Une filleule de Bordeaux .... |
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Rions. | ||||||||||||
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Période antérieure à 1789.
L'histoire
de la ville de Rions, « Filleule » de Bordeaux, n'a jamais été rédigée.
Ses éléments épars se trouvent dans les écrits des chroniqueurs qui se
sont occupés du passé de Bordeaux ou de la Guienne, tels que : De Lurbe,
Darnal, Ponthelier, Tillet, Gaufreteau, de Cruseau, O'Reilly, etc. Néanmoins,
les renseignements puisés à cette source ne sauraient être admis sans vérification,
car il n'est pas rare de voir ces auteurs placer un même événement à des
dates très différentes. La
Guienne militaire de Léo Drouyn constitue actuellement le relevé
chronologique le plus complet des faits principaux méritant une mention
dans les annales rionnaises. Comme sources supplémentaires et instruments
de contrôle, il y a lieu de recourir aux belles publications de la
Municipalité bordelaise (Livre des Bouillons, Livre des Privilèges,
Livre des Coutumes, Registres de la Jurade) et de consulter la très
importante collection des volumes de la Société des Archives historiques
de la Gironde, sans oublier les archives elles-mêmes de la commune de
Rions, qui renferment encore bien des
Les
Comptes rendus de la Commission des monuments et documents historiques de la
Gironde fournissent, eux aussi, d'utiles renseignements. Il y a lieu de
signaler enfin les Rôles Gascons et la Gallia christiana. A
Rions même, où l'enseignement a toujours été l'objet d'un culte
particulier, quelques citoyens éclairés se sont appliqués à sauvegarder
le souvenir du passé glorieux de leur chère cité; leurs noms respectés
sont encore présents à la mémoire de tous. Signalons, pour terminer, que
Rions doit à M. Ferdinand Cardez la conservation et la restauration de la
porte fortifiée du Lhyan, dont l'imposante silhouette évoque le fier
souvenir des luttes épiques du «bon vieux temps. » Origines
de Rions. La « Villa » Chrétienne. Rions
est situé sur la rive droite de la Garonne, à trente kilomètres environ
de Bordeaux, en pleine Benauge. La ville est construite sur une plate forme
de rochers surplombant, à pic, d'une hauteur respectable, la plaine
d'alluvion qui forme la berge du fleuve. La Garonne baignait autrefois le
pied de l'escarpement, elle s'en est éloignée depuis plusieurs siècles. Par
sa position défensive naturelle, cet emplacement était de nature à
attirer l'attention des premiers habitants de la contrée, il ne parait
pourtant pas avoir été occupé à l'époque de la préhistoire. A
la base du rocher s'ouvraient plusieurs grottes, mais aucune d'elles n'a
fourni le moindre témoignage d'une utilisation aussi reculée. Deux de ces
grottes subsistent à l'heure actuelle. Dans la principale jaillit une
fontaine transformée, de temps immémorial, en lavoir et dénommée
fontaine de Charles VII. Ce monarque, d'après la légende, se serait reposé
un jour auprès de cette source lors de la conquête de la Guienne. Dans
la seconde grotte, que Léo Drouyn indiquait encore comme très vaste en
1865, mais qui a presque entièrement disparu depuis, sous l'affaissement
envahissant des terrains voisins, le même Léo Drouyn a signalé aussi une
inscription gothique dont il a relevé le texte (Guienne militaire I. p.
25). Cette inscription n'existe plus. Les fouilles n'ont jamais, sur
Ces
indications archéologiques sont conformes à ce que l'on sait, de façon
positive, sur l'origine de Rions. Au
début, Rions a été l'une de ces fameuses « villas » gallo
romaines, la plupart fort somptueuses, qui du IVème au VIème
siècle dominèrent cette belle et riche contrée.
Paulin de Nole, Pontius Léontius, l'évêque Léonce et Ausone, possédèrent les plus belles.
La
« villa » de Rions (Reontium) était voisine de la « villa » Vereginis
de l'évêque Léonce II, célébrée par le poète Fortunat. M.
Camille Jullian a, en effet, placé la « villa » Vereginis, avec beaucoup
de vraisemblance, à Baurech.
