Barsac, de Preignac, de Fargues, de Bommes et de Sauternes, dont le sol de constitution identique (quant aux principes essentiels et particuliers à cette contrée) ne forme géologiquement qu'un seul et même terroir.
C'est sur ces cinq communes que sont groupés les grands crus ainsi
classés :
Sauternes |
|
Premier grand cru. | Château Yquem. |
Premier cru. | Château Guiraud. |
Deuxième cru. | Château Fillot. |
Deuxième cru. | Château d'Arche. |
Deuxième cru. | Château Lamothe. |
Bommes : | |
Premier cru. | Château Reyne Vigneau |
Premier cru. | Château Latour Blanche. |
Premier cru. | Château Lafaurie Peyraguey. |
Premier cru. | Château Rabaud. |
Premier cru. | Clos
Haut Peyraguey. |
Fargues: |
|
Premier cru. |
Château |
Preignac |
|
Premier cru. | Château de Suduiraut. |
Deuxième cru. | Château de Malle. |
Deuxième cru. | Château
Romer. |
Barsac : |
|
Premier cru. | Château Coutet. |
Premier cru. | Château Climens. |
Deuxième cru. | Château de Myrat. |
Deuxième cru. | Château Doisy. |
Deuxième cru. | Château Broustet Nérac. |
Deuxième cru. | Château Caillou. |
Deuxième cru. | Château Suau. |
Il
existe aussi de nombreux crus non classés.
Tous ces vins connus et appréciés dans tout l'univers, possèdent des qualités
incomparables. Ils sont uniques au monde.
D'une
belle couleur jaune paille, transparents, onctueux, à la fois capiteux et
soyeux, veloutés, d'une finesse extrême et d'un arôme délicat, ils plaisent
infiniment au palais.
Le
vin de Sauternes est plus qu'un vin, c'est une liqueur, c'est, a dit un poète.
Un rayon de soleil concentré dans un verre.
Ses
belles qualités, qui lui font une si grande renommée, il les doit à plusieurs
causes: à la constitution du sol qui le produit (chaux, silice, argile, fer),
à l'heureuse exposition au soleil des terrains du Sauternais, au choix
judicieux des cépages (sémilion, sauvignon, muscadelle), aux procédés spéciaux
de taille, de cueillette du raisin et de vinification, mais aussi à la grande
habileté et à l'expérience des viticulteurs.
Mais
qu'une des causes primordiales citées plus haut vienne à manquer, l'harmonie est rompue et il n'est pas étonnant que les
agriculteurs audacieux ou jaloux qui ont essayé de transporter ailleurs les
glorieux plants et les méthodes ancestrales de culture du Sauternais, n'aient
obtenu qu'un vin médiocre, dépourvu de ses qualités natives.
Dans
son magnifique ouvrage sur Sauternes, dont nous avons déjà cité plusieurs
passages, M. Ch. Dormontal raconte que le prince de Condé lui même, grand
amateur d'un vin aujourd'hui célèbre, se fit expédier des plants d'un cru réputé
et les fit cultiver dans son domaine de Chantilly.
Lorsque
les vendanges furent faites, selon les méticuleuses et précieuses méthodes
servilement copiées, puis le vin impatiemment dégusté, la déception du
Prince n'avait d'égale que son immense popularité. A son tour, il jura, mais
un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus. Et il devait se consoler en faisant désormais,
chaque année, sa provision même de nectar au cru d'origine. Enfin, lorsque le
Prince manifesta sa surprise et son insuccès au propriétaire, celui-ci,
viticulteur expert et avisé, lui répondit, non sans malice:
"Pardieu,
Monseigneur ! vous aviez oublié d'apporter aussi la terre et le soleil."
"Grâce à la Providence qui donna à notre province ce privilège inestimable et nous crut dignes d'en bénéficier laborieusement, la terre bordelaise comme le soleil de Provence est une, chose intransportable." (Ch. Dormontal)
LES
VENDANGES DANS LE SAUTERNAIS.
Dans
le Sauternais, les vendanges se font toujours plus tard que dans les autres régions
viticoles. Elles ne s'achèvent pas avant la mi novembre. Elles nécessitent un
personnel nombreux que les propriétaires font venir des régions voisines,
principalement des Landes.
