Nuits du patrimoine.
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Avec la collaboration de: |
renaissance des cités d'europe" |
Barsac le 18 septembre 2004. |
Au Travers de Barsac. |
Claude
Supplisson, |
Cette évocation servira de fil rouge à
la soirée. |
La vénerie est l'art de chasser à
courre, à corps et à cris.
Elle trouve sa place dans la grande fresque de la nature,
Au même titre que bien des traditions
Qui ont su graver dans l'histoire des Hommes
La notion de patrimoine.
Voilà la raison de sa présence, ce soir, à Barsac.
Dès qu'on évoque la chasse à
courre,
Le profane imagine aussitôt
Un tableau aussi cruel que merveilleux.
Sur la palette, se mêlent l'or du faste des plaisirs princiers
Et le pourpre du sang d'un cerf en larmes tenant les abois.
Il faut bien dire que de grands maîtres comme
Van der Meulen, jean Baptiste Oudry ou Desportes,
Ont, dans leur peinture, immortalisé les laisser‑courre
De Louis XIV et Louis XV.
Mais tous ces chefs d'oeuvre restent‑ils
L'ultime marque d'une tradition à tout jamais révolue ?
En fait la vénerie et son art ont
traversé les siècles
Et demeurent une des plus pures, des plus vivantes
Tradition du patrimoine français.
Ceux qui ont le bonheur de pouvoir la
pratiquer de nos jours
Se font un devoir de maintenir son principe,
Son langage traditionnel qui noue le passé au présent,
Son code d'honneur par lequel le résultat
Doit se plier à la beauté du geste.
Tranquillement gîté dans le petit
bois de Myrat,
Un vieux brocard sait.
Ce matin, en effet la Bruyère, le piqueux de l'équipage,
A fait le bois près du château
Avec Phoebus, son fidèle chien de limier.
« Ah oui, là, mon beau Phoebus...
T'as connaissance. Là ...
Ah oui, mon valet… Ca sent bon !…
Mène ta voie mon beau ... .. Connaissance
C'est bien de lui ! .... »
C'est notre vieux brocard du bois de Myrat.
La Bruyère, ayant fait le tour de
l'enceinte,
N'a pas trouvé le pied sortant.
Il rentre au château, ou déjà,
Les chiens et les chevaux piaffent d'impatience,
Avant que ne résonne la sortie du chenil.
Le voici prêt, comme la meute, pour une course sans trêve
Dont nul ne sait encore l'issue.
D'un bond, l'animal quitte sa reposée
Et se livre aux chiens.
« Te voilà lancé, Vieux Brocard ! »
Au
petit Carretey:
Dès son lancer, notre brocard est
venu piétiner
Le petit potager de Myrat.
C'est lui qu'il arpente pour brouter, dans la nuit emperlée de rosée,
Les tendres et jeunes plants de salade
Ou les haricots verts si croquants.
Ce soir, les oreilles dressées,
Il traverse, avec un empressement inhabituel,
Les jeunes vignes prometteuses qui bordes les bois de Myrat.
Il bute au portail accueillant de Cantegril,
Longe le muret en direction du château Caillou
Dont les deux tours se devinent à peine.
Dans la brume bienfaitrice venue du Ciron.
Très vite, il gagne le bois de Perinet pour battre au change.
Il sait là deux chevrettes
Qu'il a souvent honorées au temps des amours.
II foule les gîtes, mais en vain !
Les belles seraient-elles parties se rafraîchir au ruisseau des Houndettes ?
L'inquiétude le gagne.
Il entend la meute à ses trousses
Et pour cacher sa trace, il bat l'eau.
Ramoneur, Jupiter
mènent sagement leur voie dans l'eau,
Sachant, au moindre indice, à la moindre portée aux branches.
Comprenant qu'il devrait chercher son salut ailleurs
Notre vieux brocard revient vers son lancer
Par le sentier des cent forêts, derrière le forgeron.
Il longe le Basque, coupe la route entre endoyse et mathalin,
Borde Jean Lève et rentre dans l'allée de Gravas
Ou déjà, depuis la première heure, la maîtresse des lieux
S'affaire amoureusement à la taille de ses rustiques rosiers.
Il traverse alors les vignes le long de la maison ronde
Et gagne le petit Carretey.
Au puits, un feu sur lequel bouillonne une marmite,
Ne lui dit rien qui vaille:
Cest Renée Darrieutord qui a rassemblé tous ses voisins
Pour célébrer le sempiternel rituel des Tuailles.
Notre Animal a vite quitté
l'animation du petit Carretey.
Quant aux chiens, ils se seraient bien attardés
Autour de la découpe du pauvre cochon,
Histoire de grappiller quelques raclures fraîches.
Mais leur instinct pour la chasse
Les a vite convaincus de retrouver la voie du vieux brocard.
Sautant le goudronné entre Hallet et le Bouyot
L'animal ruse à présent dans les vignes de Miaille et du Padouen.
Il double ses voies dans le petit bois de la Baquère.
La Bruyère vient de le voir.
Il saute la petite route à Saint Marc
Pour aller se rafraîchir au réservoir du Broustet
Tayaut ! .... Tayaut ! .....
Mais notre animal a du jarret
Il ne va pas se laisser prendre sans abattre toutes ses cartes,
Il rentre par le portail dans les vignes de Camperos,
Bute à la voie ferrée, recule
Et hésite devant les jardins ombragés de Menota
Où nous accueille bientôt Jean Luc Harribey
Qui a bien l'intention, ce soir,
De faire parler les vieilles pierres.
Notre vieux brocard a repris sa course
par le Château Mercier.
Dans sa fuite éperdue,
Il emprunte le goudron sur plus de deux cent mètres.
Comble de malheur pour les chiens, le boucher, dans sa livraison,
Est passé sur la voie avec sa fourgonnette,
La recouvrant généreusement d'une épaisse fumée d'échappement.
Les chiens tombent alors en défaut
Enjôleuse et Ritournelle
s'appliquent cependant
A maintenir le fil d'ariane odorant
Pas à pas, les deux chiennes, au flair subtil
Entraînent sagement les restant impuissant de la meute.
Le brocard sent à présent que ses jarrets se lassent
Il longe le mur du parc de Dudon,
Cette majestueuse demeure, malmenée par la guerre,
A retrouvé, grâce à ses propriétaires, jeunesse et dignité.
Notre chevreuil essoufflé entre dans le parc
En longeant la rutilante verrière.
En quelques bonds chancelants il parvient à se raser pour souffler,
Dans les buissons, sous les grands magnolias,
A l'insu des enfants qui s'apprêtent à célébrer
Les généreuses vendanges par leurs chants et leurs danses.
Réalisée le 17 novembre 2004 | André Cochet |
Mise ur le Web le 19 novembre 2004 |
Christian Flages |