La
« villa » Reontium avait également comme proche voisine la «villula »
d'Ausone. Cette
« villula » avait été sans cesse confondue avec la célèbre « villa »
Lucaniacus de l'illustre poète bordelais, jusqu'au jour où M. Reinhold
Dezeimeris, éclairé par la lecture sagace des textes de son auteur latin
favori, est arrivé à faire cesser cette confusion.
M.
Dezeimeris a pu déterminer l'emplacement exact de la « villula » en
l'identifiant, de façon certaine, avec les ruines gallo-romaines qui
existent à quelques centaines de mètres de Loupiac de Cadillac.
La
« villa » Reontium appartenait sans doute à quelque riche bordelais, mais
le nom de son propriétaire est demeuré enseveli dans l'oubli. Il était
chrétien, on ne sait rien de plus sur son compte. D'après
le témoignage de saint Grégoire de Tours la « villa » Reontium possédait
une église catholique
L'existence d'une
église à cette époque, et sur ce point de notre territoire, n'est pas
pour surprendre; ce coin de la Benauge, avec Saint Macaire, Verdelais,
Bouliac et autres lieux de miracles et de pèlerinages signalés par M.
Jullian, peut-être considéré comme ayant été :
le berceau d'abord, puis le foyer du christianisme dans la cité de
Bordeaux »
La
question s'est posée de savoir si Ausone lui même n'était pas chrétien;
elle est encore vivement controversée.
A
mesure que les temps devinrent moins sûrs, et la paix romaine moins
efficace, sous la menace perpétuelle des incursions des Barbares, une
population se groupa autour de la « villa » et de son église, ce fut Cette Origine n'a rien de commun avec
celle des bastides
telles que Sauveterre, Créon et Cadillac qui s'élevèrent
presque à ses côtés, au XIIIème, siècle, sous l'inspiration
et la protection des Anglais, et furent construites sur le plan en échiquier
cher aux Anglo-Saxons. La
Gallia christiana cite Rions parmi les plus vieilles cités de l'Aquitaine.
Rôle
Politique et militaire de Rions. Les
historiens signalent que Rions eut à souffrir successivement des invasions
des Sarrazins (731) et des Normands (857) Depuis
ces temps reculés le sort de Rions a été intimement lié à celui de la
Guienne et de Bordeaux. Son histoire se rattache souvent aussi à celle de
la célèbre abbaye de La Sauve. Le
29 octobre 1079 (1), un moine fameux, Geraldus, (saint Gérald ou
saint Gérard), traversant le pays, à la recherche d'un emplacement
favorable à la fondation d'un monastère, découvrit dans la Sylva Major
(la Sauve Majeure) les ruines abandonnées du château d'Hauteville (Altus
villaris, Hautevilla ou Hautevilliers), à dix kilomètres environ de Rions.
L'endroit lui parut propice, il s'y arrêta, et divers signes miraculeux
l'assurèrent de la bénédiction du ciel.
La moitié du terrain allodial sur lequel saint Gérard avait jeté son dévolu appartenait au seigneur Auger de Rions; celui ci s'empressa d'en faire don à saint Gérard et se démit également, en faveur du saint religieux, du droit de justice et du droit à la dîme qu'il possédait sur la contrée.
La propriété de l'autre
A
peine saint Gérard avait il commencé la construction de son église et réglé
un premier conflit avec l'abbé Drogon, du monastère de Maillezais qu'un nouvel obstacle surgit. Le seigneur Bernard d'Escoussans se prétendit propriétaire d'une partie du terrain sur lequel allait s'élever l'édifice sacré et protesta vivement contre la générosité d'Auger de Rions, générosité faite aux dépens de ses voisins.
Les
juges bordelais saisis du litige s'en remirent à la justice de Dieu et
ordonnèrent le combat judiciaire.