Pour donner au vin plus de douceur, plus moelleux, pour obtenir un liquide plus liquoreux, on attend que les rayons du soleil aient commencé à sécher les grains, à les confire. Les grains ne sont cueillis que lorsqu'ils sont trop mûrs. Un ferment, le botrytis cinerea, ou pourriture noble, les a couverts d'une légère moisissure.
Mais écoutons M. Charles Dormontal:
"Dans
l'embrasement des midis et la langueur torride des couchants, ces grappes ambrées,
émeraudes précieuses aux miroitements diamantins, semblent avoir atteint
l'apogée de leur splendeur. Or, ainsi mûres, éclatantes, diaphanes, elles ne
satisfont point encore la célèbre méthode
Sauternaise qui exige une surmaturation ou concentration complète du jus de
raisin, provoquée par le botrytis ou plus scientifiquement: le micoderma
acoetis; chaque grain, réduit au cinquième de son volume primitif, se présente
sous l'aspect d'un raisin de
Corinthe, dont la pellicule plissée, ratatinée, rôtie, n'emprisonne plus,
sous sa peau terriblement chiffonnée, qu'un résidu de confiture.
Par
cette, méthode spéciale de vinification, on se rend compte combien la
perfection dans l'art est préférée à l'abondance. Aussi le rendement moyen
des récoltes oscille entre un et deux tonneaux au maximum à l'hectare, tandis
que dans le Médoc, les Graves, l'Entre deux Mers, puis la Bourgogne et la
Champagne, la production atteint quatre, six ou huit tonneaux pour la même
superficie. Le Sauternais, difficultueux dans son élaboration et positivement
rare, est fatalement, le vin cher."
Les vendangeurs procèdent à une première cueillette; munis de leur sécateur, ils s'arrêtent à chaque pied et ne coupent que les grains confits, ayant atteint ce degré de maturité qui leur donne un goût exquis. Il ne faut pas qu'ils aient commencé à pourrir; on prend bien soin aussi de rejeter tous les grains grillés, c'est à dire séchés avant d'être mûrs.
Ce
premier tri donnera un jus très concentré qui fournira un vin appelé crème
de tête, véritable sirop contenant presque la moitié de son poids de sucre.
Mais tous les grains n'atteignent pas en même temps ce degré de maturité. Le premier tri fait, on en commence un second durant lequel on ne prend encore que les grains confits et les grains qui se sont un peu pourris depuis la première cueillette.
Le vin que l'on obtient, le vin de tête, est habituellement très
doux et très fin.
Le
troisième tri qui n'est commencé que lorsque l'action des rayons du soleil et
de l'humidité des nuits de la fin octobre a favorisé la maturité et la
pourriture du raisin, donne le vin du centre souvent très liquoreux.
On
fait encore plusieurs cueillettes et la dernière, durant laquelle on enlève
tout ce qui se trouve encore sur les pieds, donne le vin de queue.
Naturellement,
on fait son possible pour avoir peu de vin de cette qualité.
Pour
obtenir des vins d'une grande richesse, rien n'est négligé, les grains ne sont
cueillis que secs et chauds; on ne craint pas d'interrompre les vendanges par
temps de pluie ou de brouillard et la cueillette ne commence qu'assez tard dans
la matinée.
Les
frais supportés par les propriétaires de vignobles sont donc très élevés.
De plus, la quantité de jus est fortement diminuée du fait que les grains ont
commencé à sécher sur pied. La qualité est obtenue au détriment de la
quantité.
Le
Sauternais qui s'étend sur environ six mille hectares produit annuellement
quarante mille hectolitres de vin environ.
La
cueillette des raisins est surtout faite par des femmes, des jeunes filles, des
jeunes gens; les hommes transportent les bastes, les chargent sur les charrettes
qui les conduisent au cuvier.
Les procédés de vinification sont toujours les mêmes depuis très longtemps, mais comme l'a dit un éloquent professeur girondin: il n'y a pas à parler de routine quand on juge sagement qu'on s'est fixé dans la perfection.
Cependant,
le raisin était autrefois foulé aux pieds dans les pressoirs et le jus était
versé dans les barriques où il fermentait.
Le
jus se rend dans une grande citerne cimentée et vitrée. Il est réparti le
jour même dans les barriques.
La
presse à vis de jadis qui pressait la grappe après le foulage aux pieds est
remplacée par des presses hydrauliques. Le principe est le même qu'autrefois;
les machines permettent simplement d'aller plus vite et d'employer moins de
monde.