Saint
Gérard s'empressa d'intervenir pour empêcher la rencontre ; ses efforts
amenèrent une transaction entre ces orgueils féodaux en conflit. Le duel
n'eut pas lieu. Auger de Rions consentit à céder le terrain litigieux à
Bernard d'Escoussans, celui-ci, de son côté, s'engageait à le rétrocéder
séance tenante à saint Gérard. Saint Gérard n'oublia jamais ses amis de la première heure et, même après sa mort, survenue le 5 avril 1095, sa reconnaissance se manifesta parfois, suivant la légende, de façon miraculeuse. C'est ainsi que, bien des années plus tard, Olivier de Rions, fils du bienfaiteur de l'abbaye, étant tombé entre les mains de ses ennemis, saint Gérard lui apparut et le délivra dans des circonstances merveilleuses que la chronique de l'abbaye de La Sauve a pieusement conservées.
Les
relations toujours cordiales des seigneurs de Rions et de l'abbaye se troublèrent
cependant une fois. En
1184, une difficulté mit aux prises le neuvième abbé de La Sauve, Raymond
de Laubesq (ou de Laubec), avec les seigneurs Guillaume de Curton et Richard
de Rions. Il s'agissait de la justice de Corbelac. Tout d'abord les deux
seigneurs, n'ayant pas daigné comparaître devant l'archevêque de Bordeaux
saisi du différent, furent frappés d'excommunication (in eos
excommunicationis tulit sententiam). Ils acceptèrent alors de
s'incliner devant la prétention de l'abbaye si l'abbé pouvait faire
affirmer, sous la foi du. serment, par l'un de ses religieux, que le droit
de justice, objet du litige, appartenait réellement à l'abbaye.
Au
jour fixé, 10 avril, l'abbé se rendit dans l'église du bourg de La Sauve,
et là, devant les fidèles accourus en foule, présenta un frère convers,
d'âge avancé, d'une honnêteté certaine et éprouvée (virum utique honestum, grandaevum, longa conversionis conversatione probatum)
prêt à fournir le serment demandé. Guillaume de Curton, grand seigneur,
abandonna sur le champ sa revendication. Richard de Rions, seul, persista
dans sa résistance, mais sans succès; il dut se retirer couvert de
confusion (confusus, convictus ac redargutus), après avoir assisté
au triomphe de l'abbaye. L'abbaye
de La Sauve ne garda pas rancune aux seigneurs de Rions. En l'année 1192,
le même Raymond de Laubesq s'étant démis de ses fonctions d'abbé pour
faire pénitence en un lieu plus solitaire encore que La Sauve, choisit une
petite localité, tout à côté de Rions, où se trouvaient les ruines
d'une antique chapelle, dite de Saint Jean de Campaignes, qui avait possédé
autrefois de saintes reliques et appartenait à son frère, Bernard de
Laubesq. Raymond de Laubesq demanda à l'archevêque de Bordeaux, Élie de
Malemort, l'autorisation de relever cette chapelle et fonda ainsi, en 1200,
le prieuré de Saint Jean de Campaignes qui disparut au XV ème siècle.
Aujourd'hui
le château de Jourdan s'élève sur les ruines de ce prieuré. Depuis
cette époque, les événements militaires, autrement dramatiques, se
multiplièrent dans l'histoire de Rions.
Pendant
la guerre de 1294 Le Ce
spectacle, précurseur d'un traitement analogue, jeta la consternation dans
la garnison anglaise, qui s'empressa de battre en retraite et de se réfugier
sur ses navires, poursuivie par les Rionnais indignés de se voir ainsi
abandonnés.
Charles
de Valois profitant du désarroi des défenseurs s'empara de Rions. La
garnison fut passée au fil de l'épée, le château détruit, les murailles
rasées. Si l'on en croit les historiens, s'appuyant sur un passage des Rôles gascons, Rions se serait alors trouvé sans murailles jusqu'en 1330, époque à laquelle Édouard III aurait autorisé Guillaume Seguin, seigneur de Rions, à relever ces murailles « aux dépens de la couronne d'Angleterre »
Mais le texte des Rôles gascons qui est ainsi visé semble devoir être interprété de façon différente. Le seigneur de Rions dut probablement relever assez vite les murs de la cité. Les Rôles gascons disent seulement qu'il s'en fit rembourser, en 1330, par Édouard III.
Il
paraît peu vraisemblable, d'ailleurs, que la ville soit demeurée sans défense,
ouverte à tous, pendant près de quarante ans.
Au
cours de la guerre de Cent Ans, Rions, comme En 1316, Rions fut pris par les Anglais commandés par le duc de Lancastre et Gautier de Mauny.
En l'année 1379, la Ville de Bordeaux, obéissant à une pensée politique qui n'a jamais été clairement précisée, entreprit d'organiser une sorte de confédération des principales cités de la région bordelaise.
Son appel
fuit entendu par huit d'entre elles. Blaye, Bourg, Libourne, Saint Emilion,
Castillon, Cadillac, Saint Macaire et Rions
Depuis
lors, dit de Lurbe, ces huit villes «sont appelées filleules de la
dicte ville de Bourdeaux ».
Le
simple examen d'une carte de la région permet de constater que ce n'est
point à la légère que Bordeaux a choisi ses filleules. Au point de vue
militaire, les places de Blaye, Bourg, Libourne, Saint Emilion et Castillon
constituaient une première et solide ligne Quoi
qu'il en soit, les huit villes ainsi affiliées à la fortune de la capitale
de la Guienne prirent le nom de « filleules ». L'origine et la
raison d'être de cette appellation sont demeurées aussi obscures que le
but de la confédération même. Les plus savantes conjectures se sont donné
libre cours à ce sujet. En
1404, Rions tenait pour le roi de France. En
1420, les bordelais, agissant pour le compte du roi d'Angleterre, vinrent
l'assiéger. Le siège fut long. Les registres de la jurade bordelaise
contiennent une série de délibérations relatives à cette expédition
militaire (vote de crédits, ordres aux canonniers, etc.)
Les
opérations se prolongèrent pendant les mois de juin et de juillet. Pour
arriver à réduire sa « filleule », Bordeaux dut employer les
grands moyens et utiliser notamment la fameuse bombarde dont les boulets de
pierre pesaient « VII quintaus ». Rions fut pris, mais pendant bien des
mois encore la jurade bordelaise eut à prendre des dispositions financières
pour achever de payer les frais nécessités par ce siège.
Au
mois de mai 1451, Rions fut assiégé par un corps de l'armée de Charles
VII commandée par le comte d'Armagnac (Guienne
militaire, t.I, p. 19) et rentra sous
la domination française par l'effet du traité du 20 juin 1451. Par ce
traité, les bordelais avaient promis de se rendre s'ils n'étaient pas
secourus par les Anglais le 23 juin.
En
attendant l'expiration de ce délai, Rions fut l'une des villes données en
gage et « baillée ès mains de mon seigneur le comte de Dunois ». Ce fut
la première conquête de la Guienne par Charles VII. L'année
suivante, au mépris de la foi jurée, Bordeaux ayant rappelé les Anglais,
le vieux Talbot revint à la tête d'une dernière armée anglaise, mais il
fut battu et tué, comme on sait, à la bataille de Castillon le 16 juillet
1453, et la Guienne rentra, pour toujours, au sein de la patrie française. Rions
qui avait pris part à la révolte de Bordeaux, ne se rendit aux Français
qu'après une résistance aussi désespérée qu'inutile.
Rions
a revu les Anglais en 1814. Après la bataille de Toulouse, leur armée,
refoulant le maréchal Soult, remontait la rive gauche de la Garonne avec
Bordeaux comme objectif. Leur chef, lord Beresford, se souvenant de
l'antique cité de Rions, supposa, sans doute, qu'elle était demeurée une
place forte dont la valeur militaire était touJours à la hauteur de sa réputation.
En conséquence, il la traita comme telle et lui adressa
Le
dernier écho des relations de Rions avec l'Angleterre a retenti, il y a
quelques années à peine, véritable prélude de « l'entente cordiale ».