Le
vin mis dans les barriques y fermente pendant plusieurs semaines. Il se débarrasse
de toutes ses impuretés qui sortent par l'ouverture supérieure du fût.
Le
vin de Sauternes n'est mis en bouteilles qu'au bout de trois années, durant
lesquelles il est l'objet de grands soins. Des manipulations délicates sont
dirigées par le chef de cave qui passe ordinairement toute sa vie sur le même
domaine.
Il est très intéressant de visiter les cuviers des grands crus où pressoirs et cuves sont vernis et brillent comme des meubles; les chais où sont alignées par année de récolte d'innombrables barriques dans une demi obscurité qui invite au silence et au recueillement devant ce roi des vins blancs.
Les
bouteilles bordelaises, au beau reflet jaune d'or, remplies à la propriété,
bouchées, capsulées, étiquetées, enveloppées d'une fine chemise de papier
transparent et d'un étui de paille, sont enfermées dans des caisses par six ou
par douze. Conduites aux gares de Preignac et de Barsac, de Langon, elles vont
porter dans le monde entier le renom de la France et de ses incomparables vins.
La fin des vendanges donne lieu dans tout le Sauternais à de grandes fêtes groupant tout le personnel du domaine. La fête des "acabailles" comprend un grand banquet, suivi d'un concert improvisé et d'un bal qui se prolonge très tard dans la nuit.
L'ECOLE
DE VITICULTURE DE BOMMES
L'Ecole
de viticulture et de vinification de Bommes fut fondée à la fin du siècle
dernier au domaine de La Tour Blanche que son propriétaire, M. Orisis, légua
à sa mort à l'Etat, sous réserve que l'Etat y donnerait un enseignement
pratique populaire et gratuit de viticulture et d'œnologie.
Cette école s'adresse de préférence aux jeunes gens sortis de l'école primaire et occupés à un titre quelconque aux travaux agricoles ou viticoles des exploitations de la région.
Des
leçons y sont données le jeudi et le dimanche durant deux périodes d'hiver
consécutives de quatre mois chacune.
Pour s'inscrire, il suffit d'adresser sur papier libre une demande à M. Lafforgue, directeur des Services agricoles de la Gironde, 2, rue Lafayette, à Bordeaux.
Il y a quelques années, M. le Vicomte de Roton, a découvert dans le sol de sa propriété de Rayne Vigneau, à Bommes/Sauternes, un gisement de pierres précieuses d'une grande richesse et d'une extrême variété : jaspes onyx, marbres siliceux, agates, etc., etc., qui, taillés, possèdent comme couleurs et comme dessins les qualités des plus beaux minéraux connus.
Ces minéraux sont tenus par la plupart des savants minéralogistes comme originaires du Massif Central et qualifiés par tous d'admirables. La collection de Rayne Vigneau compte dix mille pièces dont douze cents taillées. Elle est unique au monde.
LA
CULTURE DU TABAC
Historique.
Réglementation.
Le
tabac est cultivé dans la vallée de la Garonne (Bazadais et Réolais), depuis
une époque assez reculée. Cette plante, importée d'Amérique vers le milieu
du 17e siècle, ne tarda pas à être répandue dans notre région.
Au
début du 18e siècle, vers la fin du règne de Louis XIV, certains planteurs
obtenaient déjà près de deux mille kilos de feuilles sèches par hectare,
malgré l'inexistence des engrais à cette époque.
En 1719, sous Louis XV, un arrêté du Conseil d'Etat interdit la culture du tabac en France, sous prétexte que les terres qui y étaient consacrées pourraient être employées plus utilement pour le royaume.
En
réalité, c'était pour favoriser une entreprise, financière, la Compagnie des
Indes Occidentales qui exploitait la Louisiane, en Amérique. Cette compagnie ne
réussit pas à produire du tabac en Louisiane et la France dut acheter à
l'Angleterre tout le tabac utilisé dans notre pays; deux cents millions de
livres passèrent ainsi de France chez nos voisins.
Une
importante source de revenus disparut ainsi de notre région.
La
culture fut reprise en 1789 lors de la suppression des privilèges et elle fut
mise en régie en 1855.
Pour avoir le droit de se livrer à la culture du tabac, pour devenir planteur il faut obtenir l'autorisation de l'administration. Chaque planteur n'a droit qu'à un nombre de pieds déterminé et les différentes opérations de culture sont surveillées par des employés de la régie qui comptent, dans les champs les pieds et les feuilles.