Le 12 septembre 1895, le Lord Maire de Londres, Son Excellence lord Renals,
accompagné de la gracieuse Lady Mayoress, venu à Bordeaux, à l'occasion
de l'Exposition de la Société Philomathique, avait inscrit sur son
programme une visite à Rions. Cette visite avait été fixée au retour
d'une excursion dans le pays de Sauternes. Par suite de divers retards dans
l'emploi de leur journée, les deux illustres visiteurs durent, à leur
grand regret, brûler cette dernière étape. M. Ferdinand Cardez, alors
maire de Rions, fit parvenir à Son Excellence lord Renals le texte du
discours de bienvenue qu'il lui avait destiné, et le Lord Maire traduisit
ses sentiments de gratitude dans une lettre que les journaux de Bordeaux ont
tenu à reproduire. Le discours de M. F. Cardez a été publié par le Bordeaux Journal (n° du 15 septembre 1895). La lettre de S. E. le Lord Maire a été publiée par le même journal (n° du 16 septembre). Cette
lettre était accompagnée des photographies de Lady Mayoress et du Lord
Maire, avec dédicaces des plus aimables. A
la guerre de Cent Ans succéda, pour Rions, la longue période des guerres
religieuses et des convulsions politiques de la Ligue et de la Fronde.
Au
mois d'octobre 1590, pendant les troubles qui suivirent l'avènement d'Henri
IV, alors que Paris tenait pour la Ligue, Rions fut surpris et occupé par
les Ligueurs.
Le
maréchal de Matignon venu de Bordeaux pour reprendre la ville se heurta à
une résistance telle qu'il dut négocier et accorder aux rebelles une
capitulation honorable. En
1652, les Rionnais repoussèrent le fameux marquis de Galapian. Depuis
lors, et jusqu'en 1789, Rions a vécu tranquille, son rôle dans l'histoire
politique et militaire de la Guienne était terminé.
La
Baronnie. A
l'époque de la féodalité, la terre, en principe, n'était pas libre, et
le régime féodal s'appliqua pleinement à la ville de Rions. Son
territoire dépendait du comté de Benauge et avait été érigé en
baronnie. Il comprenait les terres et paroisses de Virelade, Cérons,
Barsac, Illats et Loupiac.
Guienne militaire (t.I, p. 18). Compte rendu des travaux de la Commission des monuments et documents historiques de la Gironde (année 1850-51, p. 29). Ses
premiers seigneurs appartenaient à la famille Seguin, qui semble descendre
d'un Seguin, lieutenant de Charles le Chauve en Aquitaine en 857, et même
du comte Seguin, lieutenant de Charlemagne
En
1317, « Bérard d'Albret acheta de Guilhem Seguin, de Rions, le château et
la justice de Rions, qu'il lui vendit par inféodation à la suite d'un long
procès en 1327 ».
Rions eut ainsi l'honneur d'avoir successivement pour seigneurs le captal de Buch, le roi de Navarre, Henri IV et Louis XIII.
La
baronnie de Rions passa ensuite au duc d'Épernon, à la famille de
Chabannes Carton, à la famille de Ribérac, enfin, de 1724 jusqu'à la Révolution,
à la maison de Sallegourde.
Les armoiries de Charles d'Albret, comte de Dreux et captal de Buch, figurent encore sur un écusson de pierre, sculpté au dessus de la porte du clocher de l'église Saint Seurin de Rions; elles ont été décrites par Léo Drouyn.
«
Charles d'Albret portait en ses armes . écartelé de Foix, qui est d'or à
trois pals de gueules, et de Béarn, qui est d'or à deux vaches de gueules,
passantes, accolées, clarinées et accornées d'azur. » La
tradition des habitants veut
que la Ville ait reçu de Charles d'Albret l'autorisation de porter ces
armoiries. Le fait qu'elles ont été sculptées sur le clocher de l'église
de la vieille cité corrobore puissamment cette tradition. Sauf
en deux circonstances, qui seront indiquées plus loin, Rions n'eut pas à
se plaindre de ses barons et vécut en paix avec eux. Coutumes
et Privilèges. D'une
manière générale, les seigneurs de Rions entretinrent avec la cité des
rapports empreints de bienveillance et de libéralisme. Ils paraissent lui
avoir accordé sans difficulté toutes les franchises et libertés,
compatibles avec l'état social de ces temps imprégnés des mœurs et idées
féodales. Dès
1328, Bérard d'Albret fit recueillir et rédiger les coutumes de Rions et
en octroya officiellement les privilèges à ses habitants. Ces privilèges,
franchises et libertés furent successivement confirmés en 1463 par Charles
d'Albret, comte de Dreux et captal de Buch, puis en 1585 par le duc
d'Albret, roi de Navarre, qui depuis, fut Henri IV, et enfin, en 1655, par
lettres patentes de Louis XIV, enregistrées parle Parlement de Bordeaux, le
23 février 1656.
Aux
termes de ces coutumes ou privilèges, primitivement rédigés en gascon et
traduits en français en 1585, Rions était administré par quatre jurats,
dont les fonctions étaient annuelles, assistés d'un corps de prud'hommes
composé de seize notables recrutés parmi les bourgeois les plus considérables
de la ville. Ces seize bourgeois étaient nommés à vie et constituaient le
Conseil de la ville.
Huit
de ces Les
pouvoirs des jurats, limités d'un côté par l'autorité des officiers
seigneuriaux, et d'un autre côté par le contrôle du Conseil de ville, se
réduisaient à peu près exclusivement à des fonctions de police. La
réglementation de la vente du vin tient la plus grande place dans ces
privilèges, ainsi que l'on peut s'en rendre compte par la lecture des
nombreux articles qui sont consacrés à cette importante question.
Voici le texte de ces privilèges :
S'ensuict
le cayer des privilèges, franchises, libertés ci-devant octroyés par les
sires d'Albret et confirmés de main en main aux bourgeois de la
ville de Rions avec d'autres articles les tous tandant tant à la
conservation des droicts du roy de Navarre, duc d'Albret, qu'au bien,
proffict, soulagement commun des dicts de Rions : Premièrement,
est ordonné que, appelé le juge procureur et autres officiers du roy de
Navarre, duc d'Albret, et la pluspart des habitans de la dicte ville par
advis d'iceux habitans, les dicts officiers et jurats esliront la présente
année, le jour accoustumé muer la jurade, scavoir : Le
nombre de sèze personnages des plus aparans et notables bourgeois restans
en la dicte ville pour, leur vie durant, estre prud'hommes et du Conseil de
ville, desquels sèze les juratz quy sont à présent en charge en nommeront
huict, sçavoir IV
Item. Pourront les dicts juratz s'ils treuvent quelqu'un se quereller et
entrebattre par les ruhes, les prendre sur l'heure et iceux mener et
conduire ez prisons de la dicte jurade pour y être tenus par l'espace de
vingt quatre heures ; et s'il s'y trouve crisme qui mérite plus grande
punition que de prison, les dellivrer ez mains du prévot pour les conduire
ez prisons du dict Rions, pour la leur estre faict leur procès, suivant
l'exigence du cas. V
Item. Seront tenus les babitans de la dicte ville et paroisse obéir aux
dictz juratz pour les affaires publicqs et réparations de la dicte
ville et y aller travailler par manoeuvres et ainsin qu'il sera
advisé,
à peine de sept sols six deniers dont seront VI
Item. Sera permis aux dictz bourgeois, manans et habitans du dict Rions,
passer et repasser avec leurs bateaux et filladières de Ruscaudy,
juridiction de Rions à Poudensac, non sullement les jours de foire, mais
tous les autres jours et à toutes heures ainsin qu'il est de tout temps
accoustumé, s'ans qu'ilz puissent pour raison de ce ny de ce qu'ilz
passeront avec leurs dicts bateaux estre en rien tenuz aux seigneurs de
Poudensac. VII
Item. Pourront les ditz bourgeois, manans et habitans du dict Rions mettre
et tenir à la pêche à la bette (fossé) de Ruscaudy, trois tressons ou
tresses en payant au dict sieur la huitaine du poisson qu'ilz prendront en
la dicte pêche, le tout selon ce qu'ils ont accoustumé de tout temps. IX
Item. Pourra le dict seigneur, lorsqu'il sera en la dicte ville, porter du
vin d'où bon lui semblera pour luy, son train et suitte pour leur
provision. X
Item. Que aucungns des hostes, soict u port de Béguey ou d'ailleurs en la
dicte juridiction ne pourront accepter vin pour vendre et débiter en leurs
hostelleries, en charger ny nullement mettre à couvert, s'il n'est du creu
et recueilhv dans la dicte juridiction, à peine, s'il leur
en est trouvé d'estre défoncé, distribué et le bois brûlé comme
dessus est dict; et en outre sy celluy quy sera trouvé saisy du dict vin
est bourgeois, sera privé du droict de bourgeoisie et condamné en l'amende
de dix livres, le non bourgeois en vingt livres, applicables comme dessus ;
et en cas qu'il ne s'en trouvast du creu de la dicte juridiction, au préalable
que les dictz hostelliers en puissent acheter d'autres lieux ; présenteront
requeste par devant le juge ordinaire du dict Rions suivant la coustume
ancienne et de tout temps observée contre les juratz à ce qu'ils soient
pourveus de vins pour l'entretenement de leurs hostelleries, et enjoinct et
recherché par la dicte ville pour sçavoir s'il s'en y trouvera pour les
recherches et rapport faict au greffe en événement qu'il n'en soict trouvé,
leur estre permis en prendre et acheter ailleurs où bon leur semblera pour
l'entretenement de leurs hostelleries. XI
Item.