La
culture du tabac est autorisée en France dans 32 départements.
Dans le Bazadais les cantons d'Auros, de Bazas, de Langon, de Grignols sont seuls autorisés à planter. Il y a deux ans on a fait un essai de plantation à Saint symphorien. Il a donné de bons résultats.
Semis
et plantation.
Le
tabac végète pendant 120 jours au plus, en plein été. Pendant ce temps,
relativement court, les feuilles doivent atteindre un grand développement. Il
est donc nécessaire que la plante dispose d'une grande humidité et d'aliments
importants et immédiatement utilisables.
Pour
retenir l'humidité du sol, des labours profonds sont indispensables pendant
l'hiver et aussi des façons plus superficielles souvent répétées pendant l'été.
En hiver, on introduit dans la terre beaucoup de fumier et avant la plantation des engrais chimiques en quantité considérable.
Les semis se font dans la première quinzaine de mars, en pépinière, presque toujours dans le jardin de la ferme. La graine, très petite, est mélangée au sable, ce qui rend l'éparpillement plus régulier. Les semis sont aussi recouverts d'une mince couche de sable.
La
plantation se fait au mois de mai ou au début de juin. On doit choisir les
pieds les plus trapus, à feuilles vertes, à tiges épaisses, à racines
abondantes.
Pour obtenir un alignement rigoureux on emploie une chaîne à mailles espacées de quarante centimètres. A l'aide d'un plantoir de bois, on met en terre un pied de tabac en face de chaque maille. Les lignes sont écartées de soixante dix centimètres.
Soins
culturaux
Des
binages fréquents ont pour but d'éviter la disparition de l'eau emmagasinée
pendant l'hiver.
En
juillet, quand le tabac a acquis un certain développement, on dégarnit le pied
en enlevant les feuilles de la base sur une longueur de dix à quinze centimètres.
On
procède plus tard à l'écimage qui empêche la formation de la fleur et on
supprime les bourgeons qui se forment à l'aisselle des feuilles.
De
cette façon, il ne reste pas plus de huit à dix feuilles, chiffre fixé par le
règlement.
Les pieds mères qui doivent fournir les graines pour l'année suivante sont conservés par les planteurs désignés chaque année par l'administration. Ces pieds choisis parmi les plus vigoureux, ne sont pas écimés et fournissent les graines pour les semis de l'année suivante.
Les
ennemis du tabac
Les
planteurs de notre région redoutent surtout un insecte: le vert gris qui ronge
les jeunes plantes au voisinage du collet et un parasite végétal, l'orobanche
rameuse, parasite des racines. Le ver est combattu en plongeant dans un bain
arsenical le plant de tabac avant sa mise en place (il faut éviter de mouiller
les racines).
Le seul moyen d'éviter les ravages de l'orobanche rameuse, c'est de semer de très bonne heure afin de pouvoir récolter dès le 15 août, époque à laquelle le parasite se développe.
La
rouille, le blanc, l'anthracnose sont aussi redoutés.
Il
y a peu de temps, une maladie nouvelle a fait son apparition dans la région.
Elle est due à un cryptogame. Le feu sauvage, ainsi appelle-t-on ce nouveau fléau,
a déjà fait de grands dégâts.
Des
cultivateurs ont été obligés d'enfouir une grande partie de leur récolte.
Récolte
et préparation des feuilles
C'est
dans le courant de septembre que la récolte s'effectue généralement.
Ils
sont ensuite portés au séchoir où ils sont attachés le long de cordes fixées
au toit et pendent en guirlandes.
Les manoques sont mises en balles de deux cents et vers janvier/février, portées à l'entrepôt de Langon, qui, quelques mois plus tard, les livre à la manufacture de tabac de Bordeaux.
"L'entrepôt
de Langon construit en 1905, fut, agrandi eu 1929 Le magasin occupe une
superficie de 22.000 mètres carrés environ, il occupe plus de 100 ouvriers et
ouvrières.
En
1932, il a reçu 2.500.000 kgs de feuilles provenant de 4 départements:
Gironde, Landes, Hautes Pyrénées,
Haute Garonne et fournies par 2.300 planteurs.
Cette
production a été payée plus de vingt millions de francs."
Les
diverses phases de la culture du tabac, sa préparation exigent un travail
constant et des frais assez élevés. Aussi les planteurs du Bazadais négligent-ils
forcément les autres productions de la ferme.