Pendant le mois du debet appelé mayade, autrement pendant lequel autre que
le seigneur, ou celluy qui a droict du seigneur, ne peult vendre
vin en taverne et destail, sera tenu le fermier des droits du dict
seigneur fournir de deux sortes de vin blanc et clairet, bon et suffisant
comme de tout temps a esté faict; et où il fera faulte, les juratz seront
tenus modérer le prix du dict vin blanc et clairet, sellon la valleur ou
permettre aux dicts bourgeois de bailler liberté d'en vendre de leurs creus,
à la charge de payer la coustume au dict fermier pendant les dicts mois. XII
Item. S'il se trouve aucun bourgeois ou autre quy pendant le dict mois du
debet ou mayade entreprenne vendre aucun vin à pot et à pinte, si non
qu'il luy soit permis par les dicts juratz ou fermier d'icelluy, a faute
comme dict est, que le fermier XIII
Item. Ne pourra le dict seigneur ou son fermier dudict debet, pendant
ycelluy, vendre vin blanc et clairet à plus haut prix qu'il a été vendu
en taverne et détail les derniers mois auparavant icelluy debet ; pendant
lequel pourra vendre vin blanc et clairet, bon et suffisant, de quelque
juridiction que ce soigt de la sénéchaussée de Guvenne. XIV
Item. Ne sera permis à aucun habitant s'il n'est bourgeois tant de la dicte
ville que paroisse, vendre son vin en taverne bien qu'il soit de la dicte
juridiction et de son creu, et où ils mettroient leur vin en la dicte
ville, sera marqué de la marque de la dicte ville pour estre comme vin non
bourgeois, à ce qu'il ne puisse estre vendu tant qu'il s'en trouvera vin du
creu des bourgeois en la dicte juridiction. XV
Item. Pour le droict de marque de vin non bourgeois qui entrera en la dicte
ville, soict en vendange ou en vin provenu de la dicte vendange, sera payé
cinq sols par thonneau, moitié au dict seigneur moitié à la dicte
ville. XVI
Item. Que les dicts juratz pour les coustumes de la
ville appelé : le Soquet ou Lect (Lebt), prendront suivant qu'ils
ont accoustumé, sur les dicts bourgeois ou vendans vin en détail, pour
chasque barrique quy sera vendue six pots de vin ou sol tournois pour franc
bourdellois, tant dans la dicte ville
que paroisse d'icelle. XVII
Item. Auparavant mettre vin en taverne les bourgeois seront tenus appeler
les juratz ou proches voisins
pour prendre le som (sem) et vide de la barrique qu'ils vendront et à faute
de les avoir appelés, ou l'un d'eux, payeront entièrement les six pots de
vin par barrique, ou sou tournois pour franc comme dict est, tant dans la
dicte ville que susdictes
paroisses d'icelle. XVIII
Item. Les dicts juratz à la fin de leur jurade rendront compte à leurs
successeurs des deniers provenant du dict debet et coustumes de la ville,
comme de tout le reste de leur charge XIX
Item. De l'argent provenant de la dicte coustume, autres que les bourgeois,
ne s'en pourront prévaloir, ains seront convertis à leurs décharges aux
affaires de la chose publicque. XX
Item. Que aucuns bourgeois ni babitans de la dicte ville ni jurisdixtion ne
pourront mener paistre pourceaux, grandz ni petitz audessoubz le chemin
appelé du Mitan, autrement du Deymary, par lequel on va du Tourne à
Cadillac, et l'enclos appelé : le Deymary de Rions ; et sy les dictz
pourceaux sont trouvés dans les bledz, vignes et jardins, sera permis aux
propriétaires des lieux, les tuer, sans que pour raison de ce, ilz puissent
estre poursuivis par justice, et ce suivant les entiens privilèges. XXI