La
culture du tabac, étant d'un bon revenu, les cultivateurs des côteaux et de la
vallée de la Garonne qui s'y adonnent, sont de plus en plus nombreux. Dans bon
nombre de communes des cantons de Bazas et d'Auros, tous les cultivateurs sont
planteurs.
Le
Bazadais y consacre environ mille hectares, ainsi répartis
Canton
d'Auros : 540 hectares.
Canton
de Langon : 230 hectares.
Canton
de Bazàs : 106 hectares.
Canton
de Grignols : 120 hectares.
Canton
de Saint Symphorien : 3 hectares. (Statistique de 1932).
L'ELEVAGE DANS LE
BAZADAIS, LA RACE BAZADAISE
Le
Bazadais est un centre important d'élevage de vaches laitières, de moutons, de
porcs, de volailles. Il est le berceau d'une race de bovidés : la race
Bazadaise bien connue et appréciée en Gironde et dans les départements
voisins.
Les
prairies. Les éleveurs Bazadais nourrissent surtout leurs bestiaux avec l'herbe
des prairies naturelles qui prennent un développement de plus en plus grand
dans toute la région, même dans la forêt landaise où elles s'accroissent
tous les jours au détriment des champs.
Elles sont surtout nombreuses et productives sur la partie inférieure des pentes des côteaux, au fond des vallées du Beuve, de la Bassanne, du Ciron, des petits ruisseaux et sur les bords de la Garonne.
Les
pâturages, les herbages, les pacages occupent également une place importante.
Sur
les plateaux et dans la vallée de la Garonne on trouve aussi des prairies
artificielles (vesce, luzerne, trèfle incarnat) et on fait un grand usage pour
l'alimentation des bovins, des fourrages verts, semés dans les "jouales" (trèfle
violet, seigle, avoine, maïs fourrager cultivé aussi dans la lande) et de
plantes racines (betteraves, navets, rutabagas).
Prairies et pâturages du Bazadais. |
|||
Superficie en hectares (nombres arrondis, Statistique de 1932) |
|||
Cantons | Prairies naturelle | Prairie artif. | Pâturages, pacages |
Bazas | 2.900 | 210 | 720 |
Auros | 2.200 | 100 | 530 |
Langon | 2.200 | 120 | 460 |
Grignols | 1.580 | 60 | 380 |
St Symphorien | 800 | 10 | 450 |
Captieux | 600 | 110 | 5.800 |
Villandraut | 220 | 60 | 570 |
Total | 10.500 | 670 | 8.910 |
LES
BOVIDÉS
Les
bovidés sont très nombreux dans tout le Bazadais sur les côteaux, dans la
vallée de la Garonne et même dans la région landaise où les troupeaux de
vaches prennent une importance de plus en plus grande, remplaçant les troupeaux
de moutons d'autrefois.
Sur les côteaux et dans la vallée, autour de Bazas, d'Auros, de Castets et de Grignols, on élève aussi les boeufs et les vaches de boucherie et de travail (race garonnaise surtout).
A Cazats, par exemple, à quelques kilomètres au nord de Bazas, sur 238 boeufs et vaches, la moitié est pour le travail (races Bazadaise et Garonnaise), l'autre moitié est constituée par des vaches laitières (bretonnes et hollandaises).
De
nombreux veaux de deux à trois mois sont vendus pour la boucherie aux marchés
de Bazas, d'Auros, d'Aillas, de Grignols et dirigés sur Bordeaux.
Le
lait qui n'est pas consommé sur place est ramassé tous les jours par des
camions qui le portent aux beurreries de Bazas, de Préchac, de Cazats, de Léogeats,
de Noaillan et de Bordeaux.
Sur
les plateaux argileux, la terre étant très dure à travailler, chaque métairie
possède une paire de forts boeufs de travail (garonnais ou limousins) doublés
d'une paire ou deux de vaches également destinées aux transports et labours.
Il se fait dans toutes les foires de notre région un grand commerce de boeufs, de vaches, de veaux.
LA
RACE BAZADAISE
Le berceau de cette race est exclusivement girondin et bien limité à cette région
Bazadaise dont l'aspect pittoresque, les caractères géologiques, les méthodes culturales présentent un cachet vraiment particulier. Bien que l'origine de cette race soit discutée et que certains auteurs, peut être insuffisamment documentés, voient dans le Bazadais, des origines appartenant au Garonnais, au Gascon et au Saint Gironnais, un observateur averti ne peut trouver ni dans l'ossature, ni dans le cornage, ni dans la robe, ni dans la conformation, ni dans le tempérament du Bazadais, des caractères de proche parenté avec l'une ou l'autre de ces races.
Cette race bovine paraît implantée là, telle que nous la voyons, depuis très longtemps: là est son berceau et elle paraît tout à fait bien adaptée à la configuration du sol et aux nécessités économiques d'un pays qui forme dans ce département, une petite province de quelques lieues carrées à caractères bien tranchés.
Si nous confrontons le standard de la race et celui des autres races qu'on lui apparente, la plupart des caractères l'en éloignent.
Cette tête courte et légère, ce profil à peine convexe, ce chignon arrondi à corne elliptique sortant horizontalement avec sa teinte safranée, la ligne droite du dos continuée par un sacrum horizontal, la queue attachée dans la ligne du sacrum, une culotte parallélépipédique, la robe grise miroitée du taureau si différente de la Gasconne, les muqueuses claires, rien ne justifie la filiation à l'un des bovins qu'on lui donne pour ancêtre.
Le Bazadais est une véritable race à laquelle les éleveurs de ce pays se sont voués depuis plus d'un siècle, qu'ils ont réussi jusqu'en ces dernières années à protéger des métissages et croisements inconsidérés.
Malheureusement, trois écueils sont apparus depuis quelque temps qui risquent d'annihiler un si bel effort, si des mesures ne sont pas prises à bref délai:
1-
la race, grâce à ses qualités pour l'exploitation forestière, ayant débordé
dans les Landes, les éleveurs de ce département ont, pendant quelque temps,
acheté les meilleurs taureaux du Bazadais.
2 En raison des hauts cours atteints par les veaux de
boucherie, beaucoup de métayers ont voulu réaliser et n'ont pas conservé les
géniteurs mâles, bien racés, qu'il est nécessaire de réserver pour la
reproduction.
3
La sélection n'a pas été aussi rigoureuse qu'elle aurait dû l'être et les
derniers concours accusent une proportion trop élevée de sujets insuffisamment
purs.
Un effort de redressement est nécessaire et il faut faire confiance à l'éleveur Bazadais, un des meilleurs soigneurs qui soit en France et très fier de son bétail, pour l'amener à reconstituer l'ancien effectif des géniteurs de race pure.
C'est
qu'aucun bovin n'est capable de fournir à cette région des attelages de vaches
qui, malgré leur taille moyenne (550 kilos), peuvent débarder dans les bois
des fardeaux de 4.000 kilos.
Quant
aux boeufs, ils ont hérité de l'énergie de la race et arrivent en taille et
en poids à égaler les sujets de grande race: 800 à 900 kilos.
Par
leur conformation, la musculature du dos, du rein et de la cuisse, les Bazadais
sont estimés de la boucherie; ils s'engraissent
facilement et donnent une viande rapide et très appréciée, leur
graisse est seulement un peu jaune.
Quant
aux veaux, ils s'élèvent et engraissent facilement et donnent une chair très
blanche. Ils arrivent au poids de 100 kilos à 10 semaines et sont très appréciés
de la boucherie, soit à Bordeaux, soit à Paris.
Pour
arriver à ce résultat, le lait de la mère, médiocre laitière, est
insuffisant et on lui adjoint généralement une bretonne.
Les
Bazadais forment un effectif de plus de 10.000 têtes.
Les
principaux centres d'élevage du Bazadais pur sont en Gironde les cantons de
Bazas, de Captieux et de Grignols.
L'amélioration
de la race est dirigée par un Herd Book, subventionné par l'Etat et le département.
Un concours itinérant, où les animaux sont appréciés par pointage et un
concours du deuxième degré ont lieu chaque année.
LA
RACE OVINE
A
l'époque où le Pin maritime n'avait pas encore envahi la lande, la ressource
principale de la région landaise était l'élevage des moutons et des brebis.
Dès
son enfance et toute sa vie, le berger landais conduisait dès l'aube ses brebis
dans les immenses étendues incultes transformées en marécages, durant les
trois quarts de l'année.
Pour surveiller ses bêtes souvent cachées sous l'épaisse végétation sauvage et pour les rassembler plus facilement parmi les lagunes, il était monté sur des échasses et toute la journée, assis sur un long bâton, il filait la laine ou tricotait, quand il ne jouait pas, pour se distraire, de la cornemuse, pendue à son cou.