Item. Les dicts juratz. suivant la coustume entienne de laquelle ilz sont en
possession immémoriale, pourront prendre en l'isle de Rions en toute saison
les brebis, moutons, chèvres et pourceaux qu'ilz y trouveront paistre et
icelles mener et conduire en la place du chasteau lesquelles pourront tenir
vingt quatre heures sans les rendre au prévost; et prendront les dicts
juratz pour chacun chef sept sols deniers de pignore, et pour pourceaux deux
sols tournois, auparavant que les propriétaires d'icelles les puissent
retirer d'entre leurs mains, sans toucher au droict du dit prévost sy elles
lui avaient été données en garde. XXII
Item. S'il se trouve aucungs pourceaux, brebis, moutons et chèvres, ni
austres sortes de bestail gros et menus paistre dans les douves des fossés
de la dicte ville, les pourront les dicts juratz prendre et pignorer,
scavoir est : les brebis sept deniers pour chef, les pourceaux, boeufs et chèvres
et autre bestail deux sols tournois ; et ne seront tenus dellivrer le dict
bestail que la dicte somme et pignore ne leur soict payée et ce en tout
temps. XXIII
Item. Le greffier et prévost ne pourront prendre outre et plus grand droict
que celluy qu'ilz ont accoustumé de tout temps. XXIV
Item. Sera mis au tableau dans le parquet et auditoire de la cour du dict
Rions, ou seront escritz par articles les droicts En
foy et témoignage de quoy, nous Mathieu de Marsilly, docteur, et Pierre
Paschal, licentiez ez droitz, commissaires du Roi de Navarre, duc d'Albret
et maistres des requestes ordinaires de son hostel, nous sommes cy
soubzsignés. Le
dix huitième jour du mois de Febvrier mil cinq cens quatre vingtz et cinq, Ainsin
signé
M. de MARSILLY,
PASCHAL, Commissaire
susdict.
Commissaire susdict.
Au
mois d'avril 1565, Charles IX autorisa, par lettres patentes, la ville de
Rions à tenir quatre foires, aux dates suivantes : 20 janvier (fête de
saint Fabien), 25 avril (fête de saint Marc), 26 juin (fête de sainte
Anne), 15 novembre (fête de la saint Martin), il autorisait en même temps
un marché le lundi de chaque semaine. Dans
deux circonstances, Rions dut défendre ses franchises et privilèges contre
les prétentions de ses derniers barons. En 1688 (1), le vicomte de Ribérac, comte de Benauge et baron de Rions, avait nommé un jurat (Jean Granlocq) en dehors de la liste dressée par le corps des prud'hommes.
La ville de Rions, jalouse de faire respecter sa charte
municipale, se pourvut devant le parlement de Bordeaux. En 1689, un arrêt
ordonna que le seigneur de Rions devrait choisir
Au
mois de mars 1788, le seigneur de Rions, M. de Sallegourde s'étant fait
remettre le texte original des privilèges, sous prétexte de les faire
confirmer, refusa de remettre ce titre précieux. Il s'empara, en outre, des
douves et fossés de la ville, convertis en jardins, affermés cent vingt
livres; il se saisit aussi du droit de pêche, et ses officiers s'opposèrent
à l'usage par les jurats de la prison municipale. Les
jurats de Rions demandèrent à l'Intendant de la province l'autorisation
d'assigner M. de Sallegourde. Le procès fut introduit, mais la Révolution,
en supprimant les droits et privilèges seigneuriaux et communaux, rendit
inutile une solution judiciaire.
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Rions préface.
Réalisée le 28 décembre 2005 André Cochet Mise sur le Web le décembre 2005 Christian Flages