Le
soir, il enfermait ses bêtes dans la bergerie au toit de chaume perdue dans les
bruyères et regagnait à grandes enjambées sa demeure parfois très éloignée,
maisonnette basse, de construction grossière, où il ne restait que la nuit.
Sa condition était misérable et sa vie bien solitaire et bien monotone. Toute son
existence se passait dans la lande et ses seuls compagnons étaient son troupeau
et son chien, son bon chien qui souvent l'aidait à défendre ses bêtes contre
les loups.
La lande marécageuse n'existe plus elle a fait place à la forêt de pins et l'échassier landais a disparu, le berger est devenu gemmier, le roi de la lande a été détrôné par le roi de la forêt.
Il y a encore des troupeaux, mais en nombre beaucoup moins grand qu'autrefois et cela pour plusieurs raisons : la difficulté de trouver des bergers a obligé beaucoup de propriétaires à vendre leurs moutons, l'herbe pousse peu dans les bois et les terrains incultes devenant de plus en plus rares, il a fallu se débarrasser des bêtes faute de pacages où les mener paître; enfin on reproche aux moutons de manger les jeunes pousses des pins et d'empêcher le développement de la forêt.
Mais, on ne se rend pas suffisamment compte que le mouton est le meilleur débroussailleur et le plus économique et surtout que son fumier très fertilisant, manque énormément aux champs de seigle et de maïs, enfin, dans la période de mévente des bois et des résineux qui se prolonge, le revenu du bétail ovin ne serait pas à dédaigner.
Pour ces diverses raisons les Landais devraient, reconstituer
leurs troupeaux. La race Landaise est rustique et bonne marcheuse, mais peu précoce.
On ne trouve guère que des brebis très peu de moutons, brebis blanches à tête
nuancée de jaune, de taille moyenne. Le rendement en viande est inférieur à
celui des autres races françaises et la toison est de faible valeur.
Mais il est possible d'obtenir une amélioration en viande et
en laine par un croisement avec la race Berrichonne, par une nourriture
meilleure et plus abondante, par la destruction des parasites et le traitement
des maladies contagieuses (tuberculose, piétin et fièvre aphteuse).
Les
troupeaux sont exploités à peu près exclusivement pour la fourniture du
fumier et la production des agneaux. La brebis landaise est bonne nourrice.
Chaque année, on conserve un certain nombre d'agnelles pour remplacer les vieilles mères et les brebis vendues à la boucherie à l'époque des vendanges.
LES
TROUPEAUX TRANSHUMANTS.
Chaque année, des troupeaux descendent des Pyrénées et viennent hiverner chez nous. Ils arrivent vers la fin octobre et repartent au mois d'avril et de mai. Ils s'installent généralement dans les vignobles de la vallée de la Garonne et des côteaux. Les propriétaires les logent, fournissent la litière et profitent du fumier. Malheureusement ces troupeaux apportent avec eux et disséminent la fièvre aphteuse qu'ils ont prise en cours de route.
L'ESPECE
CHEVALINE
Grâce
à ses pâturages le Bazadais était autrefois un centre important de production
d'un chevaI léger de voiture ou de selle genre tarbais.
Les
progrès de la traction automobile réduisent de plus en plus cet élevage et on
n'élève plus que quelques chevaux légers autour de Bazas et quelques chevaux
de trait.
Les
mulets et les mules de moins en moins nombreux ne sont pas élevés dans la région,
ils sont achetés aux grandes foires des Landes (Saint Justin et Labouheyre).
Les ânes sont rares, ils sont importés d'autres régions ou encore d'Espagne ou d'Afrique, la plupart du temps par les nomades.
RACE
PORCINE
Les porcs sont nombreux dans tout le Bazadais. Chaque famille en élève un, deux et même trois, suivant le nombre de personnes qui vivent à la ferme. Ces porcs sont achetés jeunes aux foires de la contrée ou à des marchands qui reçoivent des animaux des diverses régions d'élevage (Pyrénées, Massif Central, Charente, Dordogne).
Quelques porcheries assez importantes se sont installées dans les centres où existent des laiteries à Léogeats par exemple. Elles fournissent les charcutiers de la région et celles de Bordeaux.
ANIMAUX
DE BASSE COUR
Il.
y a de nombreuses volailles partout. Chaque ferme en possède en moyenne de 50
à 100 têtes (poules, dindons, pintades, canards, oies). Ces volailles sont
vendues ainsi que les oeufs aux marchés et aux foires et donnent aux métayers
des revenus intéressants. La poule landaise est rustique, bonne pondeuse et sa
chair est très estimée
A
Saint Symphorien, une des communes qui élève le plus de volailles, on comptait
en 1932, environ 8.000 poules, 50 oies, 475 canards, 550 dindons, 200 pintades,
800 pigeons, 400 lapins.
A Uzeste, près de Villandraut, il y a plusieurs établissements avicoles importants.
L'APICULTURE
L'élevage
des abeilles a toujours eu, dans la région landaise surtout, un grand développement.
L'acacia,
les jardins, les prairies, la bourdaine et surtout la bruyère violette et rose
de nos landes fournissent des fleurs mellifères les plus appréciées des
abeilles.
Il n'y a pas très longtemps, on ne trouvait encore dans la
forêt que la vieille ruche, sorte de panier grossièrement tressé en forme
de vase renversé, ouvert à la base, arrondi au sommet et
étranglé aux deux tiers de la hauteur. Ce panier était rendu
hermétiquement clos par un enduit de bouse de vache et un toit de paille
ou de fougère le recouvrait.
Les abeilles se plaisaient dans ce panier et elles y déposaient une assez grande quantité de miel et de cire. Mais l'extraction était difficile, il fallait asphyxier les pauvres bêtes. Quand elles étaient toutes tombées, la ruche était vidée de son contenu; miel, cire, abeilles mortes ou endormies, couven et pollen tout était mis dans les barriques et vendu à des chiffonnier à un prix presque toujours infime.
Le miel obtenu n'était pas d'une grande valeur alimentaire présentait même souvent un goût désagréable.
Il
existe encore aujourd'hui de simples propriétaires d'abeilles, qui emploient
les vieux procédés dont nous venons de parler, mais les véritables
apiculteurs sont de plus en plus nombreux dans lande et sur les côteaux. Ils
utilisent des ruches à cadres de différents modèles et font eux mêmes
l'extraction du miel à l'aide d'un matériel perfectionné. Ils obtiennent un
miel très pur et très clair.
Le
miel de bruyère est surtout apprécié ; son goût assez accentué n'est pas déplaisant;
il convient parfaitement à la fabrication du pain d'épice et peut soutenir la
comparaison avec les meilleurs miels de France.
La
cire de notre région est très recherchée à cause de sa belle couleur et de
son parfum.
De
nombreux essaims sont recueillis. Ceux qui ne sont pas conservés pour former de
nouvelles ruches sont vendus aux pays du nord ou expédiés dans le nord de la
France.
Certains
apiculteurs se livrent même uniquement à l'élevage des essaims pour la vente.
L'élevage
dans le Bazadais. |
||||||||
Plus de 40.000 animaux sans compter les volailles. |
||||||||
Auros | Langon | Bazas | Grignols | Captieux | Villandraut | St Symphorien | Totaux | |
Chevaux < 3 ans. | 40 | 26 | 53 | 24 | 22 | 30 | 4 | 199 |
Chevaux > 3ans. | 421 | 748 | 330 | 160 | 84 | 210 | 172 | 2.125 |
Mules. | 3 | 51 | 36 | 22 | 15 | 52 | 164 | 343 |
Anes. | 18 | 110 | 86 | 6 | 3 | 39 | 23 | 285 |
Taureaux. | 40 | 17 | 46 | 17 | 11 | 10 | 12 | 153 |
Boeufs. | 637 | 406 | 200 | 82 | 20 | 69 | 115 | 1.529 |
Vaches. | 3.012 | 2.469 | 4.412 | 2.185 | 1.624 | 1.938 | 1.395 | 17.035 |
Veaux et Velles. | 1.484 | 637 | 1.135 | 1.046 | 445 | 242 | 295 | 5.284 |
Brebis. | 180 | 120 | 90 | 50 | 600 | 1.399 | 2.170 | 4.609 |
Moutons. | 35 | " | " | " | 80 | 90 | 475 | 680 |
Porcs | 1.827 | 1.423 | 2.425 | 936 | 530 | 1.232 | 840 | 9.213 |
Réalisée le 17 décembre 2003 | André Cochet |
Mise ur le Web le décembre 2003 |
Christian Flages |